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Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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innovations. Dans un pays comme le leur, où l’islam était d’implantation
récente, mieux valait suivre une maddhab [71] des plus strictes.
C’est donc conscients de l’importance de leur mission qu’ils revinrent en
Ishbaniyah et y répandirent la doctrine de Malik Ibn Anas. Ils le firent à la
grande fureur de Sa’sa Ibn Sallam al-Shami, le mufti de Kurtuba, disciple d’un
imam syrien, al-Awza’ai, infiniment plus tolérant et plus ouvert.
    Très vite, Sa’sa et ses partisans
furent, sous de fallacieux prétextes, écartés de la direction des affaires
religieuses tandis que leurs remplaçants, bien introduits à la cour, exerçaient
une influence dangereuse sur un émir dont la piété était décuplée par la
crainte de sa mort prochaine. Ces conseillers furent les initiateurs, en 178 [72] ,
d’une saifa commandée par Abd al-Malik Ibn Mughit et son frère Abd al-Karim. Si
les deux généraux réussirent à prendre Oviedo, la capitale d’Alphonse II,
et la réduisirent en cendres, ils s’égarèrent au retour dans une région
marécageuse où leurs soldats périrent par centaines, noyés ou victimes de
fièvres pernicieuses. L’année suivante, Abd al-Karim prit, seul, la tête d’une
nouvelle expédition qui s’empara de plusieurs places fortes et contraignit
Alphonse II à se réfugier dans un château dont Faradj Ibn Kinana ne
parvint pas à le déloger. Déçu par ces échecs, Hisham tomba malade et mourut le
3 safar 780 [73] ,
après avoir pris soin de désigner, pour lui succéder, non son fils aîné, Abd
al-Malik, mais son cadet, Abu I-Asi al-Hakam, âgé de vingt-six ans.
     

Chapitre IX
    Hisham ne fut guère pleuré par ses
sujets. Sa vie vertueuse inspirait plus le respect que l’affection et sa réclusion
volontaire derrière les murailles de son palais faisait que, pour nombre
d’habitants de la capitale, il était un quasi-inconnu. Son fils aîné, Abd
al-Malik, accepta sans rechigner sa mise à l’écart du trône. Il passait le plus
clair de son temps à al-Rusafa, entouré d’une cour d’éphèbes dont la compagnie
lui paraissait plus intéressante que la gestion des affaires publiques. Il
laissa donc al-Hakam recevoir l’allégeance de la population, exigeant toutefois
une augmentation substantielle de sa pension annuelle.
    Le successeur d’Hisham n’eut guère
le temps de profiter des bonnes dispositions de son frère. Ses oncles, Suleïman
et Abdallah, s’étaient jusque-là tenus fort tranquilles dans leur exil, fidèles
au serment qu’ils avaient fait de ne pas reprendre les armes contre le
souverain désigné par leur père, Abd al-Rahman. Ils s’étaient toutefois bien
gardés de préciser à Amr Ibn Zyad que cette promesse ne concernait pas les fils
d’Hisham. Après avoir vécu à Kairouan, Abdallah avait gagné Tahart où l’imam kharidjite [74] de la localité, Abd al-Wahhab Ibn Rustum, lui avait offert l’hospitalité. Ce
fut là qu’il apprit l’accession au trône de son neveu al-Hakam, immédiatement
tenu par lui pour un usurpateur. Il lui fallut à peine quelques jours pour
réunir plusieurs dizaines de cavaliers et s’embarquer avec ses deux fils, Ubaid
Allah et Abd al-Malik, pour l’Ishbaniyah où il fut plutôt mal accueilli par ses
anciens partisans qu’il avait omis de combler de cadeaux. Ballottés de cachette
en cachette, les comploteurs, la mort dans l’âme, se décidèrent d’agir comme
l’avait jadis fait Suleïman Ibn Yakzan Ibn al-Arabi. Ils prirent la route
d’Aix-la-Chapelle pour y solliciter l’intervention du roi de l’Ifrandja, Karlo
Ibn Pippin [75] ,
afin qu’il les aide à faire valoir leurs droits sur le trône d’Ishbaniyah.
    Informé de cette décision, le frère
d’Abdallah, Suleïman, ne cacha pas sa joie. Son rival ne serait pas de retour
de sitôt et il avait donc les mains libres pour agir. Délaissant sa retraite
dorée de Tingis, il débarqua à al-Munakab et, à la tête de djunds syriens,
marcha sur Kurtuba. Battu une première fois à bonne distance de la capitale, il
sema la terreur dans la région de Washkha et d’Istidjdja [76] avant de gagner
Marida où un chef berbère, Asbagh Ibn Wansus, lui avait proposé une alliance.
C’était en fait un piège. L’homme était un obligé d’Amr Ibn Zyad et celui-ci
lui avait soigneusement dicté la conduite à tenir. Le fils d’Abd al-Rahman fut
donc convié à un banquet à Marida où, conformément à son habitude, il s’enivra.
À son réveil, il

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