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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Bona
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sera-t-il écrivain. Tout semble, en effet, réussir à cet enfant gâté, le succès et la chance lui sont très tôt familiers.
     
    Si timide et si anxieux soit-il, comment ne croirait-il pas que la vie, commencée sous de pareils auspices, lui sourira toujours ?
     
    5 André Chouraqui, Theodor Herzl, inventeur de l’Etat d’Israël , Seuil, 1973.
     

Le sentiment du provisoire dominait mystérieusement ma vie.

II
     
    Inquiétudes et rêves
d’un jeune homme
     

    Brève bohème berlinoise
     
    Le démon de la curiosité ronge Stefan Zweig. Il veut tout voir et tout connaître, loin de se contenter de ce qu’il a, il a besoin de chercher ailleurs, dans des sphères nouvelles, un sens à ce qu’il fait, à ce qu’il est vraiment.
     
    Loin de se laisser griser par les éloges, il flaire un piège et décide de couper le cordon ombilical avec Vienne. C’est un des traits constants de son caractère : Zweig n’est jamais fat, jamais comblé, les lauriers de la société seront toujours peu de chose en comparaison de son ambition, qui se joue sur un plan exclusivement individuel, son jardin secret, dont il possède seul les clés. Réussir à tirer de soi le meilleur, il le comprend très tôt, est le seul pari qui l’intéresse, et le seul but qu’il se donne dans la vie. Les gens qu’il admire, ceux avec qui il se liera et sur lesquels il écrira des livres, ne sont pas des gagneurs au sens où la société l’entend, mais souvent des perdants – du moins en apparence –, des gens que leur siècle n’a pas compris, dont il n’a su récompenser le talent, mais qui ont été fidèles à leur première passion, fidèles à eux-mêmes, sans aucune concession aux médailles, aux titres, aux honneurs. Pour Zweig, seule vaut la qualité intrinsèque et profonde d’un être. Tout le reste – succès compris – n’est que poudre aux yeux.
     
    Décrochant de Vienne à peine la renommée venue, il jette au feu un manuscrit qu’il juge médiocre et se retrouve à Berlin, première étape d’un long départ.
     
    Pourquoi Berlin ? La capitale de l’empire prussien, ville plutôt laide, plutôt froide, avec ses gros immeubles de style militaire et ses avenues boueuses du bord de la Spree, manque d’élégance et apparaît au jeune homme aux antipodes de la voluptueuse et délicate Vienne, mais elle est en plein essor économique et culturel. Elle a l’incomparable mérite de rassembler les poètes et les écrivains de l’avant-garde en langue allemande. Liliencron et Dehmel, Jacobowski et d’autres encore la parent de leur prestige. Pour un étudiant autrichien, il est d’usage de poursuivre à Berlin des études commencées à Vienne et nombre d’amis de Zweig – Martin Buber notamment – suivent le même chemin. Mais ce qui attire Stefan à Berlin n’est pas l’université, c’est la vie, enfin affranchie des habitudes et du confort viennois : « Le véritable sens de mon escapade, dira-t-il, était d’échapper à l’atmosphère de sécurité bourgeoise et de vivre complètement détaché et livré à moi-même. » Non en rejeton exemplaire d’un milieu favorisé, mais en individu libre et curieux de tout.
     
    Ce séjour lui sera salutaire. Il lui permet de découvrir un autre monde, d’autres gens. A Vienne, il n’a fréquenté que des amis convenables : la société y est policée, raffinée, bourgeoise, même parmi les poètes. A Berlin, dans les cafés de la Nollendorfplatz, où tous se retrouvent et qui vont lui tenir lieu d’académie, il fait connaissance avec la vie, dans tout son éclectisme. Les poètes maudits de Berlin et la faune qui les entoure sont le premier échantillon de véritable humanité qu’il rencontre. Il découvre la pauvreté, qu’il n’avait jamais vue, et s’initie à la vie de bohème.
     
    A Berlin, les poètes dont aucun n’a l’élégance d’un Beer-Hofmann ou d’un Schnitzler, portent du linge sale, des costumes sans classe et des manteaux élimés. Leur gourou, au premier étage du Nollendorf-Casino, est une sorte d’homme des bois exilé dans la ville, qui écrit ses poèmes dans les tramways, d’une maigreur famélique : il s’appelle Peter Hille et garde ses manuscrits froissés dans les poches de sa vieille redingote. A quelque soixante-dix ans, Hille est l’image même de l’artiste qui s’est consacré aux mots et à leur musique, il aime lire pendant des heures et à haute voix des morceaux épars de son œuvre.

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