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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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quatre ans, on ne saurait parler d’une activité intellectuelle
débridée.
    En 1939, Rosa Schweitzer, la veuve de Souren Spandarian,
dans une brochure sur Staline à Touroukhansk, affirme qu’il traduisit un
ouvrage de Rosa Luxemburg. L’invention maladroite qui le réduit au rôle de
traducteur fera long feu ; Staline haïssait la dirigeante de la gauche
social-démocrate allemande et ne connaissait que quelques dizaines de mots d’allemand.
En fait, pendant plus de trois ans, il hiberne comme une marmotte. Sa
passivité, inhabituelle pour un révolutionnaire, et surtout pour un dirigeant,
ne lui est pas seulement inspirée par le paysage monotone d’une taïga immuable,
elle exprime une attitude devant les événements : il attend. Il n’est pas
homme à prendre l’initiative et à tenter de forcer le cours des choses. Nul n’est
plus éloigné que lui de la devise de Napoléon : « On s’engage et puis
on voit », que Lénine reprendra à son compte. En dehors des intrigues d’appareil,
il préfère attendre que les autres prennent l’initiative.
    Peu apte à se dégager de sa condition de l’heure et de son
environnement, non plus qu’à déceler dans le présent les lignes de l’avenir, il
ne perçoit pas les craquements de l’Empire et attend, il ne sait quoi. Le 14 décembre 1916,
la monotonie de son existence est soudain rompue. L’administration rassemble
une vingtaine d’exilés de la région, dont lui, et les envoie à Krasnoïarsk
devant le conseil de révision. L’état-major a un besoin urgent de soldats. Le
conseil de révision réforme pourtant Staline pour malformation du bras gauche.
Ce rejet suscite chez lui une vive aversion pour les officiers tsaristes. Il l’embellira
en racontant aux Alliluiev qu’il a été écarté en tant qu’« élément
indésirable ». Ce mobile imaginaire lui paraîtra plus tard insuffisant. Sa
biographie officielle affirme en effet : « Mobilisé dans l’armée, en décembre 1916,
Staline est envoyé sous escorte à Krasnoïarsk puis à Atchinsk. » Le
maréchal de 1946 ne peut accepter sa réforme de 1916. Au début de 1914, le
conseil de révision de Salzbourg avait déclaré le gringalet Adolf Hitler « inapte
au combat pour cause de débilité physique » et « inapte au port d’armes [208]  ». Il s’était
rattrapé en s’engageant dès le début de la guerre dans l’armée allemande. Mais
il était aussi favorable à cette guerre que Staline y était hostile…
    Le 27 décembre, Nicolas II remplace Trepov par le
prince Golitsyne, qui lui déclare se sentir totalement incapable d’assurer
cette charge. Nicolas II le confirme pourtant à la tête du gouvernement.
La situation de la Russie est dramatique. Dans une lettre à sa femme du 20 septembre,
Nicolas II a écrit avec inquiétude : « Les prix grimpent partout
et le peuple commence à avoir faim. » Mais que faire ? « Je ne
comprends absolument rien, dit-il, à ces questions d’alimentation et de
ravitaillement [209] . »
À la fin de novembre 1916, le gouvernement a introduit un système de
distribution autoritaire du pain, attribué en priorité absolue à l’armée et aux
ouvriers des industries de guerre ; l’alimentation de la population
urbaine a été confiée aux autorités locales.
    Lorsque s’ouvre l’année 1917, le bilan de la guerre est
accablant : en trois ans, près de 15 millions d’hommes ont été
retirés de la production pour partir sous les drapeaux ; 1,5 million
ont trouvé la mort, 2 millions ont été blessés et mutilés, et près de 3 millions
faits prisonniers. L’inutilité de cette saignée frappe les esprits. Au début de
1917, les cartes de ravitaillement, introduites dès le début de 1916 dans
certaines localités, se généralisent dans les grandes villes, et la crainte de
manquer de pain gagne la population. L’engorgement des transports est à l’origine
des premières ruptures d’approvisionnement. Les bruits de fermetures d’usines
par manque de combustible et de matières premières agitent les ouvriers de la
capitale. Une lente paralysie gagne toutes les institutions.
    La crise politique atteint même la lointaine administration
sibérienne : cette dernière, en effet, ne renvoie pas le réformé Staline à
Kostino et l’autorise à rester dans la région de Krasnoïarsk, à Atchinsk
exactement, la gare du Transsibérien, où se trouve toute une colonie d’exilés,
dont son vieil ami

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