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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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avait donné une analyse beaucoup plus fouillée. Faisant d’Hitler l’incarnation
du « petit-bourgeois enragé » et du national-socialisme l’« expression
d’un matérialisme zoologique » nourri « d’explosions d’antisémitisme »,
il souligne que « le fascisme a amené à la politique les bas-fonds de la
société », qu’il promeut l’idéologie de la « race » et exalte le
pogrome [728] .
Dans un post-scriptum du 2 novembre 1933, il lance un cri d’alerte :
« Le temps nécessaire à l’armement de l’Allemagne détermine le délai qui
sépare d’une nouvelle catastrophe européenne. […] Quelques années sont
suffisantes pour que l’Europe se retrouve à nouveau plongée dans la guerre [729] . » L’URSS
est la première menacée. Pourtant, Staline ne perçoit aucune de ces menaces.
Son incompréhension de la nature du nazisme cumule ici ses effets avec sa
décision de tendre la main à Hitler… qui ne la saisit pas. Staline se retourne
donc vers les démocraties. Le 19 décembre 1933, il soumet au Bureau
politique une résolution, restée longtemps secrète, décidant de l’adhésion de l’URSS
à la Société des nations, formée par les vainqueurs de la Première Guerre
mondiale, « à certaines conditions », et s’y affirme prêt à « signer
un accord régional de défense commune contre une agression de l’Allemagne [730]  ».
    En 1934, la collectivisation est achevée : la
production de viande est de deux fois inférieure à celle de 1919, la pire année
de la guerre civile ! 17,7 millions de chevaux, plus de 10 millions
de porcs et 25 millions de bêtes à cornes ont péri. Staline se vantera
plus tard à Churchill d’avoir gagné la guerre de la collectivisation au prix de
10 millions de morts. La paysannerie est brisée, sa capacité de résistance
active (mais non passive) anéantie, et la bureaucratie a élargi sa base :
la constitution des kolkhozes et des sovkhozes entraîne la prolifération des
fonctions de gestion, de commandement, de surveillance, de contrôle et de
répartition assumées par des paysans, employés et ouvriers, promus et dotés de
petits privilèges, dont le plus important est d’être assis le plus souvent dans
un local ou un bureau à l’abri du froid, du vent ou de la chaleur. Leur
fonction de relais du pouvoir leur assure une foule de petits avantages dont le
cumul n’est pas négligeable. Mais ils ont la lourde et dangereuse charge de
faire passer les ordres du Bureau politique. Au milieu des années 1930, il
existe en gros 240 000 kolkhozes, ce qui veut dire 480 000 présidents
et vice-présidents, 240 000 comptables, autant d’agronomes et
agrotechniciens divers, soit une couche administrative de plus d’un million d’hommes.
Il faut y ajouter, à un échelon inférieur, les chefs de brigades, de 4 à 6 en
moyenne selon la dimension des kolkhozes, tous assurés de privilèges, minimes
certes, mais vitaux.
    Ils bénéficient aussi des cartes de ravitaillement. En 1933,
40 millions de citoyens soviétiques (sur 165 millions), et parmi eux
tous les ouvriers d’usines, sont titulaires de tickets de pain, 6 millions
et demi de tickets de viande, et 3 millions de tickets de beurre. En 1932,
les prix du marché dépassaient de 8 fois ceux des tickets, en 1933 et en
1934, de 12 à 15 fois. Alors que le salaire moyen d’un ouvrier est de 125 roubles
par mois en 1933, un kilo de pain vaut 4 roubles au marché libre, un kilo
de viande de 16 à 18 roubles, un kilo de saucisson 25 roubles et un
kilo de beurre de 40 à 45 roubles. Les détenteurs de tickets peuvent
revendre au prix du marché une partie des produits qu’ils achètent à des prix
très bas. Ainsi le rationnement garantit l’alimentation minimale des couches
les plus pauvres et permet de petites spéculations. Il transforme l’ouvrier qui
en tire profit en petit trafiquant individuel.
    C’est à la même époque que Staline érige la délation au
niveau d’un culte – véritable pièce maîtresse de son système de répression
et de contrôle policiers. Le 6 janvier 1934, la Pravda publie
une lettre à Staline écrite par de petits pionniers de Novaia Ouda, où il avait
été jadis exilé, qui disent leur fierté d’avoir dénoncé des « ennemis du
peuple ». Le 16 mars, la Pravda des pionniers publie avec
enthousiasme la lettre d’une jeune paysanne, Olia Balykina, qui dénonce comme
koulaks la moitié des paysans de son

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