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Sang Royal

Sang Royal

Titel: Sang Royal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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buste et tendit le grand parchemin à l’un des enfants d’honneur qui s’approcha pour le recevoir.
    Puis ce fut au tour du maire d’avancer, chargé des deux coupes très ornées que j’avais aperçues au Guildhall. Il s’agenouilla et, par de nouvelles paroles de plate soumission, supplia le roi d’accepter le présent de la ville. Il transpirait abondamment et, les mots se bousculant nerveusement dans sa bouche, je n’arrivais pas à saisir tout ce qu’il disait. Mon attention fléchit à nouveau, jusqu’à ce que Giles me chuchotât à l’oreille : « Vite ! C’est à nous ! » Je sentis une crampe à l’estomac en me levant, la tête toujours baissée, pour suivre Giles. N’était-il pas ridicule que j’en sois réduit à une telle veulerie, alors que j’avais eu jadis pour ami Thomas Cromwell et que j’avais su faire front à Richard Rich et au duc de Norfolk ? Mais la personne devant laquelle je me présentais à présent n’était pas un haut dignitaire ou un aristocrate, mais l’oint du Seigneur sur terre, le chef de Son Église, le gardien de l’âme de ses trois millions de sujets, être surhumain dans toute sa splendeur. Durant ces quelques instants, je croyais à tout cela.
    Nous nous arrêtâmes près de Tankerd. Au milieu de cette foule agenouillée, je me sentais affreusement vulnérable. Le roi était si près à présent que, même les yeux baissés, je pouvais apercevoir l’épaisse fourrure de son manteau bougeant légèrement dans le vent, les énormes rubis sertis d’or sur son pourpoint. Je notai aussi que son mollet gauche était plus volumineux que le droit et devinai le bandage croisé, souillé d’une tache jaune, sous le bas-de-chausse blanc. C’est alors qu’une bouffée de vent porta à mes narines une puanteur de tuyau bouché, la forte odeur rance du pus.
    Giles déclama de sa voix claire et puissante : « En tant que représentant des citoyens d’York, je supplie Votre Redoutée Majesté d’écouter les requêtes en justice du peuple.
    — Soit ! » répondit le roi. Giles se tourna vers moi ; la tête toujours baissée, je lui remis les placets. C’est alors que mon bonnet m’échappa et que la plume s’en détacha au moment où il heurtait le sol. Je n’osai pas le ramasser et le fixai, jurant intérieurement. Giles remit les deux liasses de requêtes aux enfants d’honneur, qui les placèrent dans les mains du roi – de délicates mains blanches dont chaque long doigt était orné d’une bague sertie d’une pierre précieuse. J’entendis un dignitaire s’avancer, à qui le roi donna les placets.
    Puis il éclata de rire. « Seigneur Dieu, monsieur ! lança-t-il à Giles de sa voix haut perchée. Vous êtes un beau vieillard. Les hommes du Nord sont-ils tous aussi grands que vous ? » Je levai un tout petit peu la tête, osant jeter un coup d’œil au visage de Wrenne mais pas à celui du roi. Très calme, Giles souriait au monarque. « Je ne suis pas aussi grand que Votre Majesté, répondit-il. Mais qui pourrait atteindre cette hauteur ? »
    Le roi partit à nouveau d’un franc rire, sonore et joyeux. « Oyez, oyez ! s’écria-t-il, j’ai dit que ce brave vieillard montrait combien le Nord produisait de beaux gaillards. Voyez l’autre avocat à ses côtés, celui qui a laissé tomber son bonnet ! Je sais que c’est un Sudiste, et regardez comment à côté le malheureux a l’air d’une araignée boursouflée et biscornue ! »
    Alors, tandis que les Yorkais qui m’entouraient éclataient d’un rire de courtisans, je levai la tête, ce que j’étais censé faire, maintenant que le roi avait parlé. Il était si grand que j’étais contraint de pencher la tête en arrière pour regarder son visage, surmonté d’un bonnet incrusté de nombreux joyaux. Je découvris une face rougeaude, de grosses bajoues, une frange de barbe rousse grisonnante, une petite bouche plissée sous un imposant nez aquilin. Le roi plantait sur moi ses yeux enfoncés qui rappelaient ceux de Radwinter : bleus, glacials, étincelants, cruels. Je compris qu’il m’avait repéré, connaissait mon identité, et savait que j’étais l’homme qui avait perdu les documents. Il esquissa un signe de tête à mon adresse, tordit sa bouche minuscule en un petit sourire, puis me tourna le dos et, s’appuyant lourdement sur sa canne, se dirigea vers son cheval d’un pas claudicant. Je vis alors que la reine Catherine me regardait. Potelée,

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