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Sir Nigel

Sir Nigel

Titel: Sir Nigel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arthur Conan Doyle
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rang de chevalier. Son visage
imberbe était empreint d’une gravité, d’une majesté d’expression
qui prouvaient que, malgré son jeune âge, il avait eu déjà à gérer
des affaires sérieuses, que les pensées qui l’animaient étaient
celles d’un homme d’État et d’un guerrier. Ce grand jour où, à
peine adolescent, il avait conduit l’avant-garde de l’armée qui
avait écrasé la puissance française à Crécy, avait laissé une
profonde empreinte sur ses traits ; mais si graves qu’ils
fussent, ils n’étaient pas encore marqués de cette fierté qui,
après quelques années, devait faire du « Prince Noir » un
synonyme de terreur dans les marches de France. La première ombre
de la cruelle maladie qui allait lui enlever la vie n’avait pas
encore touché son corps, et il chevauchait, léger et débonnaire, en
cette journée de printemps dans la bruyère de Crooksbury.
    À la gauche du roi, et aussi près que pouvait
le permettre une grande intimité, s’avançait un homme du même âge
que son monarque, le visage large, le menton proéminent et le nez
plat, ce qui est souvent l’indice extérieur d’une nature
querelleuse. Il avait le teint rougeaud, de grands yeux bleus
quelque peu exorbités, et une apparence sanguine et coléreuse. Il
était court mais massif et à l’évidence doué d’une grande force. Il
avait la voix douce et zézayante, des manières courtoises.
Contrairement au roi et au prince, il était revêtu d’une armure
légère ; il portait un glaive court au côté et une masse
d’armes suspendue au pommeau de sa selle, car il faisait office de
commandant de la garde du roi. Une douzaine d’autres chevaliers en
armures suivaient, formant escorte. Édouard n’aurait pu avoir plus
vaillants soldats à ses côtés si, comme cela était toujours
possible en cette période d’anarchie, un danger quelconque devait
le menacer, car son compagnon n’était autre que le fameux chevalier
du Hainaut, naturalisé anglais, Sir Walter Manny, qui portait une
haute réputation de valeur chevaleresque et de vaillante témérité,
tout comme Chandos lui-même.
    Derrière les chevaliers, à qui il était
interdit de s’écarter et qui devaient toujours suivre le roi,
venait un groupe de vingt à trente hobereaux ou archers montés,
mêlés à quelques écuyers non armés mais menant des chevaux de
réserve qui portaient la partie la plus pesante des équipements des
chevaliers. Suivaient alors, en désordre, fauconniers, messagers,
servants et veneurs, tenant en laisse des chiens courants ;
tout cela complétait le long train coloré qui s’élevait et
redescendait en suivant les ondulations de la grande plaine.
    Le roi Édouard avait l’esprit préoccupé par de
nombreux problèmes importants. À ce moment, la paix régnait avec la
France, mais c’était plutôt un armistice rompu de temps à autre par
de menus faits d’armes, raids ou embuscades, de part et d’autre, et
il était clair que le conflit ne tarderait pas à reprendre
ouvertement. Il fallait donc lever de l’argent, et ce n’était point
chose aisée depuis que les Communes avaient voté le charnage et le
champart. De plus, la peste noire avait ruiné le pays ; les
terres arables étaient transformées en pâtures ; les
laboureurs, se riant des lois, refusaient de travailler à moins de
quatre pence par jour ; tout n’était que chaos. Ajoutez à cela
que les Écossais s’agitaient à la frontière ; il y avait aussi
l’éternel conflit en Irlande qui n’était qu’à demi conquise ;
enfin ses alliés de Flandre et de Brabant réclamaient à grands cris
leurs arriérés de subsides.
    C’en était bien assez pour accabler de soucis
même un monarque victorieux. Mais Édouard les avait jetés au vent
et se sentait le cœur aussi léger qu’un jeune garçon en vacances.
Il n’avait pas une pensée pour les réclamations des banquiers
florentins ni pour les conditions vexantes des tatillons de
Westminster. Il se trouvait à la campagne avec ses faucons, il ne
fallait donc ne songer et ne parler que de cela. Les rabatteurs
battaient la bruyère et les buissons et criaient lorsque des bêtes
s’envolaient.
    – Une pie ! Une pie !
    – Que non, que non ! Ce n’est point
digne de vos serres, ma petite reine aux yeux bruns ! disait
le roi en levant la tête vers le grand oiseau qui sautait d’une
épaule à l’autre, attendant le coup de sifflet qui lui permettrait
de prendre son envol.

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