Shogun
en prie. Une
humble faveur faite à un invité d’honneur et futur vassal reconnaissant. »
Yabu fronça les sourcils et répondit : « Yabu-san dit que le village
n’a aucune importance, que les habitants ont besoin d’être sur des charbons
ardents si l’on veut obtenir quelque chose d’eux, que vous n’avez pas à vous
inquiéter. Quant au bateau, il est sous la protection de sire Toranaga. Il est
sûr que vous le récupérerez très bientôt. Il me demande de présenter votre
requête à Sire Toranaga dès mon arrivée à Yedo. Je le ferai, Anjin-san.
— Présentez mes excuses à Sire Yabu, mais
je dois lui demander d’annuler le décret, cette nuit.
— Il refuse, Anjin-san. Ça ne se fait
pas.
— Je comprends. Redemandez-le-lui. C’est
très important pour moi… une pétition.
— Je vous demande d’être patient. Ne vous
inquiétez pas pour les habitants. »
Blackthorne acquiesça, puis se décida.
« Merci, je comprends. Ayez la gentillesse de remercier Yabu-san et
dites-lui que je ne puis vivre avec cette honte. »
Mariko pâlit. « Quoi ?
— Je ne puis vivre avec ce village et
cette honte sur la conscience. Je suis déshonoré. Je ne peux le supporter.
C’est contre mes croyances chrétiennes. Je dois me suicider immédiatement.
— Vous suicider ?
— Oui. C’est ce que j’ai décidé. »
Yabu l’interrompit. « Nanja. Mariko-san ? »
Elle traduisit hors d’haleine, ce que
Blackthorne venait de dire. Yabu la questionna, puis dit : « Si vous
n’aviez pas aussi vivement réagi, j’aurais cru que c’était une blague,
Mariko-san. Pourquoi vous sentez-vous aussi concernée ? Qui vous fait
croire qu’il en a vraiment l’intention ?
— Je ne sais pas, Sire. Il semble… Je ne
sais pas… » Sa voix se fit traînante.
« Omi-san ?
— Le suicide est contraire aux croyances
chrétiennes. Ils ne se suicident pas, comme le ferait un samouraï.
— Vous êtes chrétienne, Mariko-san.
Est-ce vrai ?
— Oui, Sire. Se suicider est un péché
mortel. C’est contraire à la parole divine.
— Igurashi-san ? Qu’en
pensez-vous ?
— C’est du bluff. Il n’est pas chrétien.
Souvenez-vous du premier jour, Sire. Souvenez-vous de ce qu’il a fait au
prêtre. » Yabu sourit. Il se souvenait de ce jour-là, de la nuit qui avait
suivi. « Oui, je suis d’accord. Il n’est pas chrétien, Mariko-san.
— Je vous prie de m’excuser, mais je ne
comprends pas, Sire. Que s’est-il passé avec le prêtre ? »
Yabu lui raconta ce qui s’était passé le
premier jour entre Blackthorne et le père Sebastio.
« Il a profané une croix ? dit-elle,
visiblement choquée.
— Et il a jeté les morceaux dans la
poussière, ajouta Igurashi. Ce n’est que de la comédie, Sire. »
Yabu but un peu de saké. « Dites-lui
ceci : le suicide n’est pas une coutume barbare. C’est contraire à la
parole divine. Comment peut-il donc se suicider ? »
Mariko traduisit. Yabu observa Blackthorne
attentivement.
« L’Anjin-san vous prie de l’excuser,
mais il dit que coutumes ou pas, la honte qu’il ressent à cause de ce décret est
trop lourde à supporter. Il dit que… qu’il est au Japon, qu’il est hatamoto et qu’il a le droit de vivre selon nos lois. » Ses mains
tremblaient. « Voilà ce qu’il a dit, Yabu-san. Le droit de vivre selon nos
coutumes, notre loi.
— Les barbares n’ont aucun droit.
— Sire Toranaga l’a nommé hatamoto. Cela lui en donne le droit, neh ?
— Comment compte-t-il se
suicider ? Demandez-le-lui. Blackthorne sortit la courte épée de sa
ceinture et la déposa doucement sur le tatami, pointe tournée vers lui.
Yabu fronça les sourcils. Ses battements de
cœur ralentirent. Que me conseillez-vous, Omi-san ?
— Vous avez dit au village, Sire : “Si
l’Anjin-san n’apprend pas de manière satisfaisante .
” Je vous conseille de faire une toute petite concession. Dites-lui que, quoi
qu’il ait appris en cinq mois, vous considérerez ses connaissances “satisfaisantes”.
Il devra en échange jurer sur son Dieu de ne jamais révéler cette concession au
village.
— Mais il n’est pas chrétien. Comment ce
serment pourrait-il le lier ?
— Je crois qu’il l’est, Sire. Il est
contre les Robes noires, c’est ce qui importe. Je crois que prêter serment sur
son Dieu le lierait. Il devrait également jurer, au nom de ce Dieu, d’apprendre
de tout son cœur et de vous être
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