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Souvenir d'un officier de la grande armée

Souvenir d'un officier de la grande armée

Titel: Souvenir d'un officier de la grande armée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Baptiste Auguste Barrès
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caserne et installé sa troupe, Barrès obtint bientôt un congé pour aller à Charmes. Mais son séjour se trouva écourté par une lettre de rappel du colonel, qui croyait à une prochaine déclaration de guerre. Ce qui survint, c’est un épisode plus humble, caractéristique de l’esprit alsacien.

DIFFICULTÉS SCOLAIRES EN ALSACE
     
    Le 9 mars 1831, je reçus l’ordre du général Fehrmann de me rendre, avec tout mon bataillon, au village d’Ober-Belschdorff, distant de quatre lieues, pour concourir à la répression d’une résistance aux décisions de l’administration supérieure. Cette quasi-insurrection avait pour cause la nomination d’un maître d’école, que les habitants ne voulaient pas. C’était en vain qu’on leur disait que celui qu’ils préféraient était un ignorant et avait échoué à tous les concours. Ils y tenaient, parce que c’était le gendre du garde forestier, et que celui-ci les avait prévenu que, s’ils en prenaient un autre, il leur ferait des rapports toutes les fois qu’ils iraient prendre du bois dans la belle forêt de Haguenau. La rébellion était manifeste : la gendarmerie avait été chassée plusieurs fois du village, lorsqu’elle voulait prendre possession de la maison d’école ; des individus avaient établi des barricades, et, armés de fusils, s’étaient retranchés dans l’école. On temporisa, dans l’espérance que la réflexion et la lassitude les rendraient plus raisonnables. Cette longanimité les enhardit. La gendarmerie fut repoussée une troisième fois, et le sous-préfet de Wissembourg bafoué. Dans cet état de chose, la force devait intervenir pour faire respecter la loi.
    À mon arrivée, le 10 mars, je trouvai les barricades évacuées, mais la maison d’école toujours occupée. Après avoir pris quelques dispositions et sommé les révoltés de se retirer, j’envoyai contre eux ma compagnie de voltigeurs. À son approche, ils se sauvèrent par la porte de derrière, qu’on n’avait pas fait garder exprès, et gagnèrent à toutes jambes la forêt. Immédiatement, le maître d’école nommé par l’administration fut installé en présence de M. Matter, inspecteur d’Académie, du sous-préfet, du juge de paix de Soultz-sous-Forêt, du maire et de tous les officiers. Tous les enfants avaient été mandés et contraints de venir pour assister à cette cérémonie qui aurait semblé ridicule dans toute autre circonstance, mais qui fut imposante et pénible en même temps, tous ces malheureux enfants se figurant qu’on allait les égorger sans pitié. Ils poussaient des cris à effrayer l’auditoire. Après les discours prononcés, des conseils donnés et des exhortations faites aux parents, les enfants furent renvoyés. La commune ayant repris sa tranquillité ordinaire, et les enfants ne manifestant plus aucune crainte, je rentrai dans ma garnison le 13, en laissant toutefois deux compagnies pour maintenir les esprits dans cette salutaire disposition.
    Ces deux compagnies rentrèrent, quatorze jours après, lorsque la gendarmerie eût à peu près arrêté les principaux mutins. Cette prudente expédition, qui ne fit couler que des larmes d’enfants, eut un très bon résultat, en ce qu’elle apprit aux populations que le pouvoir était assez fort pour faire rentrer dans le devoir ceux qui s’en écartaient. Depuis 1830, les communes étaient très agitées, et les habitants disposés à mettre à profit l’espèce de pouvoir que la révolution de Juillet leur avait donné. Ils dévastaient en plein jour les forêts de l’État, chassaient les gardes forestiers, menaçaient les maires et apportaient sur les marchés le produit de leur vol, sans rougir de leurs actions. Je fus souvent obligé, pendant l’hiver, d’envoyer des compagnies en garnison dans les villages, sur le versant oriental des Vosges, pour faire cesser ce scandaleux brigandage.

L’ALSACE ACCLAME LE ROI-CITOYEN
     
    Depuis plusieurs jours, j’étais prévenu officiellement de la prochaine arrivée du roi en Alsace, et mon départ pour Strasbourg, pour me trouver, avec tout le régiment, à son entrée dans la capitale de la province et aux revues qui suivraient. Le but politique de ce voyage était de faire connaître, aux populations de l’Est et à l’armée, le monarque que la France de Juillet s’était donnée. Il était important de donner au roi une bonne opinion du régiment, et à l’Allemagne qui nous regardait une semblable

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