Serge Fiori : s'enlever du chemin
monde et il a tellement
de choses à dire ! Mais c’est plutôt à ses démons et à ses
angoisses qu’il cherche à échapper ; sa peur occupe facilement toute la place et tue l’espoir, la création, la vie.
Retour à Montréal
À l’automne, Marie-Claire et Serge doivent rentrer à
Montréal. Fiori n’a plus d’appartement et Marie-Claire a
quitté la maison qu’elle habitait avec Michel. Zachary Richard, une connaissance du couple, leur prête temporairement un appartement, un petit deux-pièces et demi aux
abords du mont Royal, endroit qui lui sert de pied-à-terre
à Montréal.
Avec le soutien de Serge, Marie-Claire diminue sa
consommation
de
cannabis ;
elle
avait
jusque-là
pris
l’habitude de fumer sur une base quotidienne. Un soir,
Serge lui lance : « Tu sais, Marie, tu n’as pas besoin de te geler pour créer. La création, ça se fait en dehors de la puff . »
Venant d’un créateur qu’elle admire et qui a accouché
d’œuvres musicales majeures en toute sobriété, le conseil
touche sa cible. Marie-Claire se débarrassera de cette pratique au cours des semaines suivantes.
Fiori commence aussi à mieux prendre soin de lui ; son
état de santé s’améliore. Il va courir chaque matin sur le
mont Royal, il mange, médite et survit, tant qu’il ne rencontre pas trop de monde. Dès qu’il rencontre une personne qu’il connaît ou qui le reconnaît, ses mécanismes
de défense et son désir de fuite ressurgissent. Force lui
est de constater que l’angoisse que suscite la vie publique
n’est pas en voie de s’améliorer ; il s’agit du nœud qui le
paralyse. Mais il ne consulte toujours pas, espérant que cet
état disparaîtra, comme les contrecoups de son bad trip passé se sont estompés. Il trouve néanmoins une forme de
soulagement dans la méditation. « Avec la méditation, tu
annules à la fois tes pensées et tes émotions, pour te retrouver dans la base de ton énergie vitale. Normalement,
que tu sois n’importe où, tu touches à l’essence même de
ce que tu es. Le reste, qui n’est pas l’essence, c’est de la
mécanique. » Avec toute l’intensité qui caractérise ses projets musicaux, il se livre avec passion à la méditation : il s’y
adonne trois ou quatre heures par jour, et cette introspection, cette plongée en son centre, lui fait voir et comprendre les grands courants spirituels, et décoder avec davantage de facilité le sens des paroles de sagesse de Bouddha,
de Jésus, de Gandhi, de Krishna. Il trouve enfin la paix. Le
kriya yoga qu’il pratique est constitué de trois techniques
de méditation, basées sur la respiration. « C’est tellement
efficace, c’est dommage que les gens ne connaissent pas
plus ça. Après quinze ou vingt minutes, tues ramené en ton
centre. » Les grands maîtres arrivent peut-être à un niveau
de conscience élevé, après des années de méditation, ce
qui les entraîne très loin, au centre de l’énergie vitale. S’ils
y explorent le sens de la vie et de la mort ou parcourent la
colonne vertébrale, pour le commun des mortels, c’est surtout la paix intérieure et le rééquilibrage qui constituent les
bienfaits de la méditation. Ce que Serge apprécie de cette
technique, entre autres choses, c’est qu’elle évacue toute
religion au profit d’une spiritualité universelle, commandée par personne d’autre que soi-même. Il étudie les enseignements de Yogananda ( Self-Realization Fellowship ),
lit sur Gandhi et les grands courants spirituels, se rend au
Centre de méditation Yogananda à Montréal, où les autres
adeptes le reconnaissent et l’incluent avec bonheur et sérénité dans leur cercle. Il consacre tout son temps et son
énergie à cette approche qui lui est nouvelle. Il a soif d’en
connaître davantage.
Voyage de méditation en Californie
L’année suivante, de mai à novembre, Libert Subirana
part étudier à Los Angeles. Il se prend une chambre chez
une amie de Marie-Claire qui vit là-bas. Serge et Marie-Claire voient dans ce voyage un prétexte pour aller eux-mêmes sur place afin de remonter à la source de leur passion commune pour le gourou Yogananda. Le siège social
de l’organisation, fondée par le yogi en 1924, se trouve à Los
Angeles, au sein d’une immense propriété appelée Mount
Washington, en raison de sa localisation géographique. Ils
s’y rendent en autobus, seul moyen de transport possible
avec
Weitere Kostenlose Bücher