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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Chantenoz, amant d’une épouse de pasteur ! Je crains que cette dépendance ecclésiastique n’ajoute à votre plaisir d’athée quand vous la mettez au lit. Une femme de pasteur ! répéta Métaz, incrédule.
     
    – Et de pasteur anglais, qui plus est, mon garçon ! Mais ne me fais pas plus vicieux que je puis l’être : ma dulcinée est une femme malheureuse, intelligente et sensible, que son vieux mari, malade, pingre et songe-creux, néglige depuis longtemps et traite plus en servante corvéable à merci qu’en épouse. Nous avons plaisir, elle et moi, à être ensemble… de toutes les façons. Pas seulement pour transgresser, avec volupté et bonne conscience, le sixième commandement, mais, aussi, pour échanger des idées et faire de la musique, car, excellente violoniste, elle accompagne mes pianoteries. Nous avons même composé ensemble une sonate ! Je te dis tout ça aujourd’hui pour que tu comprennes que, ce soir, je ne pourrai être avec toi. C’est le temps où nous nous rencontrons chez moi, comme chaque mois, quand le pasteur s’en va tenter, à Sion ou à Bex, de convertir les catholiques valaisans en protestants genevois !
     
    – Vous dirai-je, Martin, que cette confidence me réjouit, d’abord parce qu’elle me prouve votre confiance et aussi parce que je suis heureux d’apprendre qu’il y a, enfin, une femme dans votre vie, dit Axel en serrant affectueusement le bras du professeur.
     
    Le jeune homme savait combien Chantenoz avait autrefois aimé sa mère, Charlotte Rudmeyer, et quelle déception lui avait causée, plus tard, cette sylphide de sa jeunesse.
     
    – Oui, Martin, que vous trouviez de temps à autre un peu de plaisir et, peut-être, de bonheur dans les bras d’une femme me rend heureux, répéta Axel, sincère et chaleureux.
     
    – En somme, tu me trouves physiologiquement normal ! Je n’ai qu’une crainte, mon garçon, c’est que le vieux mari trépasse. Car, veuve, l’amie s’attendrait à ce que je l’épouse. Or le mariage n’est pas plus fait pour moi que pour toi. Aussi, je fais des vœux pour que le barbon reste en vie ! conclut Martin Chantenoz en saisissant le pichet d’étain pour servir à boire.
     
    Le voyage avait duré quatre heures et, tandis que le professeur courait à ses amours, rue des Belles-Filles, Axel prit ses quartiers habituels, à l’hôtel de la Couronne. Par un billet confié à un chasseur, il fit aussitôt savoir à M me  Laviron et à sa fille qu’il était en ville et attendait qu’on lui indiquât l’heure du rendez-vous pour la visite du musée, le lendemain.
     
    Il fut surpris, alors qu’il regagnait l’hôtel, après avoir fait quelques emplettes dans les rues basses, de trouver Juliane Laviron, qui l’attendait au salon.
     
    La jeune fille portait une robe de taffetas imprimé, coquille d’œuf à motif rose, serrée à la taille par une ceinture de même ton et dont une guimpe d’organdi réduisait le décolleté. Elle avait ôté et jeté sur un fauteuil sa capeline de paille d’Italie, ornée d’un nœud et d’un flot de ruban. Axel la trouva plus jolie que jamais et commença par la remercier pour son invitation et aussi pour sa lettre, la première, fit-il observer, qu’elle lui écrivait. Il ajouta galamment qu’il n’avait constaté aucune froideur de sa part le 15 juillet, qu’il avait, en revanche, constaté sa fatigue. Il n’accordait aucun pardon, Juliane n’ayant rien à se faire pardonner. Ce marivaudage achevé, il s’engagea, comme la jeune fille le lui demandait, à venir la prendre, avec sa mère, le lendemain à dix heures, pour conduire ces dames au musée.
     
    – Papa nous laisse sa calèche, qui nous a transportés de la maison de Cologny, où nous résidons tout l’été, à la rue des Granges, où nous ne resterons que quelques jours. Vous n’aurez pas, ainsi, à vous soucier, demain, de louer une voiture, dit-elle.
     
    Ils prirent ensuite le thé et Axel proposa à Juliane de la raccompagner rue des Granges. Comme il demandait au portier de convoquer le cabriolet de l’établissement, Juliane intervint.
     
    – Nous pouvons aller à pied jusqu’à la ville haute. Il fait si beau ! dit-elle.
     
    Après quelques pas, Juliane prit avec naturel le bras de son cavalier. Axel vit dans ce geste familier un calcul. « Je cours le risque, pensa-t-il aussitôt, de passer pour prétendant autorisé, ce que je ne veux pas être. » En approchant de la

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