Taï-pan
hommes rirent avec elle.
« Pariez-vous sur le hongre, Taï-pan ?
— Je ne sais pas, murmura Struan, qui ne pensait qu’à May-may, et s’inquiétait. J’aime bien la pouliche. Mais je crois que je me déciderai quand ils seront au départ. »
Elle l’examina un instant, en se demandant s’il parlait par parabole.
« Allons voir la pouliche de près, proposa Jeff Cooper avec un rire forcé.
— Allez-y donc, Jeff, voulez-vous ? Je vous attends ici.
— Je vous accompagne », déclara Longstaff, sans remarquer l’irritation soudaine de Cooper.
Cooper hésita, puis les deux hommes s’éloignèrent.
Brock souleva poliment son chapeau à Shevaun, mais passa sans s’arrêter. Il était heureux que Struan ait décidé de ne pas monter en course, car il n’aimait pas tellement monter et le défi lancé à Struan avait été machinal.
« Comment va votre blessure, Altesse ? demanda Shevaun.
— Très bien. Grâce au Taï-pan, je suis presque redevenu moi-même.
— Je n’ai rien fait », protesta Struan que les éloges de Sergueyev gênaient.
Il remarqua Blore au paddock, en grande conversation avec Skinner. Je me demande si j’ai misé juste sur ce galopin, songea-t-il.
« Vous avez un fort beau navire, Altesse », disait Shevaun au grand-duc.
Struan remarqua que Sergueyev la contemplait avec une franche admiration.
« J’aimerais avoir l’honneur de vous le faire visiter, dit le Russe. Mon capitaine est à votre disposition.
— Merci, j’en serais ravie.
— Vous aussi, monsieur Struan. Peut-être pourrions-nous parler de ses qualités et de ses défauts ?
— Avec plaisir et… »
Blore arriva alors en courant, épuisé, couvert de poussière.
« On va bientôt commencer, Taï-pan – oh ! dites, vous êtes vraiment chic, Miss Tillman – mes respects, Altesse, dit-il d’une traite. Tout le monde a mis votre argent sur le quatre dans la quatrième, j’ai décidé de la monter moi-même et… ah ! oui, Taï-pan, j’ai examiné l’étalon, hier soir. Il a pris le mors, alors on pourra l’essayer la prochaine fois… Altesse, si vous voulez bien, je vais vous conduire à votre poste. Vous donnez le départ de la première.
— Moi ?
— Son Excellence ne vous en a rien dit ? Au diable le… Je veux dire, cela vous plaît-il ? Si vous voulez me suivre ? »
Jamais Blore n’avait tant travaillé, et il n’avait jamais été aussi énervé. Il conduisit Sergueyev en lui frayant un passage dans la foule.
« Blore a l’air d’un gentil garçon, observa Shevaun, heureuse d’être enfin seule avec Struan. Où l’avez-vous trouvé ?
— C’est lui qui m’a trouvé. Et je m’en félicite. »
Son attention fut attirée par une altercation du côté des tentes. Un groupe de soldats de garde repoussaient un Chinois hors du pesage. Le chapeau de coolie tomba… et la longue natte avec. C’était Aristote Quance.
« Excusez-moi une seconde », murmura Struan.
Il courut vers le groupe et se planta devant le petit homme, en le cachant de toute sa masse.
« Laissez, laissez, dit-il aux soldats. C’est un de mes amis. »
Ils s’éloignèrent, en haussant les épaules.
« Tonnerre d’un boulet de canon, Taï-pan, s’écria Quance en remettant vivement son chapeau. Il s’en est fallu d’un cheveu. Merci, de grand cœur ! »
Struan tira Quance à l’abri de la tente.
« Que diable faites-vous ici, bon Dieu ? chuchota-t-il.
— Fallait que je voie les courses. Et puis j’avais à vous parler.
— Ce n’est pas le moment ! Maureen est par là dans la foule ! »
Quance blêmit.
« Que Dieu me protège !
— Sûr ; encore que je me demande pourquoi Il le ferait ! Courez vite et disparaissez pendant qu’il en est temps. Il paraît qu’elle doit prendre le bateau pour rentrer en Angleterre dans huit jours. Si elle soupçonnait… ma foi, c’est vous que ça regarde.
— Rien que la première course, Taï-pan ! supplia Quance. Je vous en prie. Et j’ai un renseignement pour vous.
— Quoi donc ? »
Suffoqué, scandalisé, Struan apprit ce que Gorth avait fait à la petite prostituée.
« Une horreur ! La pauvre fille est à la mort, Taï-pan. Gorth est fou. Fou furieux.
— Faites-moi prévenir si elle meurt. Alors nous… ma foi, il faudra que j’y réfléchisse. Merci, Aristote. Mais je vous conseille de disparaître.
— Rien que la première course ? Je vous en supplie. Vous ne savez pas ce que
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