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Templa Mentis

Templa Mentis

Titel: Templa Mentis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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l’esprit depuis quelque temps, lui qui avait jusque-là pensé que les filles étaient avant tout capones mais querelleuses. Toutefois, son maître, ou plutôt sa maîtresse, ne correspondait pas du tout à ce dévalorisant portrait. De plus, alors qu’il les avait toujours évitées avec prudence, les jeunes filles commençaient à lui tirer le regard et il se sentait parfois rougir à leur contemplation. Oh, il savait fort bien pour quelle raison, les répugnantes exigences charnelles de la tenancière du Chat-Huant ne lui ayant laissé aucune illusion. Mais l’aubergiste n’était qu’une abjecte truie en chaleur, pas une damoiselle. L’insistante question le harcelait donc : comment convenait-il de se comporter avec une jeune fille ? Que lui dire ? Il interrogerait son maître à ce sujet. Plus tard.

    Les pensées de Druon suivaient un tout autre cheminement, bien moins badin. Sans en avoir vraiment conscience, il s’immobilisa devant l’éventaire du mercier, et détailla rubans et peignes de cheveux, chausses de femme 2 , troussoirs de vil métal ou d’argent, incrustés de pierres ou de perles, songeant que son travestissement masculin lui avait ôté tant de menus plaisirs de donzelle. Aussitôt, une petite femme aussi ronde que haute, à la mine réjouie, sortit en trombe de l’échoppe en beuglant :
    — Ça, votre mie vous picorera le bec de mamours si vous lui offrez un cadeau. Qui sait… peut-être même mieux, ajouta-t-elle dans un clin d’œil complice et un brin escrillard 3 . Allez, j’aime les amourettes et vous fais bon prix. Choisissez, messire.
    Il fallut quelques instants à Druon pour comprendre et se remettre dans la peau d’un jeune chevalier mire itinérant.
    — C’est que… maîtresse, je n’ai point de… (Se tournant vers Huguelin, il demanda :) Un joli présent pour notre gracieuse hôtesse ?
    — Belle idée !
    Ils choisirent un peigne de cheveux, en corne claire, découpé de fines volutes.
    1 - De ruptura  : briser, retourner la terre, donc à l’origine les paysans puis les non-nobles.

    2 - Sorte de mi-bas que l’on serrait sous le genou.

    3 - Nous a laissé « égrillard ».

XXVIII
    Nogent-le-Rotrou, novembre 1306
    C Céleste de Mirondan, dite La Mouche, s’était installée à l’auberge du Grand-Arroi 1 , enseigne très optimiste pour ne pas dire fallacieuse pour qui connaissait la modicité du lieu. Néanmoins, maître Arroi, un petit bonhomme nerveux, atrabilaire au point d’être jaune de visage, ne s’en laissait pas compter et se faisait fort d’agripper les avinés, les excités ou les cherche-noises par la tunique avant de les propulser vers la rigole centrale de la ruelle, avec ordre de ne jamais montrer à nouveau leur hure 2 céans. Aussi les clients, de modestes moyens, se tenaient-ils à carreau 3 , nulle autre auberge de la ville ne leur offrant un repas et une piquette somme toute agréables à si raisonnable débours 4 . Lorsqu’un courageux s’étonnait de la force de maître Arroi, de stature pourtant guère impressionnante, celui-ci répondait invariablement :
    — Mon gars, quand on a résisté aux tornioles 5 d’maîtresse Arroi, qu’était gironde, bonne commère mais vive de sang, leste d’main et deux fois lourde comme moi – paix à son âme – on résiste à tout !
    Désireuse de se fondre dans le paysage, Céleste avait troqué ses atours voyants de puterelle contre des vêtements de commerçante aisée.

    Messire de Nogaret s’était réjoui que Gauthier Brandillon, qui se faisait donner du « monsieur de Brazilon », le beau nervi choisi par sa lointaine cousine, ait envoyé le coquin d’Alard Héritier rejoindre son maître, le diable, au point de se faire narrer la scène à deux reprises, saluant l’issue d’un petit applaudissement satisfait.
    — En voilà un qui ne vous trahira pas et ne vous tirera plus de belles livres*, mon respecté cousin, avait conclu La Mouche.
    — Êtes-vous bien assurée qu’il ne suivait pas la piste de cette Héluise Fauvel ? s’était quand même inquiété le conseiller du roi.
    — Aussi sûre que je ne suis plus pucelle, avait rétorqué Céleste dans un rayonnant sourire.
    — Ardu à contester, en effet, avait pesté Guillaume de Nogaret, prude.
    — Ce gredin vous bernait sans vergogne. Un manipulateur déhonté. Peu intelligent, de surcroît, ironisa-t-elle.
    — La suite ?
    — La damoiselle Fauvel, quoi d’autre ? Ne me tenez pas rigueur

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