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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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où tant de croyants s’étaient rassemblés depuis le iv e  siècle devaient régner, estimait-il, de mystiques et rassurants effluves incitant à l’abandon confiant, offrant sérénité à l’âme, à l’esprit, clarté, et, aux sens, apaisement.
     
    Le jeune homme possédait une foi lucide et suffisante et, s’il respectait pasteurs et prêtres, il ne les considérait pas pour autant comme des intermédiaires indispensables entre l’homme et Dieu.
     
    Martin Chantenoz, le mentor qui avait formé son esprit, avait aussi gauchi sa conception des religions, dont il considérait toutes les gesticulations inutiles et fallacieuses dès qu’elles débordaient le seul enseignement de la morale. « Si Dieu existe sous une forme inimaginable par un esprit humain, il faut attendre qu’il se manifeste dans l’âme du croyant qui le sollicite, comme il le fit pour Blaise Pascal, au cours de la nuit du 23 novembre 1654 », disait souvent Martin, ironique. Au fil des années, Axel Métaz s’était cependant persuadé que le sobre protestantisme de Guillaume paraissait mieux adapté à l’accueil d’une révélation de type pascalien que le catholicisme à falbalas de sa mère.
     
    « À Dieu seul soit la gloire ! » s’étaient écriés les huguenots, le 8 août 1535, en détruisant autels, statues, tableaux, orgues, jubé, stalles et en barbouillant les fresques qui ornaient le sanctuaire catholique. Seuls les vitraux avaient été épargnés, « parce qu’il fallait tout de même bien laisser des vitres aux fenêtres pour quand soufflerait la bise noire », avait un jour expliqué, avec son bon sens pratique, Guillaume Métaz.
     
    Ce dernier, avec la rigueur et l’équité qui le caractérisaient, avait laissé en banque, pour son fils et successeur, exactement de quoi faire face pendant un an à la marche des entreprises qu’il léguait. Passé ce délai, que Pierre-Antoine Laviron avait jugé un peu court, les affaires Métaz devraient trouver en elles-mêmes leurs ressources de fonctionnement et, Guillaume semblait y compter, de quoi produire des bénéfices !
     
    Avant de quitter la cathédrale, Axel demanda mentalement, sans que cela prît la forme d’une prière, que son père et sa sœur Blandine, exilés en Amérique, fussent protégés de tous les dangers, que sa mère pût trouver la paix du cœur et qu’Adrienne von Fernberg, la femme qui hantait ses rêves et qu’il souhaitait ardemment revoir, lui revînt un jour. Dans la maison de Dieu, cette dernière aspiration paraissait impie. Axel se dit, avec le sourire du sceptique, que Dieu ne faciliterait pas une rencontre d’avance dévolue au péché originel et qu’il eût, sans doute, mieux valu s’adresser au diable !
     

    Le lendemain matin, très tôt, il prit la diligence pour Lausanne, après avoir vendu, chez un joaillier, deux diamants tirés du trésor de Blaise de Fontsalte. Il s’assura ainsi de quoi payer tous les frais engagés à Rive-Reine et pourvoir, pendant des mois, à son modeste train de vie.
     
    À l’arrêt de Morges, pour se protéger des bavardages des voyageurs, il ouvrit un livre acheté à Genève. Le libraire lui avait recommandé un ouvrage traduit de l’anglais au titre étrange, Frankenstein , en lui affirmant qu’il avait été écrit à Cologny, en 1816, par Mary Shelley, la femme du poète. À l’époque le couple résidait à Montalègre et fréquentait assidûment lord Byron, alors installé à la villa voisine, Diodati. Cela amusa Axel, qui se souvint d’avoir, en ce temps-là, avec Chantenoz, observé Byron à la lorgnette, de la terrasse de M. Laviron, le banquier de son père.
     
    Dans sa préface datée de Marlow, septembre 1817, l’auteur confirmait le dire du libraire : « J’ai, en effet, passé l’été de 1816 dans les environs de Genève. La saison fut froide et pluvieuse, cette année-là, aussi nous réunissions-nous chaque soir autour d’un grand feu de bois, nous complaisant parfois à nous conter mutuellement des histoires allemandes de reve nants, que nous avions glanées, ici et là. Ces récits nous donnèrent l’idée d’en inventer à notre tour dans le seul but de nous distraire. »
     
    Mais l’étrange roman de l’alchimiste pervers, qui réussit à fabriquer un être artificiel, ne suffit pas à distraire Axel Métaz de ses pensées et il eût été bien incapable de dire, en arrivant à Lausanne, qui était Robert Walton et dans quelle bizarre

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