Serge Fiori : s'enlever du chemin
Serge comme « la musique avec des cheveux ». Pour lui, le souffle musical de
Serge est un souffle classique : il est intemporel. Bien qu’il
voie Fiori comme un touche-à-tout en matière de musique, il apprécie le fait que le chanteur ne se plie pas aux
tendances de toutes sortes. Pour lui, Fiori est la « voix » du
Québec. De son côté, Serge éprouve la même admiration
pour Luc Picard, qu’il considère comme étant un grand comédien et un grand réalisateur. Aussi admire-t-il Isabelle,
qu’il estime aussi belle que talentueuse.
La rencontre, fortuite, a donc lieu un soir de 2005. Ce
soir-là, le couple est installé à sa table habituelle, lorsqu’Isabelle aperçoit Serge, attablé près d’eux. Isabelle s’adresse à
son compagnon en murmurant : « C’est-tu Serge Fiori ? »
« Oui, c’est Serge Fiori » « Il regarde ici, il regarde ici ! » Le
trio a l’air d’une bande d’écoliers timides qui tentent de
séduire. Serge se lève et s’approche de la table de Luc et
d’Isabelle. Il tend la main et se présente. Ça en restera là
pour ce premier soir. La fois suivante, ils rapprochent leurs
tables, mais restent chacun dans leur territoire. Il faudra
quatre ou cinq rencontres pour que le trio s’attable franchement ensemble et partage un repas. Leur admiration
réciproque évoquée, l’amitié naît de façon fulgurante.
Il faut quand même un certain temps à Luc Picard pour
séparer le Serge Fiori qu’il a en tête du Serge Fiori qui se
tient en face de lui. Mais lorsque la glace est brisée, l’intimité s’installe très vite entre les deux hommes. À compter de ce jour, ils se rencontrent souvent. Pendant presque
deux ans, ils se voient plusieurs fois par semaine. Ils font
même un voyage à New York ensemble. Le plus étonnant
pour Luc, c’est de découvrir le véritable Serge. Comme
beaucoup de Québécois, Fiori faisait figure d’icône dans
son imaginaire, mais Picard est maintenant à même de
comprendre que dans la vie, le musicien est comme tout
le monde : il déconne, aime rire et blaguer, et adore le hockey… Le Québécois moyen, quoi ! Isabelle aussi a été séduite par le côté burlesque de Fiori.
« Pour moi, la rencontre avec Serge fut un coup de foudre. Son intelligence, son extrême sensibilité, son humour,
tout ça, c’était spontané. Ça a été une belle, belle, belle
rencontre. Serge est capable d’une autodérision qui ne
ménage aucun de ses travers. Et je peux me moquer de lui
indéfiniment. Il embarque dans des affaires et des achats
tellement loufoques ! Une fois, il me dit qu’il venait d’acheter un exerciseur ! Écoute, je l’ai niaisé, j’avais du matériel à
monologues juste là ! Au début de notre amitié, il m’a donné des cours de guitare. Quand il m’enseignait, j’essayais
de comprendre ses leçons : ça avait l’air si simple pour lui,
ça me donnait l’impression que jouer de la guitare, pour
lui, c’était comme respirer. Il ne semblait pas comprendre
que pour quelqu’un qui n’a jamais joué, c’est une autre
paire de manches ! Je lui disais : “Hé, ho ? Là, ce que tu me
fais faire, c’est de la physiothérapie, c’est pas de la guitare !”
Pour lui, l’instrument est tellement intégré qu’il ne réalisait pas que les pièces qu’il me montrait étaient injouables
pour une novice. »
Le courant passe bien entre les trois, et Serge est tan
tôt avec Isabelle, tantôt avec Luc, tantôt avec les deux. Sur
plusieurs plans, Luc et lui se rejoignent vraiment. Artistes
dans l’âme, les deux hommes cherchent l’art dans l’énergie
qui passe à travers l’être. Luc tente de créer les meilleures
circonstances possibles pour que quelque chose de plus
grand que lui passe à travers lui. Sa méthode de création,
ses croyances à ce chapitre, sont très proches de celles de
Serge. Comme Fiori, Picard croit que ses plus grandes créations ne sont pas générées par lui, mais qu’elles sont rendues possibles lorsqu’il est visité par la grâce. « Serge n’a
pas pu faire ce qu’il a fait sans avoir été visité par la grâce.
Et il le fut très jeune. La majorité de nos discussions étaient
centrées sur la création, l’inspiration, l’art. » Les deux amis
s’accordent pour dire que la grâce est parfois avare de ses
visites, et que dans ces moments, il faut travailler encore
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