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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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du
ministre du Cinéma, Bolchakov. Staline le protégera et, alors que la
chronologie de ses Œuvres n’évoque pas son mariage, il y a fait figurer
la mention suivante : « Mars-juin 1911 : Des perquisitions
répétées sont effectuées chez I. V Staline (dans la maison de M. P.
Kouzakova) [160]  »
dont il a ainsi voulu sauver le nom de l’oubli. Après la révolution d’octobre,
Maria Kouzakova, informée des hautes fonctions occupées par son ancien galant,
lui écrira pour lui demander de l’aide. Il ne lui répondra pas.
    Libéré le 27 juin 1911 de Solvytchegodsk, avec
interdiction de se fixer dans les grandes villes, Koba s’installe un instant à
Vologda. Il y arrive le 19 juillet et loue pour trois roubles par mois une
chambre dans la maison d’un gendarme à la retraite. La police, qui file celui
qu’elle appelle finement « le Caucasien », en trace le portrait
suivant : « Taille moyenne, entre 33 et 35 ans, teint basané,
collier de barbe court, visage allongé portant des traces de petite vérole ou
des taches de rousseur, cheveux noirs coupés court, constitution physique
normale, démarche régulière, vêtu d’un pantalon à rayures, porte un chapeau mou
sombre. Type géorgien [161] . »
L’État verse alors aux exilés 7 roubles et 40 kopecks par mois pour
leur entretien. Cela suffit pour manger à sa faim, et Koba se refuse toujours à
chercher du travail.
    Il ne se mêle pas aux cercles d’exilés politiques dont les
discussions et les débats passionnés l’ennuient. Un mois plus tard, la police
signale que le Caucasien, désœuvré, se promène régulièrement, depuis le début du
mois d’août, dans la ville au bras d’une jeune fille « de taille moyenne,
âgée de 23 ans, intellectuelle, aux épais cheveux noirs, au visage bien
dessiné, de constitution physique normale, à la démarche régulière. Elle est
vêtue d’un manteau court noir, d’une jupe à la mode, noire par-devant, rouge
par derrière, et d’un chapeau avec une garniture noire [162]  ». Les
policiers, qui l’appellent l’« élégante » mais taisent son nom,
indiquent les jardins publics où les deux jeunes gens se promènent, les
cabarets où ils déjeunent, aux frais de l’« élégante », fille d’un
paysan aisé, et le temps qu’ils passent chez elle.
    Il s’agit d’une amie de son camarade Pierre Tchijikov, exilé
lui aussi mais qui a cherché et trouvé un emploi à plein temps comme commis
chez un marchand de fruits et légumes : la jeune Pelagueia (ou Pauline)
Onoufrieva. Elle rédigera en 1944 des souvenirs non publiés sur leur amitié. La
police la considère, à tort ou à raison, comme la fiancée de Tchijikov.
Admirative du « sens du beau » de Koba, elle a avec lui de longues
discussions passionnées sur la littérature et l’art. Il lui parle longuement de
sa femme, décédée trois ans plus tôt, et lui répète sans cesse : « Vous
ne pouvez pas savoir les beaux vêtements qu’elle était capable de faire [163]  ! »
    Il s’inscrit à la bibliothèque municipale et, selon le
rapport du mouchard qui le file, s’y rend dix-sept fois pendant les trois mois
et vingt-deux jours que dure son séjour à Vologda. C’est sans doute alors qu’il
lit Lamarck, ce naturaliste français napoléonien pour qui l’exercice régulier d’une
fonction modifie puis transforme l’organe qui la remplit d’une façon permanente
et transmissible aux descendants, grâce à l’hérédité des caractères acquis. Il
utilisera plus tard ces lectures pour soutenir le charlatan Lyssenko, qui
prétendra transformer les espèces mais n’y arrivera que sur le papier. Il lit
et annote soigneusement les Essais sur l’histoire de la littérature d’Europe
occidentale de Kogan. À son départ, il en fait cadeau à Pelagueia, avec une
dédicace : « À l’intelligente et méchante Pauline ; de Joseph l’original [164]  ». C’est
ainsi qu’elle le jugeait : un « original », un homme à part, ce
qui n’est pas un compliment dans le monde paysan. « L’élégante »
a-t-elle dissimulé dans ses souvenirs une liaison avec le futur maréchal ?
C’est peu probable. Si Koba la traite de « méchante », c’est qu’elle
l’a tenu à distance. Le fonds Staline conserve deux cartes postales qu’il lui a
envoyées. La première représente deux déesses enlacées, dont l’une a la
poitrine dénudée, l’autre la statue d’un homme nu embrassant une

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