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Si je meurs au combat

Si je meurs au combat

Titel: Si je meurs au combat Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Tim OBrien
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peau. Vous vous engagez, et moi, je peux vous dégoter un boulot à Chu Lai. J’ai des boulots de mécanos, d’employés de bureau, bref, un peu tout ce que vous voulez. Alors, allez-y, prenez-le, ce gentil petit job à l’arrière. On vous forme sur le tas. On vous apprend un boulot. Vous dormez dans un lit. Bordel, vous pouvez bien vous marrer, allez-y, vous, allez roupiller dans cette putain de mousson pendant deux mois d’affilée, allez-y, les gars, essayez-moi ça, et peut-être bien que vous allez plus vous marrer. Bon. Vous filez un peu de votre temps à l’Oncle Sam. Pas la fin du monde. En échange, vous sauvez votre peau. Alors voilà, j’ai mon bureau, là, à l’intérieur. Si vous entrez pour signer les papiers – il y en a pour dix minutes –, je vous fous dans le premier camion pour Chu Lai, sans déconner. Qui est-ce qui est partant ?
    Personne ne bouge, alors il hausse les épaules avant de filer au mess des officiers.
    À LZ Gator, on avait l’air d’être en sécurité. Les jours où le ciel était dégagé, on voyait des morceaux d’océan. Au pied de la colline, il y avait un petit village, Nuoc Man, rempli d’habitants tout à fait plaisants, souriants, un endroit où l’on pouvait donner notre linge et où il y avait un bordel. Mis à part les nuits où l’on était de garde, tout le monde se baladait sur la base avec les armes déchargées. Il ne se passait rien, il faisait très chaud, mais il y avait quand même des films, des spectacles de strip-tease et des hangars remplis de bières.
    On m’a affecté à la compagnie Alpha. Le responsable du courrier m’a adressé un grand sourire :
    — Oh, putain, t’as pas de bol ! Il te reste combien de jours à tirer au Viêtnam ? 358, c’est ça ? 357 ? Merde alors. Ben, je te plains, mon gars. Moi, il me reste vingt-trois jours à tirer, vingt-trois jours, alors désolé, mais moi, je dégage ! Je dégage ! Je dégage tellement qu’ils feraient bien de me trouver un remplaçant, là, sur-le-champ, pour la distribution du courrier. Comment tu t’appelles, toi ?
    Le responsable du courrier m’a serré la main.
    — Bon, ben au moins, toi, t’as te cul verni de nouilles. Les Irlandais, ils se font jamais dégommer, pas dans la compagnie Alpha. C’est les Blacks et les basanés de Chicanos qui se font dégommer mais vous, les sales Irlandais, vous vous en sortez à tous les coups. Bordel de merde, moi, je suis aussi noir que le cirage du colonel, alors autant dire que je serai pas en sécurité tant que le bon petit oiseau de la liberté m’aura pas fait atterrir à Seattle. Vingt-trois jours, mon pauvre gars.
    Il m’a accompagné chez le sergent-chef. Le sergent-chef m’a expliqué qu’il fallait oublier toutes ces conneries selon lesquelles on allait filer directo sur le terrain. Il s’est étiré sur sa chaise, devant un ventilo ; il ne portait qu’un slip (teint en kaki, apparemment pour pas se faire repérer par un Viêt-cong super-sournois), et il a levé une bière dans ma direction.
    — Merde, O’Brien, relax. Alpha, c’est une compagnie qui rate jamais son coup, alors pas la peine de te faire de mouron. Fais pas le con, et je te garde ici, à Gator jusqu’à ce que la compagnie déboule pour faire une pause. Ça rimerait à rien de t’envoyer là-bas maintenant, parce qu’ils rentrent à Gator après-demain.
    Il a passé les doigts de pied autour du fil du ventilo afin de le rapprocher.
    — Va voir un film, ce soir, va prendre une bière ou je sais pas quoi.
    Il m’a affecté à la troisième section et il a hurlé au sergent de la réserve de me filer mon barda. Le sergent de la réserve lui a gueulé d’aller se faire foutre, ils se sont marrés, et puis il m’a filé fusil, munitions, casque, sacs de camouflage, poncho, toile cirée, sac à dos, fringues propres, cartouche de clopes, paquet de bonbons. Après, il a fait nuit, alors j’ai maté Elvira Madigan et son copain faire toutes sortes de galipettes, avoir faim, devenir désespérés et, comme des nazes – ils étaient tellement nazes que leur pénurie de bon sens pouvait au mieux faire pitié –, mettre fin à leurs jours. Le type, l’amant d’Elvira, c’était un déserteur. On avait l’impression qu’il avait déserté à cause de ses grandes idées sur l’amour et sur les papillons, sur les jours d’insouciance et sur la vie simple, et quand il a compris qu’il ne pourrait rien avoir de tout cela, même pas

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