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Sir Nigel

Sir Nigel

Titel: Sir Nigel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arthur Conan Doyle
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mon
bénéfice d’un mois. Que voilà une mauvaise journée pour moi. Je
souhaiterais ne vous avoir jamais vu.
    Geignant et se lamentant, il compta les pièces
d’or sur le comptoir, et Nigel, osant à peine croire en sa bonne
fortune, les jeta dans son sac de cuir.
    Un moment plus tard, le visage rougissant, il
se retrouvait dans la rue où il exprimait ses remerciements à
Aylward.
    – Hélas, mon bon seigneur, le bonheur
nous a floués, répondit l’archer. Nous aurions pu en obtenir vingt
de plus si nous avions tenu bon.
    – Comment le sais-tu, mon bon
Aylward ?
    – À ses yeux. Je ne sais point lire
lorsqu’il s’agit d’un parchemin, d’un livre, d’une devise ou d’un
blason, mais je sais lire dans les yeux d’un homme et je n’ai
jamais douté un seul instant qu’il donnerait ce qu’il a donné.
    Les deux voyageurs dînèrent au refuge des
moines, Nigel à la table haute, Aylward à celle du commun. Puis ils
se mirent en route dans la grand-rue. Nigel acheta du taffetas pour
en faire des tentures, du vin, des confitures, des fruits, du linge
de table en damas et maints autres articles de nécessité. Il
s’arrêta enfin devant la boutique de l’armurier dans la cour du
château et, comme un enfant devant un plat de bonbons, il admira
les belles armures, le plastron gravé, les heaumes empanachés et
les gorgières habilement assemblées.
    – Alors, squire Loring, fit l’armurier
Wat en détournant le regard de sa forge à soufflet où il chauffait
une lame d’épée, que puis-je vous vendre ce matin ? Je vous
jure sur Tubal-Caïn, le père de tous les travailleurs du métal, que
vous pourriez aller d’un bout à l’autre de Cheapside sans trouver
plus belle armure que celle qui pend à ce crochet là-bas.
    – Et quel en est le prix,
armurier ?
    – Pour n’importe qui d’autre, ce serait
deux cent cinquante nobles à la rose. Mais pour vous, ce ne sera
que deux cents.
    – Et pourquoi moins cher pour
moi ?
    – Parce que c’est moi qui ai équipé votre
père pour la guerre et c’est une armure plus belle encore qui est
sortie de mes mains. Je gage qu’elle a dû émousser bien des lames
avant qu’il ne la mette de côté. Nous travaillions en mailles à
cette époque, et j’avais aussi vite fait une cotte finement tissée
qu’une plate d’armure. Mais les jeunes seigneurs ont leur mode
comme les belles dames de la cour. Ce sont les plates maintenant,
bien que le prix en soit le triple.
    – Et vous dites que la maille est aussi
bonne ?
    – J’en suis sûr.
    – Alors, oyez, armurier. Je ne puis me
permettre en ce moment l’achat d’une armure à plates, mais j’ai
cependant grand besoin d’un harnachement d’acier en vue d’une
petite action que je me suis mis en tête de faire. J’ai encore à
Tilford cette cotte de mailles dont vous venez de parler et qui fut
la première que mon père porta à la guerre. Ne pourriez-vous
l’arranger de façon qu’elle protégeât aussi mes membres ?
    L’armurier regarda le petit visage de Nigel
tourné vers lui et il éclata de rire.
    – Vous vous gaussez, squire Loring. Cet
équipement a été fait pour un homme qui se trouvait bien au-dessus
de la taille normale.
    – Eh non, je ne me gausse point. Qu’elle
me protège seulement dans une joute à la lance, et elle aura
répondu à ce que j’attends d’elle.
    L’armurier se pencha de nouveau sur son
enclume et se mit à réfléchir sous le regard anxieux de Nigel.
    – C’est avec plaisir que je vous
prêterais une armure à plates pour cette aventure, squire Nigel,
mais si vous deviez être vaincu, votre armure serait le prix du
vainqueur. Je suis un pauvre homme avec beaucoup d’enfants et je ne
puis risquer pareille perte. Mais pour en revenir à cette armure de
mailles, est-elle vraiment en bon état ?
    – En parfait état, sauf l’encolure qui
est éraillée.
    – Raccourcir les manches serait aisé. Il
suffit d’en couper un morceau et de renouer les maillons, mais
quant à reprendre le corps… voilà qui est au-dessus de mon art
d’armurier.
    – C’était mon dernier espoir. Ah, bon
armurier, si vraiment vous avez servi et aimé mon vaillant père, je
vous prie au nom de sa mémoire de me venir en aide maintenant.
    L’armurier laissa tomber son lourd marteau sur
le sol.
    – Non seulement j’aimais votre père,
squire Loring, mais je vous ai vu, à demi armé comme vous l’étiez,
monter contre les meilleurs ici au château. À

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