Spartacus
politiques romains : « Il y avait déjà trois ans [ sic ] que durait cette guerre, effrayante pour les Romains, dont on s’était moqué d’abord, dont on n’avait parlé qu’avec mépris, comme d’une guerre de gladiateurs. Lorsqu’il fut question d’en donner le commandement à d’autres chefs, tout le monde se tint à l’écart ; nul ne se mit sur les rangs. » Un homme pourtant s’avance sur le devant de la scène pour saisir sa chance, Marcus Licinius Crassus.
Crassus, l’homme providentiel
Crassus est issu d’une famille patricienne illustre. Son père, Publius Licinius Crassus Dives, fut consul en 97 puis proconsul en Espagne. Lors de son proconsulat, il combattit les Lusitaniens et reçut pour cela les honneurs du triomphe avant de devenir censeur en 89. Toutefois, Crassus a grandi dans une maison aux mœurs modestes et où l’argent ne coulait pas à flots. Comme d’autres familles de Rome, la sienne a payé un lourd tribut aux guerres civiles. Son père et son frère ont été condamnés à mort par Marius pour leur appartenance à l’aristocratie. Lui-même, encore jeune, a dû partir se cacher dans une grotte en Espagne où des amis de son père l’ont ravitaillé malgré les risques encourus. Après la mort de Marius, Crassus a constitué une petite armée. Avec elle il est rentré en Italie pour se placer sous les ordres de Sylla. Dans la lutte de ce dernier contre les partisans de Marius, il s’est montré plein de zèle. D’après Plutarque, ces exploits « firent naître en lui pour la première fois l’ambition de rivaliser avec la gloire de Pompée ». Ce rival n’avait que vingt-quatre ans en 82 alors que Crassus en avait déjà trente-trois. A la bataille de la Porte Colline, sous les murs de Rome, alors que l’armée de Sylla reculait devant les Samnites alliés des marianistes, Crassus commandait l’aile droite. Contre toute attente, il remporta la victoire au moment où tout semblait perdu pour la faction des optimates . Malgré cette victoire, sa cupidité le rendit rapidement impopulaire. Poussé par l’appât du gain, il réussit à bâtir une fortune colossale sans jamais être regardant sur les moyens. D’après Plutarque, qui le compte au nombre des hommes illustres, il bénéficia comme beaucoup d’autres des proscriptions. Lors de la guerre civile, Sylla mit en vente les dépouilles de ses victimes et Crassus n’hésita jamais à profiter de l’aubaine pour racheter à vil prix les domaines des victimes du dictateur. Pis encore, dans le Bruttium, à l’extrême sud de l’Italie, il procéda à des proscriptions sans en avoir reçu l’ordre de Sylla et par pur esprit de lucre. Ces malversations étaient si scandaleuses qu’elles arrivèrent aux oreilles du dictateur ; Sylla ne le sanctionna pas, mais il ne l’employa plus dans aucune affaire publique. Crassus en conçut de l’amertume car cette disgrâce laissait le champ libre à Pompée, son éternel concurrent. Pourtant Crassus fit toujours bonne figure et dissimula avec humour son ressentiment. Un jour, comme quelqu’un s’écriait « Voici le grand Pompée ! », Crassus demanda en riant « Mais quelle taille a-t-il donc ? ».
Pour se consoler du succès de son rival, Crassus a continué à faire des affaires. Comme Rome est perpétuellement victime d’incendies, il a constitué une troupe de 500 esclaves architectes et maçons. Après avoir racheté pour une bouchée de pain les maisons détruites par les flammes, il fait reconstruire des immeubles neufs qu’il loue à prix d’or. Cet habile promoteur devient ainsi propriétaire de la plus grande partie de Rome. D’après Pline l’Ancien, ses seuls biens immobiliers peuvent être évalués à 200 millions de sesterces, soit le prix de 100 000 esclaves. Avec sa fortune, Crassus a acquis de nombreuses mines d’argent en Espagne et une immense propriété qui lui rapportent gros. Pourtant, tout cela n’est rien en comparaison de la valeur de ses esclaves : Crassus achète à bas prix des hommes sans qualification. Ensuite, participant parfois lui-même à leur apprentissage, il en fait des maîtres d’hôtel, des lecteurs, des secrétaires, des comptables ou des intendants très qualifiés qu’il revend beaucoup plus cher. Selon lui, « le maître doit avant tout s’occuper de ses esclaves qui sont comme les outils animés de l’économie domestique 79 ». Bien qu’âpre au gain, Crassus sait pourtant se montrer
Weitere Kostenlose Bücher