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Spartacus

Spartacus

Titel: Spartacus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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nourrir les rapaces, à régaler aigles, vautours ou corbeaux.
     
    Spartacus a empoigné les avant-bras de Curius, le maître d’armes. Dans le clair de lune, il ne discerne que sa silhouette, ne reconnaît que sa voix.
    — Laisse-nous passer ! dit-il en le repoussant de côté. Nous voulons combattre et mourir en hommes libres, et non pas être égorgés comme des animaux de boucherie.
    Curius ne résiste pas ; il marche aux côtés de Spartacus en répétant qu’il est lui-même un homme libre, un gladiateur qui a passé un contrat avec Lentulus Balatius, qu’il n’est pas un bourreau ni un boucher, qu’il l’a dit et redit toute la nuit à Apollonia, et qu’il a retenu Vacerra.
    — Viens avec nous, lui dit Spartacus. Lentulus Balatius te jettera aux fauves dès demain si tu restes.
    Il s’arrête, fixe Curius.
    — Tu n’es pas un chacal, dit-il. Nous serons tous des hommes libres !
     
    Spartacus se remet à marcher à grands pas sur cette berge sinueuse qui descend en pente douce vers le Vultume.
    La ville de Capoue est un sombre amoncellement de volumes qui s’encastrent les uns dans les autres sur la rive gauche du fleuve.
    Spartacus se retourne sans cesser d’avancer. Dans la blancheur nocturne, il compte sept à huit dizaines de gladiateurs qui marchent épaule contre épaule comme pour se rassurer.
    — Lentulus Balatius demandera aux magistrats de lancer à ta poursuite la milice de Capoue, objecte encore Curius.
    Il hausse les épaules.
    — C’est vrai qu’ils ne savent pas se battre, mais vous n’avez pas d’armes, poursuit-il.
    — Nous nous battrons, s’il le faut, avec des branches et des pierres acérées, répond Spartacus. Nous ne resterons pas les mains nues !
     
    Ils ont déjà parcouru tout le méandre du Vultume qui entoure la ville. Ils franchissent un pont dont les pierres paraissent blanches sous la lune.
    Au-delà commence la campagne, s’étendent les plantations d’arbres fruitiers, les vignobles, les champs de blé. Ce n’est pas encore l’aube et la terre est vide d’hommes.
    — Le préteur Claudius Glaber est à Capoue, reprend Curius. Si tu échappes à la milice, Glaber obtiendra de Rome une armée qui te poursuivra. Où iras-tu, Spartacus ?
    Le Thrace tend le bras, montre le cône noir du Vésuve qui est comme l’extrémité d’une lance enfoncée dans la chair blanche de l’horizon.

 
     
     
     
     
TROISIÈME PARTIE

 
     
22
    — Ces chiens se sont enfuis cette nuit ! s’exclame Cnaeus Lentulus Balatius.
    Il est assis dans sa villa de Capoue, les mains croisées sur son ventre, la tête levée, regardant les fresques peintes sur les murs et le plafond du péristyle du jardin intérieur.
    Au-delà du vestibule et de l’entrée de la demeure, on aperçoit l’allée de pins parasols qui conduit au Vultume. Des barques sont amarrées à des piquets plantés sur la berge.
    — Combien sont-ils ? demande le préteur Claudius Glaber, installé dans un fauteuil de cuir.
    Il a les avant-bras posés sur les accoudoirs sculptés. Ses doigts serrent les têtes de lion taillées dans le bois, dont les yeux sont des pierres bleues.
    Lentulus Balatius ne tourne pas la tête. Ses pouces s’enroulent l’un sur l’autre dans un lent mouvement de rotation.
    — Plus de soixante-dix, soixante-quinze, et je ne compte pas quelques serviteurs qui se sont joints à eux, et Curius, un homme libre, mon maître d’armes. On l’a vu marcher aux côtés de ce Thrace que tu m’as vendu, Paquius.
    Le marchand d’esclaves est arrivé ce matin de Rome en compagnie de Posidionos et des deux jeunes gens qui ne quittent jamais le rhéteur grec. Ils se tiennent maintenant sur le seuil du vestibule, debout l’un en face de l’autre, les jambes et les bras nus, les cheveux bouclés, leurs corps si bien dessinés qu’on dirait deux statues. Du péristyle, on entend leurs jacassements.
    — Tu m’as vendu le Thrace, un guérisseur juif et une prêtresse de Dionysos pour cinquante talents.
    — Tu m’as en effet proposé cette somme, marmonne Paquius.
    Il est assis sur un petit siège aux pieds croisés. Il se tient courbé, les coudes sur les cuisses ; sous sa tunique blanche on aperçoit son abdomen proéminent.
    — C’est toi, Posidionos, dit Lentulus Baliatius en penchant la tête vers le Grec, c’est toi qui le voulais, ce Thrace, pour le mettre dans ton lit. Et tu viens jusqu’ici…
    — Je désirais le voir combattre, j’allais même te

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