Serge Fiori : s'enlever du chemin

retrouve devant son
public, et comme sur scène, il y redécouvre la rétroaction   :
soit il publie des pensées et des idées qui suscitent de profondes discussions, soit il reconnaît humblement que ce
qu’il vient d’affirmer est nul. Il se remet aisément en question, réfléchit, se réajuste. Il ressent le même frisson, la
même intensité que lorsqu’il montait autrefois sur scène.
Le phénomène Facebook est en train de le transformer   :
derrière son clavier d’ordinateur, il ne rencontre aucune
limite et a l’impression de publier un livre en direct.
    Sans trop s’en rendre compte, Serge Fiori recommence
à créer. Il aime ce qu’il découvre et la vie plus sobre qu’il
mène désormais. C’est aussi sur Facebook qu’il fait la rencontre d’Hélène, une belle femme de quarante-trois ans
qui habite au Lac-Saint-Jean. Ancienne danseuse et chorégraphe, Hélène se passionne pour la musique et elle ne
cache pas être fan d’Harmonium. D’ailleurs, dans sa famille, tous les membres sont de fervents admirateurs du
groupe. Dès l’âge de cinq ans, elle connaissait par cœur
toutes les chansons des deux premiers albums du groupe   !
Quand l’heptade paraît, la mère de la jeune fille n’en peut
déjà plus de ce Serge Fiori   : il est tellement présent qu’elle
a l’impression qu’il vit sous leur toit   ! La musique d’Harmonium y joue sans discontinuer toute la journée, car il y
a toujours quelqu’un qui l’écoute dans la maison   : Hélène,
sa sœur ou l’un de ses deux frères. C’est presque une religion   ! Malheureusement pour Hélène, elle est trop jeune
pour assister au show de l’heptade qu’Harmonium donne
à Alma en 1977   ; seuls ses frères et sa sœur obtiennent la
permission d’aller voir ce «   show de drogués   », comme le
qualifie leur mère.
Première rencontre avec Hélène
    Peu habituée aux réseaux sociaux, Hélène est initiée par
sa fille à la communauté Facebook. Son objectif premier
est de retracer ses cousines pour l’organisation d’une grande fête familiale. Un jour, elle reçoit une demande d’amitié de quelqu’un qu’elle ne connaît pas. En consultant la
fiche de cette personne, Hélène se rend compte que la
demanderesse est aussi «   amie   » avec Serge Fiori, son idole
de jeunesse. Le déclic se fait aussitôt   : puisque le musicien
d’Harmonium possède un compte Facebook, elle souhaite
à son tour prendre contact avec lui   ; elle désire lui faire savoir que les plus belles chorégraphies qu’elle a créées l’ont
toutes été sur sa musique. En effet, lorsqu’elle exerçait la
profession de chorégraphe, Hélène se faisait un plaisir de
créer une chorégraphie par année sur la musique de Fiori.
Elle en a ainsi préparé sur les musiques de La vague , de Folle de nuit , d’ Histoire sans paroles , etc.
    Quand Serge aperçoit le beau visage de la femme qui lui
envoie une demande d’amitié, il n’hésite pas une seconde   :
«   J’accepte gaiement sa demande   !   »
    Un soir, prenant les devants, Serge offre à Hélène de tenir une conversation avec lui, par «   clavardage   ». Hélène,
qui n’a jamais eu de conversation en direct sur la toile,
demande à sa fille Frédérique comment procéder. Après
avoir reçu une brève formation sur le sujet, Hélène s’exclame   : «   Est-ce que je comprends bien que Serge Fiori est
en ligne et qu’il me parle live   ?   » Devant le sourire complice
de sa fille, elle réalise qu’elle a bien compris. Lorsque Hélène accepte de discuter avec Fiori, Serge met un terme à
toutes les autres conversations en cours. Le dialogue commence   : il est vingt et une heures. Au début, leurs échanges sont polis, malhabiles et lents. Hélène, femme timide,
est impressionnée parce qu’elle parle à son idole, mais la
conversation s’étire tout de même jusqu’à quatre heures
du matin et elle nage en plein bonheur. Ils discutent de
tout   : de musique, de danse, de politique, d’autant plus
que la belle Hélène porte le patronyme de l’idole politique
de Serge   : elle s’appelle Lévesque   ! Il pense aussitôt   : Fiori Lévesque… Quel heureux mariage   !
    Le duo se fixe à nouveau rendez-vous pour le lendemain. Les deux écrivent laborieusement, sans méthode
de doigté, une touche à la fois. Les discussions sont lentes,
mais si stimulantes qu’elles deviennent hebdomadaires   ; si