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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Bona
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tient sa fiancée dans ses bras.
     
    Ce qu’il y a d’extraordinaire dans ce tableau de neige et de sang, écrit comme un hommage aux pauvres Juifs errants « qui jamais n’ont connu les beaux jours », c’est la concision du texte et c’est son émotion. Que Zweig, à l’aube de sa vie d’écrivain, consacre sa première nouvelle au peuple avec lequel il a pris ses distances, se voulant autrichien d’abord, débarrassé de tout signe ethnique particulier, prend, avec le recul de l’Histoire, un sens poignant. Dans la neige paraît en 1901 dans Die Welt, un journal viennois sioniste, fondé par Theodor Herzl et que dirige Martin Buber, jeune écrivain, petit-fils d’un savant talmudiste, qui étudie comme lui la philosophie à l’université de Vienne. Passionné par les récits et les légendes de la tradition orale juive, comme ceux du rabbi Nachmann, attentif à tout ce qui prend racine dans un passé millénaire toujours vivant, Buber, qui n’est pas encore le grand exégète et penseur juif qu’il deviendra, a été séduit par cette nouvelle, qui ressemble à s’y méprendre à un conte ancien et dont l’auteur est un jeune homme presque exactement de son âge. Buber fera paraître à nouveau Dans la neige, l’année suivante, dans le Jüdischer Almanach, qu’il a fondé peu de temps auparavant avec quelques amis, à Berlin.
     
    Puis la nouvelle disparaîtra, comme Les Cordes d’argent. Elle ne figurera dans aucun des recueils de ses œuvres complètes, réunies par ses soins. Pourquoi ? En soi, la nouvelle n’a rien à envier à celles qui suivront, aucune maladresse ne signale un auteur débutant. Et si elle est très courte, elle n’en est pas moins dramatique pour autant, rassemblant à la per fection comme toutes celles qu’il écrira par la suite les éléments et les protagonistes d’une véritable tragédie. Toutes les suivantes, des chefs-d’œuvre du genre, seront de la même lignée : brèves et percutantes. Alors, pourquoi l’avoir reniée ? Il semble – son attitude ultérieure le prouvera – qu’il n’ait pas voulu apparaître trop clairement lié à la cause sioniste, et que la publication dans Die Welt puis dans le Jüdischer Almanach ait été à ses yeux un pis-aller, une sorte de repêchage, la Deutsche Dichtung (la Poésie allemande) qu’il aurait préférée, comme revue généraliste et d’avant-garde, lui ayant refusé Im Schnee.
     
    Est-ce la honte d’être juif ? La volonté de dissimuler ses racines ? Cela paraît peu probable : Im Schnee est là pour témoigner de sa fidélité, pour dire à la fois son attachement et son admiration envers ce peuple persécuté sur lequel, quand il meurt – c’est ainsi que le récit s’achève –, le printemps se lève. Mais parue dans une revue sioniste, cette nouvelle facilement étiquetable risque de l’enfermer dans un monde étroit comme un ghetto. Dès ses vingt ans, son attitude ne changera pas. Même quand, les temps devenus difficiles, l’appartenance à un groupe aurait pu lui simplifier la vie, il fuit comme la peste tout embrigadement. Il n’aime pas se lier à quelque cause que ce soit, serait-ce la plus digne.
     
    Il reniera Im Schnee. Mais ce petit texte juvénile et triste est une pierre blanche, comme un flocon de neige, sur le parcours de l’écrivain : tout au début de sa carrière, il marque un temps d’arrêt, et avec une étrange intuition, annonce la tragédie à venir. « La tempête claironne continuellement à leurs oreilles ces mots : c’est ici que tu dois mourir – mourir. » Le premier texte en prose publié a pour vrai sujet, à travers une péripétie du peuple juif, tellement malmené par l’Histoire, la prédestination au malheur. Le jeune Zweig, si enthousiaste, si viennois, la porte au plus profond de lui.
     

    Herzl, le roi de Sion
     
    Une série de succès s’abat sur lui comme la foudre… D’abord Les Cordes d’argent  : la presse, quasi soudain unanime, célèbre la naissance d’un poète et, à Berlin comme à Vienne, les critiques littéraires les plus fameux, des écrivains d’envergure applaudissent à ces vers dont lui est si mécontent. De la Norddeutsche Allgemeine à la Revue allemande en passant par le Neues Wiener Tageblatt et une bonne trentaine de journaux et de revues, petits et grands, il n’est question que de sa « virtuosité », de sa « singularité », de la « beauté » de ses poèmes. La Neue Freie Presse – la

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