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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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après-midi, présentée à l’écrivain et homme politique qui avait moissonné tant de cœurs !
     
    Elle l’avait aperçu, quand il se rendait au Cercle littéraire de la place Saint-François, véritable club des libéraux, où l’écrivain avait été admis « pour le temps de son séjour ». M me  de Fontsalte eût préféré le voir fréquenter le Cercle littéraire, plus conservateur, de la rue de Bourg. Elle avait été étonnée de trouver M. de Chateaubriand petit, presque rachitique, de lui voir le cheveu grisonnant, pauvre et indiscipliné, mais la grâce et l’extrême distinction de l’ami de feu M me  de Staël avaient subjugué Charlotte. Elle avait rapporté à Blaise, d’une indifférence marquée à l’égard de l’ancien ministre qui avait envoyé des Français rétablir sur le trône d’Espagne un parfait despote, l’élégance naturelle avec laquelle ce gentilhomme, âgé de cinquante-huit ans, ôtait son chapeau pour saluer qui le saluait.
     
    – Ah ! telle aisance ne s’acquiert pas dans les salons. Elle est innée, infuse, de race ! s’était-elle exclamée, ébahissant le général et provoquant l’hilarité de Flora, présente à Beauregard, ce jour-là comme toujours quand Ribeyre était à Lausanne.
     
    M me  de Fontsalte, au courant des cancans de la rue de Bourg, plaignit l’illustre voisin quand elle apprit, presque en même temps que lui, le décès intervenu le 13 juillet, de Delphine de Sabran, comtesse de Custine. Cette femme, dont on disait qu’elle avait été longtemps l’amie très intime de l’écrivain, venait de succomber à l’hôtel de l’Union, à Bex.
     
    Et puis, au lendemain du lancement du Léman , on sut que M me  de Chateaubriand, chez qui l’humidité lacustre activait les rhumatismes, faisait ses malles. Le 16 juillet, elle était partie.
     
    Une semaine plus tard, son mari, qui avait cependant loué chez M me  de Cottens jusqu’en octobre, quitta à son tour Lausanne, après avoir assisté, dans la forêt de Sauvabelin, à la fête du Bois, instituée pour la jeunesse après l’indépendance du canton de Vaud. Ce jour-là, des centaines de Lausannois avaient fait la haie, de la rue du Grand-Chêne à la Barre, sur près de deux lieues, pour voir défiler, derrière les musiques, écoliers et membres des sociétés locales. Les jeunes et les moins jeunes avaient, ensuite, tiré, qui à l’arc, qui au fusil, avant de danser sous les ormeaux, comme en se souvenant de Rousseau et de Muse galante . Charlotte, bien que présente un moment à cette fête populaire, n’avait pas pu parler à M. de Chateaubriand. Le nom de Fontsalte, ancien officier général des Affaires secrètes, devait être connu du royaliste, ancien émigré, qui ne pardonnait à l’empereur mort prisonnier à Sainte-Hélène ni l’internement du pape, ni l’exécution du duc d’Enghien, ni la mort de son cousin Armand, ni surtout, affirmait Ribeyre, la gloire posthume et universelle de Napoléon !
     
    Charlotte se consolait maintenant en montrant la belle dédicace « à une voisine que j’aurais aimé connaître », inscrite par le galant vicomte, une heure avant son départ, sur un exemplaire relié du Génie du christianisme . Nul doute que René eût reconnu en elle une héroïne romantique.
     

    Axel avait agi en homme d’honneur en décidant de ne plus apparaître rue des Granges, chez les Laviron, chaque fois qu’il allait à Genève. Il s’était promis de voir désormais son banquier dans son bureau de la Corraterie ou, parfois, plus courtoisement, au Cercle des grenadiers, dont ils étaient l’un et l’autre membres. Il saurait, en revanche, éluder, sous des prétextes divers, les invitations familiales.
     
    C’était compter sans l’attachement sincère de Juliane et la récente résolution de celle-ci de ne pas espérer plus qu’elle ne pourrait recevoir. Le 27 juillet, un courrier rapide, apporté à Vevey par le Léman , entré en service commercial le jour même, parvint à Rive-Reine. Axel, qui avait passé la journée dans les vignes avec Simon Blanchod, trouva la lettre à l’heure du souper. Il reconnut aussitôt l’anglaise élégante de Juliane Laviron.
     

    « Cher Axel,
     
    » Papa étant accaparé par la préparation de la grande fête de la Société helvétique de musique, nous comptons sur vous, maman et moi, pour accompagner deux ignorantes des choses de l’art à l’inauguration du musée des

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