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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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fâcheux rappel ne pouvait alors que déplaire à
Hitler. La Tempête passe donc à la trappe. Quelques mois plus tard, la
censure, dans La Chute de Paris d’Ehrenbourg, substitue au slogan « À
bas les fascistes », clamé par des manifestants du Front populaire, l’imaginaire,
anodin et imprononçable « À bas les réactionnaires ! ».
    Sa prudence s’explique par la crainte de ne pas être en état
de faire face à une guerre qu’il sait pourtant inévitable. Cette peur explose
brutalement au début du long déjeuner qui suit la parade du 7 novembre 1940.
Staline évoque le conflit avec Trotsky au début de la guerre civile sur le
front Sud. Ce rappel terminé, la quinzaine d’invités se préparent à s’asseoir,
il les retient et se lance dans une longue diatribe inattendue, de plus en plus
menaçante, à l’égard des personnes présentes. « Nos avions, dit-il,
peuvent tenir en l’air trente-cinq minutes alors que les avions anglais et
allemands peuvent rester en vol des heures entières. Nous ne sommes pas prêts à
mener une guerre comme celle qui se déroule entre l’Allemagne et l’Angleterre. »
Les avions soviétiques, construits en masse depuis quelques mois, sont
effectivement des tombeaux volants. Si l’Armée rouge n’est pas, dans tous les
domaines, au niveau des armées ennemies (et selon ses termes, « tous les
États capitalistes, même ceux qui se présentent comme nos amis, sont nos ennemis »),
l’URSS sera balayée. Or, personne ne se soucie de tous ces problèmes ;
ainsi, par exemple, on n’a pas alerté les constructeurs d’avions…
    Staline paie en réalité le prix de la concentration de tous
les pouvoirs entre ses mains, concentration qui dessaisit ses associés, même
les plus proches, de toute initiative. Et comme il se refuse à le reconnaître,
il ne peut qu’accuser et menacer : « Je me suis occupé tout seul de
toutes les questions. Aucun de vous n’y a même pensé. Je suis seul. Comment
puis-je étudier, lire, suivre les nouvelles chaque jour, si vous ne faites rien ?
Vous, vous n’aimez pas étudier, vous n’aspirez qu’à la vie paisible. Vous
dissipez l’héritage de Lénine. » Kalinine bafouille qu’ils manquent de
temps, excitant encore davantage la fureur de Staline qui, pendant sa tirade,
fixe surtout Kaganovitch et Beria. Il gronde : « Les gens sont
insouciants… On m’écoute et tout reste en l’état. Mais je vais vous montrer si
je perds patience. (Vous savez comme je le peux ?) Je vais frapper si fort
sur les malappris que tout va trembler [1042] . »
La quinzaine de dignitaires présents l’écoutent, debout, raides. Dimitrov, qui
n’a jamais vu Staline dans cet état, aperçoit des larmes dans les yeux de
Vorochilov. Les invités s’assoient ensuite en silence, pour un morne repas qui
s’étire jusqu’à neuf heures du soir.
    Le 11 novembre 1940, Molotov part à Berlin, où
Hitler le reçoit. Il exige le retrait des troupes allemandes de Finlande et
proteste contre leur présence en Roumanie. Au retour, Staline tente une
démarche désespérée : il propose au roi de Bulgarie, Boris, un pacte d’assistance
mutuelle, et ajoute que, si ce pacte est signé, « non seulement nous ne
ferons pas d’objection à l’adhésion de la Bulgarie au pacte à trois, mais
alors, nous-mêmes, nous nous associerons à ce pacte [1043]  ». Si la
Bulgarie avait accepté, Staline aurait donc adhéré au pacte anti-Comintern
signé par l’Allemagne, l’Italie et le Japon, et dû dissoudre immédiatement l’appareil
de la III e  Internationale, installé à Moscou. Si ce
renversement historique inouï n’a pas eu lieu, on le doit uniquement à la pusillanimité
du tsar Boris et de son Premier ministre Filov…
    L’alliance Berlin-Moscou dépasse en effet les conditions qui
l’ont vue naître. La parenté des méthodes et du système politiques charge l’alliance
d’un contenu, souligné par les dirigeants des deux pays. Ribbentrop déclare
ainsi au ministre italien Ciano, en octobre 1939 : « Staline a
renoncé aux projets de révolution mondiale […]. La Russie tend à devenir un
État national et normal [1044] . »
Peu après, Hitler explique à Mussolini devant Ciano : « La voie sur
laquelle Staline s’est engagé semble mener à une sorte de nationalisme
slavo-moscovite et s’éloigner du bolchevisme à base judéo-internationale [1045] . » Mais,
pour se lancer à la conquête du monde, l’Allemagne

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