Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Decker
Vom Netzwerk:
maître. Ce pays est le seul qui soit capable d’assurer un équilibre dans l’Europe centrale.
    En 1919, avant de signer le traité de Versailles qui allait réduire cet empire à la portion congrue et entraîner les tragédies que l’on sait, le cher Georges Clemenceau aurait sans doute été bien inspiré de lire le « petit livre violet » de l’ancien évêque d’Autun.
    Pendant que, sur les bords du Danube, Talleyrand tente vainement de freiner les exigences de l’Empereur, à Paris Kelly est effondrée. Elle a reçu la visite de son beau-frère, Archambaud, le cadet de Charles Maurice, qui lui a annoncé avec une mine de six pieds qu’il était vraisemblable qu’elle fût veuve.
    — Je tiens cette nouvelle de source sûre, avait-il ajouté. Il aurait été tué dans une embuscade sur le chemin qui le menait de Linz à Presbourg.
    Pendant deux jours on la vit alors, échevelée, hystérique, les yeux bouffis de larmes, courir la capitale, hanter les ministères pour essayer d’obtenir quelques informations. On lui répondit que le nom du grand chambellan ne figurait pas sur les listes funèbres mais que cela ne voulait rien dire. Qu’il fallait attendre.
    Attendre un courrier de Charles Maurice qui lui annonça bientôt qu’il se portait comme un charme et qu’il se languissait d’elle.
    Menteur !
    On sut par la suite que cette plaisanterie de mauvais goût avait été imaginée par quelque esprit malin du faubourg Saint-Germain, un quartier de la capitale dans lequel on vouait une haine farouche à celui qu’on appelait l’Usurpateur et à tous ses affidés.
    — Bah ! dira Talleyrand en apprenant sa résurrection, les langues de ce faubourg finiront par tuer plus de généraux que les canons autrichiens.
    Quant à son épouse, elle se remit d’autant mieux de ses émotions puisque, dans la foulée, elle apprit que non seulement elle n’aurait pas à porter le deuil mais qu’elle était devenue Altesse sérénissime.
    Catherine Worlée, belle Indienne blonde et ex-madame Grand à la vertu peu farouche, allait donc se transformer en princesse. Sur un coup de baguette magique que Napoléon maniait alors avec une rare décontraction !
    Au vrai, l’Empereur cumulait. En cette fin de décembre de 1805, il était à la fois magicien et père Noël.
    Du fond de sa hotte il sortit d’abord Lucques et Piombino, deux villes de Toscane, cadeau pour sa jeune soeur Élisa qui en devint princesse. Au tour de Pauline ensuite, il la fit duchesse de Guastalla. Quant à son frère Louis, il héritera bientôt le royaume de Hollande. De son côté, le fidèle Berthier sera nommé prince de Neuchâtel et Bernadotte recevra le duché de Pontecorvo.
    Et la distribution des étrennes s’achèvera avec Charles Maurice.
    — Voulant donner à notre grand chambellan et ministre des Relations extérieures Talleyrand un témoignage de notre bienveillance pour les services qu’il a rendus à notre Couronne, nous avons résolu de lui transférer la principauté de Bénévent, avec le titre de prince et duc de Bénévent...
    Si la surprise est bonne pour Charles Maurice, elle l’est beaucoup moins pour Pie VII. Car depuis des temps immémoriaux Bénévent, tout comme Pontecorvo, appartenait au Saint-Siège.
    — Bénévent est une enclave en territoire étranger, fait savoir Talleyrand au pape, elle est donc trop difficile à gérer par le Vatican. Sous un nouveau gouvernement et dans un pays si combustible, il vaut mieux ne pas garder d’étincelles.
    Non seulement il se garde bien de préciser que le territoire étranger en question ne l’est pas réellement puisqu’il s’agit du royaume de Naples qui appartient maintenant à Joseph Bonaparte, mais c’est tout juste s’il ne demande pas au pape de lui savoir gré de lui tirer une épine du pied.
    Soit, il a tout de même eu la correction de ne pas réclamer d’indemnités !
    Pie VII n’en aurait sans doute pas été surpris. Il savait qu’il pouvait s’attendre à tout avec cet évêque défroqué qui était devenu sa bête noire. S’attendre à tout, oui, et surtout au pire.
    Dès qu’il entre en possession de sa principauté, il s’aperçoit qu’elle est aux mains d’un général à la solde du roi Joseph.
    — Ah ! non ! se fâche-t-il. Je ne veux pas de militaires à Bénévent. Je veux prendre soin du bien-être des habitants. Si cette souveraineté a quelque prix pour moi, c’est surtout par l’espérance et le désir que j’ai

Weitere Kostenlose Bücher