Sur ordre royal
par la beauté et le tempérament de la dame, par sa propre solitude et la passion qu’elle attisait en lui ?
Aurait-il dû lui en dire davantage sur son mariage avec Gwendolyn et tout ce qui avait suivi ? Cela aurait-il fait une différence pour elle ? Etait-ce cette crainte qui l’avait retenu de parler de Gwendolyn, du petit Owain et de la naissance qui avait coûté la vie à sa mère ?
Quelle qu’en soit la raison, il ne l’avait pas fait et maintenant, les dés étaient jetés, pensa-t-il en se redressant et en prenant la lampe pour aller à la porte. Il avait fait son choix. Dame Roslynn l’avait accepté et il avait donné sa parole, alors il ne pouvait plus revenir en arrière.
Sauf dans la disgrâce et le déshonneur.
***
Le lendemain matin, Madoc se tenait dans la grand-salle, attendant sa future épouse. La chapelle du château était trop petite pour contenir les serviteurs, les soldats et les villageois qui étaient venus assister à la cérémonieet prendre part au festin, aussi le mariage devait-il être célébré ici. Il pleuvait à verse et Madoc espérait que ce n’était pas un mauvais présage.
Il passait d’un pied sur l’autre, combattant l’envie de tirer sur sa plus belle tunique, qui était très inconfortable. Il n’avait pas porté le vêtement depuis son premier mariage et déjà, à l’époque, il avait été gêné.
Sire Alfred était allé chercher dame Roslynn dans sa chambre, et Lloyd rayonnait comme s’il avait arrangé lui-même le mariage.
Malgré sa désapprobation, qui avait été évidente durant le souper de la veille, son intendant était présent aussi.
Juste comme Madoc commençait sérieusement à envisager d’envoyer quelqu’un à la chambre de la tour pour voir ce qui causait ce retard, dame Roslynn apparut au bas de l’escalier, une main posée sur le bras de sire Alfred.
Une véritable bouffée d’exultation mêlée à un désir brûlant frappa aussitôt Madoc. La cotte rouge foncé de Roslynn, coupée dans une riche étoffe, était simple mais ajustée à ravir. Elle accentuait la rondeur de sa poitrine et la finesse de sa taille avant de s’évaser sur ses hanches. Le galon doré autour du décolleté carré attirait l’attention sur la vallée qui partageait sa gorge blanche. Un voile de soie blanche frôlait ses joues et dissimulait la majeure partie de ses épais cheveux châtains. Elle ne portait qu’un simple crucifix en or, mais ses vifs yeux noisette étincelaient comme des joyaux. Ses lèvres pleines rappelaient à Madoc le baiser qu’elle lui avait donné.
Gwendolyn était jolie, réservée et douce, et jadis, ilavait cru l’aimer, mais elle n’avait jamais touché son cœur ou éveillé son désir comme dame Roslynn le faisait.
Pendant que la mariée et sire Alfred avançaient vers l’estrade, une vague d’excitation parcourut l’assemblée. Enfin, le père Elwy vint se placer devant Madoc et sa fiancée. Madoc prit alors la main fraîche de Roslynn dans la sienne et le prêtre commença à s’adresser à l’assistance.
— Si quiconque connaît un empêchement au mariage entre Madoc ap Gruffydd, seigneur de Llanpowell, et dame Roslynn de Werre, veuve, fille de sire James de Briston, qu’il le dise tout de suite ou se taise à jamais.
Madoc retint son souffle, craignant que quelqu’un ne proteste contre son mariage avec une Normande et la veuve d’un traître, ou que Trefor n’intervienne pour essayer de détruire la chance de son frère de connaître le bonheur et la prospérité.
Dame Roslynn partageait son appréhension, semblait-il, car elle resserra les doigts sur les siens comme si elle redoutait de lui être arrachée.
Ou parce qu’elle était tentée de fuir ?
Non, sûrement pas, se dit-il. Si elle avait eu des doutes ou en était venue à regretter sa décision, une femme comme elle n’aurait pas hésité à le dire, ou à fournir une excuse pour retarder le mariage.
Un silence gênant s’installa tandis que le père Elwy fixait Madoc comme s’il attendait quelque chose. Brusquement, Madoc sursauta, se rendant soudain compte qu’il devait prendre la parole. Pour se rattraper et prouver qu’il ne regrettait pas sa décision, il parlad’une voix forte et claire, prononçant chaque mot en gallois puis en français, pour sire Alfred et sa fiancée.
— Lorsque nous serons mariés, mon épouse aura droit à un tiers de mon domaine à ma mort, comme la loi le décrète. Elle aura
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