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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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besoin d’un frère raisonnable, qui lui portât intérêt, dit le général, pensif.
     
    – Je lui ai promis de toujours répondre à ses appels en l’acceptant telle qu’elle est, fantasque et imprévisible. C’est une nature à qui on ne peut offrir qu’une sorte d’amitié sans rien attendre en retour, n’est-ce pas ? ajouta Axel, un peu gêné.
     
    Le général approuva d’un hochement de tête et ralluma le cigare qu’il avait laissé s’éteindre, signe de trouble chez ce soldat.
     
    – La nature de vos relations avec Adriana me touche d’autant plus que je n’ai senti s’éveiller en moi le sentiment paternel que le jour où j’ai connu votre existence. Adriana a toujours été pour moi une étrangère. Elle l’est encore. Comme sa mère, c’est une Tsigane errante, au sens matériel comme au sens moral. La route est sa maison. Elle ne fixera jamais son foyer ni sa foi ni son cœur ni ses sens. Ma seule crainte est de vous voir engagé par affection et générosité, dans une de ces aventures risquées, où elle se jette sans réfléchir. Pour elle, tous ceux qui se réclament des idéaux révolutionnaires sont purs et honnêtes, tous ceux qui détiennent un brin d’autorité sont des tyrans bons à tuer. Votre séjour à Koriska doit d’ailleurs vous rendre circonspect, conclut Blaise.
     
    Le général et son fils décidèrent, pour la sécurité d’Adrienne, de conserver, entre hommes, le secret de Koriska. Seul Chantenoz savait. Le drame suscité par l’indiscrétion de 1819 l’inciterait au silence.
     
    D’un même pas, le père et le fils descendirent au salon, Trévotte ayant claironné l’arrivée des premiers invités. Charlotte paraissait parfaitement à l’aise dans son rôle d’épouse de général-marquis. Elle restait, à quarante-cinq ans, une belle femme aux bras dodus, au buste ferme, à l’œil brillant. La blondeur qui lui avait valu le tendre sobriquet de Dorette, bien qu’entretenue maintenant par les artifices des servantes, n’avait rien d’abusif. Son mariage avec Blaise, en lui assurant une position sociale et mondaine, l’avait élevée au rang des épouses de personnalités cantonales. Elle était entrée dans ce rôle avec naturel et distinction, trouvant spontanément le ton, le port, la démarche qui convenaient à un état qu’elle avait si longtemps envié. Personne ne se souvenait plus, ou chacun feignait d’avoir oublié que M me  de Fontsalte avait été l’épouse d’un vigneron, armateur et commerçant.
     
    – On dirait qu’elle n’a jamais eu d’autre mari, dit Flora à Axel en regardant son amie accueillir, en compagnie de Blaise, les invités du couple, tous représentants de la meilleure société vaudoise.
     
    – En a-t-elle jamais eu d’autre, Flora ? N’était-elle pas née pour être à la place où nous la voyons aujourd’hui ? dit Axel.
     
    – Elle est heureuse, enfin ! reprit l’Italienne avec un soupir.
     
    Plus que le contentement inspiré par le bonheur de Charlotte, ce soupir révélait l’insatisfaction secrète de Flora.
     
    Axel n’était pas dupe des attendrissements de sa marraine. Aussi vit-il avec plaisir entrer dans le salon le comte Claude Ribeyre de Béran. L’ami de Blaise faisait des séjours de plus en plus fréquents à Lausanne, où, à la suggestion de Fontsalte, il venait de louer un appartement, proche de Beauregard. Le climat lémanique atténuait, disait-il, ses douleurs, séquelles rhumatismales des blessures de guerre.
     
    – Quand se décidera-t-il à demander ta main ? souffla Axel à l’oreille de Flora, dont Charlotte disait qu’elle était amoureuse de Ribeyre.
     
    – Tais-toi, mauvais sujet ! Qui voudrait d’une vieille fille comme moi ! Oublies-tu que j’ai cinq ans de plus que ta mère ?
     
    – Fille, mais pas vieille, marraine ! Le demi-siècle a passé sur toi sans t’abîmer ! Ainsi, dans cette robe mauve, assez moulante pour révéler…
     
    – Tais-toi, tais-toi ! coupa-t-elle en voyant approcher, frêle, sec, l’œil vif et noir d’une souris espiègle, serré dans un frac bleu de nuit que décorait au revers l’insigne de commandeur de la Légion d’honneur, le général Ribeyre.
     
    Axel salua l’ami de son père et s’éloigna, laissant Flora et le général tête à tête.
     
    Plus tard, au cours de la soirée, les deux anciens officiers du service des Affaires secrètes et des Reconnaissances exprimèrent, devant

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