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Serge Fiori : s'enlever du chemin

Serge Fiori : s'enlever du chemin

Titel: Serge Fiori : s'enlever du chemin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Thériault
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terminé les paroles. Serge sait qu’il
court un risque, mais c’est plus fort que lui. Il ne peut plus,
désormais, se résigner à ne chanter que Dixie ou Un musicien parmi tant d’autres .

    Après mûres réflexions, Serge Fiori décide qu’il faut intégrer un batteur pour ce troisième album. Il entre en contact
avec Denis Farmer, puisque ce dernier a déjà manifesté
son intérêt à s’intégrer au groupe et l’invite à Saint-Césaire.
Farmer, habitué de jouer pour le Ville-Émard Blues Band,
n’a aucune idée de ce qui l’attend. Plutôt type «   sex, drugs
and rock and roll   », il ignore la nature profonde d’Harmonium. Fiori, quant à lui, voit dans ce colosse l’une des marionnettes du Muppet Show, Animal, et il le baptise immédiatement de ce sobriquet.
    Lorsque Serge Fiori explique à Denis le concept de l’heptade, la scène est aussi loufoque que surréaliste   : Fiori
détaille chaque chakra, sous le regard ahuri de Denis, que
la spiritualité ou l’ésotérisme n’ont pas encore intéressé.
Serge, se retenant de pouffer de rire, poursuit, non sans
humour, avec les niveaux de conscience, sachant que son
interlocuteur ne suit plus depuis longtemps. Afin de mettre
un terme à cette rencontre burlesque à laquelle Farmer n’a
rien compris, Serge lui fait visiter le salon de la maison.
    —
Pourquoi tu me montres le salon   ?
    —
C’est là que tu vas mettre ton drum-booth , va falloir faire une boîte avec une vitre.
    —
Pourquoi je mettrais mon drum là   ?
    —
Parce que c’est ici qu’on fait l’album.
    —
Quoi   ? T’es en train de me dire que je vais jouer dans ton salon   ?
    —
Je suis sérieux, Denis. On commence. Va chercher ton
    drum, puis installe-toi.
    —
Hé, toé pis ton ostie d’ heptade … t’es malade ou quoi   ?
    —
Fais-moi confiance, Denis   !
    Denis regarde Serge en silence. Alors qu’il observe le
regard de son vis-à-vis, Fiori voit que celui-ci embarque,
qu’il est partant, quoi qu’en laisse paraître son attitude.
    —
O.K., je fais quoi, là   ? demande Denis qui capitule.
    —
Va te coucher dans la chambre d’à côté   ; demain, on va commencer à aller chercher le matériel pour s’installer.
    Il faut mentionner que Fiori, sous le joug de son intuition, optait pour l’enregistrement de l’album à la maison,
même s’il ne parvenait pas à expliquer clairement cette
façon de procéder   ; mais cette courte conversation avec
Farmer vient de lui faire voir clair   : le projet se fera comme ça, dans la maison de Saint-Césaire. Dès le lendemain,
ils vident le salon de tous les meubles et commencent à
construire le drum booth pour la batterie.
    Entre-temps, Serge a aussi recruté Robert Stanley, un talentueux guitariste qu’il baptisera Pixie . Farmer déborde
d’énergie, il a du mordant, il motive le band . Robert, lui,
est un maniaque des détails   : ce sont là deux bons apports
pour Harmonium.
    Serge Fiori a compris que la façon dont les deux premiers albums ont été enregistrés, en studio extérieur, ne
lui convenait plus du tout. L’urgence d’enregistrer, dans un
très court délai imparti qui ne tient pas compte des divers
aléas, des élans créatifs, des expériences à faire, est un obstacle que cette fois, il ne souhaite pas avoir à surmonter.
Enregistrer neuf chansons en six jours, comme ils l’ont fait
pour le premier album, donne peut-être un son presque live, mais n’offre pas la possibilité d’avoir une deuxième
chance parce que le temps file. Il ne désire plus travailler
dans l’urgence, celle d’avoir à exécuter la bonne prise du
premier coup, celle de maximiser les nuits, comme ils ont
dû le faire pour le deuxième album, entre les spectacles
et le quotidien. À son avis, l’aspect ludique de l’enregistrement disparaît au profit de la pression liée à l’impératif
de produire   ; il devient alors impossible d’explorer le son
comme il a toujours souhaité le faire.
    Serge Fiori juge que les studios sont aseptisés. «   Toute la
technologie et l’isolation, tout le mode dans lequel les studios se retrouvent pour essayer d’enregistrer   : une espèce
de cabine isolée et très clinique, un hôpital du son. C’est
antison, antimusique. À moins de se retrouver toute la gang au milieu du studio à jouer en rond, ça n’a pas de sens.
Pour partir de mon écriture, de mon obsession de ne pas
répéter pour répéter,

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