Taï-pan
lit et lui prit la main.
« Regarde-la, bon Dieu ! Je lui ai déjà bien fait la leçon. »
Il sourit, et se sentit revivre.
« Là ! C’est mieux, s’écria May-may. Je pense à toi tout le temps, ça ne fait rien. Yin-hsi est dans la chambre à côté toute seule. Elle attend docilement toute la nuit.
— Allez donc, fillette ! »
Il rit, et elle se mit à parler à Yin-hsi, en chinois. Yin-hsi écouta avec beaucoup d’attention, puis elle battit des mains, regarda Struan d’un air extasié et s’enfuit en courant.
« Qu’est-ce que tu lui as dit, May-may ? demanda-t-il, soupçonneux.
— Je lui ai expliqué comment tu fais l’amour. Et comment te rendre fantastical excité. Et de ne pas avoir peur quand tu cries à la fin.
— Le diable t’emporte ! Je n’ai donc rien de privé ?
— Tai-tai sait ce qui est bon pour son petit garçon coléreux. Yin-hsi t’attend, maintenant.
— Quoi ?
— Yin-hsi. Je lui ai dit de se préparer. L’amour dans la soirée est plaisant, ça ne fait rien. Tu as oublié ? »
Struan rit de bon cœur.
« Merci, mais j’ai à faire », dit-il.
Il descendit et s’aperçut soudain qu’il se sentait beaucoup mieux. Sûr, c’était ridicule de s’inquiéter de ce qui était passé. Et, encore une fois, il bénit son joss de lui avoir donné May-may.
Brock avait fait démonter le mât de misaine cassé et l’avait fait solidement amarrer, par précaution. Tous les espars brisés, les haubans enchevêtrés et les lambeaux de voiles avaient été triés et rangés, et les panneaux et sabords condamnés. Il avait fait mouiller trois ancres à l’avant et à l’arrière une ancre de fortune en toile pour le garder nez au vent.
Brock avait passé une mauvaise journée. Il avait mal à la tête et dans la poitrine, et savait qu’il aurait des cauchemars la nuit prochaine. Il aurait aimé boire, à rouler sous la table, pour oublier, pour se perdre. Mais il savait que le danger n’était pas loin. Il fit une dernière fois le tour du pont luisant de pluie avec une lanterne, puis descendit voir Liza et Lillibet.
« Voilà ton thé, trésor, lui dit Liza. Tu ferais bien de mettre quelque chose de sec. Tout est prêt, là. »
Sur la couchette, la vareuse, le pantalon, le chapeau et les bottes attendaient.
« Merci, grommela-t-il en s’asseyant devant son thé.
— Pa, dit Lillibet, tu veux jouer un jeu avec moi ? »
Comme Brock ne répondait pas, parce qu’il n’entendait rien, elle tira le bas de sa vareuse mouillée.
« Pa, tu veux jouer avec moi, dis, s’il te plaît ?
— Laisse ton père, lui dit Liza. Viens, je vais jouer avec toi. »
Elle emmena Lillibet dans la cabine voisine en remerciant Dieu que la paix ait été faite entre son homme et Struan. Brock lui avait raconté ce qui était arrivé et elle remerciait le Seigneur d’avoir exaucé ses prières. Le vent est un miracle, se dit-elle. Maintenant, tout ce qu’il faut c’est de la patience. Il y viendra bien, à bénir Tess. Liza demanda à Dieu de protéger Tess et Culum, et le navire et eux tous, puis elle s’assit et se mit à jouer aux dames avec Lillibet.
Dans l’après-midi, le cercueil de Gorth avait été placé dans un canot. Liza et Brock étaient allés au large et Brock avait récité le service funèbre. Quand il eut fini, il maudit son fils et jeta le cercueil à la mer. De retour à bord, Brock s’était enfermé à double tour dans sa cabine et il avait pleuré sur son fils et sa fille. C’était la première fois qu’il pleurait depuis qu’il était homme. Il avait perdu toute sa joie de vivre.
Durant la nuit, le vent et la pluie empirèrent. À l’aube, l’averse était diluvienne mais pas effrayante et la mer grosse mais pas menaçante.
Brock avait dormi tout habillé, et il monta sur le pont en bâillant, les yeux rougis. Il vérifia le baromètre. Il n’avait pas varié. Il le tapota de l’ongle, mais l’aiguille ne bougea pas.
« Bonjour, monsieur », dit Pennyworth.
Brock grogna une vague réponse.
« C’est simplement une grosse pluie, je crois », dit-il, troublé par l’attitude apathique de Brock.
Brock inspecta le ciel et la mer. Le plafond de nuages était très bas et cachait les montagnes de l’île, mais ce n’était pas extraordinaire.
Il se força à aller à l’avant vérifier les ancres. Les aussières tenaient bon. Il y avait trois ancres et trois cordages gros comme une cuisse d’homme. De
Weitere Kostenlose Bücher