Services Spéciaux - Algérie 1955-1957
pourtant peu avare de détails. Les affaires Alleg et Audin eurent un retentissement considérable en métropole, grâce à l’interprétation qu’en donnèrent le parti communiste et la presse qui soutenait le FLN.
J’arrivais maintenant à six mois de détachement au-delà desquels ma position m’amènerait à une affectation définitive que je ne souhaitais pas. J’estimais que ma mission avait été entièrement remplie : la grève avait été brisée, le fichier avait été récupéré, La Voix du soldat ne se ferait plus entendre. Bien plus, Larbi Ben M’Hidi et Ali Boumendjel avaient été liquidés et j’avais tout mis en place pour que les autres subissent bientôt le même sort.
Godard avait obtenu, avec l’aide de Massu, le commandement du secteur Alger-Sahel. De sorte qu’il pouvait maintenant avoir un œil sur ce que nous faisions. Cet élément nouveau m’incita à quitter au plus vite mes fonctions et à me trouver un successeur. J’en avais repéré un en la personne de Jacques de La Bourdonnaye-Monluc, capitaine à l’unité de marche du 11 e Choc qui stationnait dans les environs d’Alger. C’était un camarade d’Indochine qui avait appartenu au 1 er RCP. Il se trouvait dans une situation épineuse car, ayant été mis par Decorse 83 en tête de la liste dite d’osmose 84 de son unité, il devait prochainement s’en aller, c’est-à-dire quitter à la fois les parachutistes et Alger pour rejoindre le 44 e régiment d’infanterie à Tebessa, sur la frontière tunisienne. L’avantage d’une affectation auprès du général Massu serait de lui permettre de rester sur place, ce à quoi il tenait absolument pour des raisons personnelles, et de garder son statut de parachutiste, qui lui était encore plus cher.
Au début, il ne se montra pas très enthousiaste. Le l er RCP arriva à Alger pour effectuer sa permanence : j’invitai alors La Bourdonnaye à la cantine de l’unité avec Prosper et Monette Mayer, et nous sûmes trouver des arguments pour le convaincre.
Je ne pouvais pas m’entendre avec Godard, il m’était impossible d’envisager de poursuivre cette mission. Du reste, Godard s’inquiétait de nous voir harceler les communistes et chercher à développer des actions contre des Français. Il parvint d’ailleurs à se débarrasser de Trinquier qui reçut l’ordre de rejoindre sa nouvelle affectation dans les quarante-huit heures.
Alors, je lui expédiai La Bourdonnaye-Monluc. Les deux hommes sympathisèrent et, une semaine plus tard, l’affaire était conclue. Il reprenait mon équipe.
Je pus enfin dire à Massu que j’avais trouvé mon remplaçant et que pour moi la bataille d’Alger était finie.
Le Déserteur
Le 1 er RCP s’était installé à Maison-Carrée et j’avais retrouvé les fonctions de chef d’état-major que j’occupais au début de l’année.
J’étais soulagé. La solitude que j’avais connue pendant ces six mois n’était plus supportable. Maintenant je partais pour faire la guerre à ciel ouvert et pour chasser le FLN dans l’Atlas blidéen.
Babaye avait voulu me suivre : je ne pouvais pas lui refuser ça. Au premier engagement, je lui ai fait donner un fusil et je lui ai dit de se tenir tranquille derrière moi. Bientôt, j’ai entendu une détonation dans mon dos et une balle m’a sifflé aux oreilles.
Je me suis retourné. Babaye était hilare. Il venait de tirer par-dessus mon épaule et avait abattu un ennemi que je n’avais pas vu.
Pendant ce temps, les derniers leaders du FLN d ’ Alger et les chefs du PCA tombaient les uns après les autres.
Faulques avait eu la bonne idée d’afficher des noms sur chacune des cellules du sous-sol de la villa Sésini. Sur la porte d’une cellule vide, il avait inscrit le nom d’André Moine, ce qui incita à la confidence des prisonniers qui avaient conclu à sa capture et amena finalement, en juillet 1957, à l’arrestation effective du leader communiste.
Le plan d’approche de Yacef Saadi que j’avais patiemment mis au point grâce à mon agent de liaison infiltré au FLN fut mis à exécution par Faulques, La Bourdonnaye et Godard en septembre. Le REP de Jeanpierre put cerner la villa de Yacef qui se défendit en lançant une grenade. Jeanpierre fut blessé mais Yacef fut capturé par les légionnaires. Il parla spontanément, ce qui lui sauva la vie. Il révéla notamment l’adresse d’Ali la Pointe, qui se cachait dans une maison fortifiée de la Casbah. La
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