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Suite italienne

Suite italienne

Titel: Suite italienne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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dizaine à chaque lever du soleil. Votre ode ne fera qu’une de plus.
    César Borgia fit donner l’assaut presque aussitôt. Il fut violent, rageur, du côté de ses troupes, plus mou de la part des Français et, bien entendu, sans résultat. Quand vint la nuit, le calme que dispensait le crépuscule s’installa sur le camp, sur la ville, où l’on n’avait guère osé fêter le nouveau siècle, et sur la forteresse.
    Tout fut paisible comme si la guerre avait soudain cessé.
    En haut du donjon, de nouveau accoudée au créneau, la dame de Forli vint observer la campagne nocturne où traînait encore, vers l’occident, une mince bande blafarde.
    Complètement enveloppée dans un manteau noir, elle se fût confondue avec la nuit et avec la muraille sans la tache plus claire de sa tête nue. Les paroles d’orgueil et d’insolence criées l’ennemi lui avaient causé une joie violente, grisante comme un vin trop fort. Il y avait si longtemps qu’elle rêvait de les lancer au visage de cet homme, jadis un ami, parrain de l’un de ses enfants même, et qui cherchait maintenant sa perte avec un acharnement impitoyable.
    Mais cette minute enivrante était passée, et dans le silence et l’obscurité, la comtesse osait s’avouer qu’elle était lasse, lasse à mourir, en dépit de la belle confiance qu’elle s’était donné la joie d’afficher.
    Les renforts qu’elle espérait n’arrivaient pas. Florence, dont son mariage avec Jean de Médicis l’avait faite fille et ressortissante, était réduite à l’inaction par les menaces non déguisées d’un pape indigne, dont la main bénissante s’armait tantôt d’une dague tantôt d’une coupe de poison. Une lettre assez embarrassée de l’habile Machiavel, depuis longtemps l’ami de Catherine, lui avait appris qu’elle n’avait plus rien à attendre de ce côté-là.
    Du côté de Milan non plus, d’ailleurs. Le duc régnant, Ludovic le More, oncle de la comtesse, avait fui jusqu’en Autriche devant les armées du roi de France, qui réclamait pour lui-même, par héritage, le duché de Milan.
    Restait la propre sœur de Catherine, Bianca-Maria Sforza, que son mariage avec l’empereur Maximilien avait faite impératrice d’Allemagne. La dame de Forli avait beaucoup espéré d’elle, mais Bianca-Maria ne donnait même pas signe de vie. Et c’était cela, au fond, qui attristait le plus l’assiégée : le silence de sa petite sœur, qui pouvait si facilement oublier les tendres années de l’enfance et les membres de sa famille. Non, en vérité, il n’y avait de secours à attendre de personne… que d’elle-même et de son propre courage.
    — Je suppose que vous savez aussi bien que moi que nous sommes perdus ? fit soudain une voix derrière la jeune femme.
    Et cette voix répondait si bien à celle qui résonnait au fond de son âme, que la comtesse ne se retourna même pas. D’ailleurs, elle savait bien qui était là : le seul être qui dans la forteresse eût le droit de troubler ses méditations et de lui parler sur un ton aussi rude, parce que ce droit, il le tenait de l’amour.
    — Je le sais, Giovanni, dit-elle doucement.
    — Alors, pourquoi avoir refusé l’offre de Borgia ? Qu’aurez-vous gagné quand cette forteresse sera prise, détruite, et que nous serons tous morts ?
    Elle haussa imperceptiblement les épaules. Ce n’était pas d’hier qu’elle avait découvert que chez un homme, la beauté s’accompagnait rarement d’une grande intelligence.
    — Que gagnerai-je à écouter César ? rétorqua-t-elle. Si j’acceptais, sais-tu ce qui m’arriverait, ce que l’on m’offrirait ? Une bonne prison… ou alors quelque bon souper chez le pape ou chez César, un de ces soupers que l’on digère si mal. La cantarella ne me tente pas, Giovanni, ni les cachots du château Saint-Ange. Je les connais trop bien.
    Avec insolence, Giovanni da Casale haussa les épaules. Il jugeait stupide une résistance aussi acharnée contre un ennemi tellement plus puissant, et ne s’en cachait pas.
    — Voilà bien les femmes ! Elles sont incapables de croire à la parole d’un homme, d’un capitaine.
    — Parce que les hommes sont rarement dignes de foi. Je connais César, mon ami, c’est l’avantage que j’ai sur toi. Il me hait, et bien davantage encore depuis que j’ai refusé pour mon fils Ottaviano la main de sa sœur, la trop fameuse Lucrèce.
    — Pourquoi ces offres aimables, alors, puisqu’il est sûr de

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