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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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s’étaient taillé des « concessions »
dans les grands ports. Le 4 mai 1919, l’annonce que les Alliés, à
Versailles, attribuent au Japon les anciennes concessions coloniales allemandes
en Chine y suscite une profonde réaction nationale, une première vague de
grèves ouvrières, la reconstitution du parti nationaliste Kouomintang, et la
fondation d’un petit parti communiste en juillet 1921. Le Kouomintang s’empare
du gouvernement de Canton dans le sud du pays et s’engage, à partir de 1923,
dans la reconstitution d’une Chine unifiée ; les quelques centaines de
communistes chinois y adhèrent. Au fur et à mesure que ses armées remontent
vers le nord et chassent les seigneurs de la guerre, les paysans saisissent les
terres des grands propriétaires, les ouvriers déclenchent des grèves. Les
cercles patronaux chinois exigent de Tchang Kai-shek, le chef de l’armée du
Kouomintang, qu’il y mette le holà. Le 20 mars 1926, à Canton remué
par la grève, il arrête une cinquantaine de communistes et impose à leur parti
des restrictions draconiennes à son activité ainsi que la remise du fichier de
ses adhérents à la direction du Kouomintang.
    À Moscou, Boukharine – qui, après la suppression en novembre 1926
du titre de président de l’Internationale, la dirige officieusement à la place
de Zinoviev limogé – et Staline dissimulent la nouvelle. Staline pense
rouler Tchang Kai-shek et le fait nommer membre d’honneur du Comité exécutif de
l’Internationale. Il imagine la future prise du pouvoir des communistes chinois
par une combinaison de manœuvres et de ruses leur permettant de contrôler les
postes décisifs du Kouomintang. Il faut donc les empêcher de quitter ce dernier
pour se constituer en parti distinct, comme le réclament Trotsky puis Zinoviev
à la fin de 1926, leur interdire toute activité politique qui entraverait ce
noyautage, calmer les paysans et les ouvriers trop entreprenants pour ne pas
effrayer les propriétaires terriens, les chefs d’entreprise, les banquiers même
qui, selon Staline, peuvent participer aux côtés des ouvriers, des paysans et
de la petite bourgeoisie à une révolution nationale démocratique.
    En juillet 1926, Tchang reprend sa marche vers le nord.
À l’approche du général qu’on leur présente comme leur défenseur, les paysans
se soulèvent et prennent la terre, et, le 22 février, les ouvriers de
Changhaï, la grande cité ouvrière, dont le centre et le port sont concédés aux
puissances étrangères, déclenchent une première grève générale de cinq jours.
Les tueurs du chef de guerre local décapitent et éventrent plusieurs dizaines
de dirigeants de la grève et de militants. Tchang ordonne à son armée de rester
l’arme au pied. À Moscou, Staline et Boukharine vantent toujours ses mérites.
Le mouvement s’arrête. Tchang reprend sa marche vers la ville. La veille de son
entrée, le 21 mars, à l’appel de la centrale syndicale dirigée par le PC
chinois, les ouvriers de Changhaï décrètent la grève générale insurrectionnelle
et prennent le contrôle de la ville. Staline juge l’offensive prématurée et,
afin de ménager Tchang, qui a déjà planifié, avec les puissances coloniales, le
massacre des grévistes insurgés et exige qu’ils déposent les armes, ordonne aux
communistes d’obéir. Le 6 avril, devant une assemblée de 3 000 militants
à Moscou, Staline présente cette décision comme partie intégrante d’une
stratégie révolutionnaire minutieusement réfléchie et assure aux militants
inquiets : « Tchang Kai-shek se soumet à la discipline […]. Il est à
la tête de l’armée et ne peut rien faire d’autre que de la conduire contre les
impérialistes [544] . »
Il envoie son discours à l’impression. Pendant que les rotatives tournent, le 12 avril
au matin, Tchang Kai-shek entre dans Changhaï, mobilise la pègre des gangs du
jeu, du trafic d’opium et de la prostitution, et massacre des milliers d’ouvriers
avec l’aide de la police française et de détachements japonais et britanniques.
Tchang fait décapiter et jeter dans des chaudières de locomotives communistes
et grévistes. Le discours de Staline ne sera jamais publié.
    À Moscou, c’est l’affolement. Staline cherche surtout à
préserver sa réputation. Or, la montée de la révolution en Chine en 1926-1927 a
éveillé dans une couche de militants, et même de cadres du Parti, des espoirs
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