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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Bona
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elle sera Fri, lui Steffi.
     
    Fri a trouvé en Zweig l’homme de sa vie, parce qu’elle place les artistes au pinacle et qu’il lui ouvre des perspectives conformes à ses aspirations. Zweig découvre auprès d’elle ce qu’il n’a jamais encore éprouvé auprès d’aucune femme, une tendre, quoique relative, complicité. Il lui adresse non seulement ses livres mais ceux de Rolland ou de Verhaeren, dans l’attente à la fois amusée et heureuse de ses commentaires. Son opinion ne lui est jamais indifférente. Avec beaucoup d’intuition, elle sait mettre un bémol à ses commentaires et ne s’aventure pas à prodiguer des conseils. C’est qu’elle admire éperdument son talent, et considère en retour ses propres œuvres avec une immense modestie. Il aime qu’elle écrive, encourage ses efforts, convaincu qu’il ne saurait y avoir entre eux de rivalité littéraire. Elle s’efface, d’instinct, devant lui. Il ne peut que se sentir grandi dans son regard. Elle l’idolâtre, « j’écris, lui dit-elle, à qui incarne l’Amour, le Bien et le Vrai ».
     
    « Je crois en l’Amour éternel comme je crois en Dieu, dans le Christ, en Beethoven, en Rembrandt et en toi. »
     
    Dès les premiers jours s’installe entre eux un rapport de forces inégal qui ira s’accentuant avec les années. Il est le dieu, elle est sa prêtresse. Il est le maître, elle sera la servante. Il vit, comme on règne ; elle, se met humblement à sa disposition et à son service. Elle s’excuse même d’avoir d’autres passions comme son travail : « J’ai le sentiment que si tel était ton désir, je pourrais me taire totalement », lui écrit-elle en février 1913. Elle est, dès l’aube de leur liaison, prête à tous les sacrifices, animée de ce feu de la passion dont Zweig prend pour lui-même si grand garde.
     
    Ce sentiment d’être le centre du monde et de trouver dans une femme tant d’attention, d’admiration, de dévouement a su cependant l’émouvoir. Puis l’atta cher. Friderike l’apprivoise par la douceur, par la patience. Elle lui apporte son équilibre et sa sérénité. Comme elle affronte seule les difficultés de sa vie et ne se plaint jamais de rien, elle lui paraît légère à ses côtés. C’est pour lui essentiel. Elle assume toutes ses responsabilités, ne demande jamais son aide, ne le sollicite ni pour ses livres ni pour ses enfants. Ainsi qu’elle le lui avoue un jour, « je n’ose empiéter sur toi ». Son amour réclame bien peu en échange : « Tu ne dois pas te sentir lié le moins du monde par moi, ni même entravé dans ta liberté de mouvements quand quelque chose est bon pour toi. » Loin de l’accaparer, elle ne cherche qu’à l’accompagner, dans l’ombre.
     
    Il aime qu’elle soit déjà mère. Et que ses enfants engagent un autre que lui. Muschi, ainsi que ses filles appellent leur mère, le rassure, le calme. Elle a ces talents maternels que sont la bonté et l’esprit de sacrifice. Il puisera en elle, dans ses fréquents moments de doute, dans ses crises morales, la force qui lui manque. Fri sera pour l’éternel inquiet, un roc. L’indéracinable repère et la consolatrice de tous ses maux. Il l’appelle « l’Agneau », parce qu’elle est douce et soumise. Rarement « mon agneau », parce qu’il se méfie du possessif. Mais il est sans doute des deux le plus fragile. Elle se montre infiniment plus énergique et plus équilibrée, plus sereine aussi. Pour la jeune femme à la beauté sombre dont la silhouette délicate l’a séduit, il incarne l’« homme de rêve ». Mais il sera aussi un autre enfant à porter.
     
    1 Les lettres de Friderike et Stefan Zweig (1912-1942) ont été publiées dans L’Amour inquiet , Editions des femmes, en 1987. Titre original : Unrast der Liebe , Scherz Verlag, Berne et Munich, 1951.
     

    L’Éros caché de Zweig
     
    En parallèle à sa liaison avec Friderike von Winternitz, Zweig ne renonce pas – et ne renoncera jamais – aux « épisodes ». Ils n’ont pas laissé d’état civil, aussi le biographe en est-il réduit à relever des prostituées, des cousettes, des lingères et des étudiantes parmi cette compagnie légère si parfaitement analysée. Dans son journal, il note rarement même un prénom. Seule se distingue une dénommée Marcelle, qu’il a connue à Paris, sur les boulevards et qui a été quelque temps avec lui en ménage. L’aventure dure quelques mois, avant qu’il ne

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