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Templa Mentis

Templa Mentis

Titel: Templa Mentis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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de mémoriser le nom.
    N’y tenant plus, dévorée de curiosité et de gourmandise, elle avait léché le mince cône de sel indien 13 acheté à prix d’or par son maître pour l’offrir à sa dame, dont il ne doutait pas qu’elle lui donnerait bientôt un fils. La servante avouait en avoir tremblé d’émotion tant son goût se révélait suave. Elle se repentait amèrement.
    Sans doute encore atterré par la confession qui avait précédé la sienne, un manœuvrier 14 avouant le viol d’une petite gueuse, le père Simonet avait ordonné une pénitence extérieure choisie 15 à la servante qui avait rompu sa gourmette 16 de bien bénigne façon. Elle avait donc opté pour les prières.
    Sa lecture se poursuivit. Son regard effleura la confession d’Anchier Vieil, une peine diffuse l’envahissant. Le secrétaire du bailli avait voué, vouait toujours, une dévorante passion à une jeune dame de haut de Nogent-le-Rotrou, rencontrée dans le cercle d’amis du seigneur Louis d’Avre. Une femme mariée dont il ne citait pas le nom, passion réciproque avait-il cru lorsque la dame avait manifesté son intérêt. S’étaient ensuivies des heures de fièvre, volées en profitant de l’absence de l’époux. Jusqu’au jour où elle avait congédié Anchier, d’insultante manière. Elle se savait grosse, peut-être du fils qu’elle comptait offrir à son vieux, très riche et très amoureux mari stérile mais qui, bien sûr, refusait de l’admettre. Son besoin d’un géniteur afin de plaire à son époux cessait. Anchier avait avoué au prêtre avoir tout tenté pour la reconquérir, certain qu’elle l’aimait, mentait afin de l’éloigner d’elle et le protéger ainsi du courroux du mari escorné 17 s’il venait à apprendre la traîtrise. Amusée, satisfaite d’avoir obtenu ce qu’elle cherchait, elle ne l’avait guère épargné.
    Au terrible chagrin d’amour d’Anchier s’était ajoutée une brûlante blessure d’humiliation qui lui avait ôté le goût du dormir et même du vivre. De sotte façon, il avait alors espéré que Dieu lui offrirait un mince réconfort : que la belle rouée au cœur sec accouche d’une fille. Mais ce piètre soulagement lui avait été refusé. Un fils était né. L’époux de la traîtresse, débordant de reconnaissance à la vue de l’hoir 18 tant désiré, l’avait couverte de présents. Le fils d’Anchier. Son fils qui lui était refusé et qu’il ne serrerait jamais contre lui.
    Anchier avait soudain songé que l’univers entier se liguait contre lui, même son Créateur. N’y tenant plus, se détestant, se méprisant, il s’était tranché les veines un soir, ajoutant l’impardonnable péché du suicide au reste 19 .
    Druon passa au commentaire du prêtre transcrit par Jean Le Chauve :
    « Pénitence : cinq neuvaines et une généreuse offrande pour l’église. Je ne pouvais imaginer sentence plus sévère puisqu’il regrette amèrement son acte insensé. Certes, il pécha grandement mais fut encore plus puni par l’abandon. Quant à ce profond désespoir que j’ai senti en lui, il ne le quittera jamais. Pourquoi cette dame retorse qui savoure sa victoire lui valant respect, admiration de tous et fol amour de son époux ? Pourquoi cet Anchier que le remords et la peine rongent ? Pour la même faute partagée. »
    Druon lâcha un long soupir qui fit relever la tête à Huguelin.
    — L’âme humaine vous déplaît-elle, mon maître ?
    — Non. Elle est parfois fort belle mais bien douloureuse. (D’un ton plus ferme, Druon ordonna :) Ne te laisse ainsi distraire. Continue ton apprentissage.
    Le garçonnet s’exécuta.
    La bonté ferme et lucide du père Simonet transparaissait dans toutes ces pages, expliquant l’estime et l’affection que lui témoignaient ses ouailles.

    Pourtant, quelques lignes plus loin, Druon découvrit la première preuve de sa réputation de fougue. Le prêtre s’emportait, sans pour autant expliquer les raisons de son ire :
    « Me croit-il bien fol ou privé d’esprit, ce gredin 20 , ce vaurien en élégant appareillage ? Que me chaut son titre de seigneur d’Errefond dont je finis par soupçonner qu’il l’usurpa ou le vola aux dés. Oublie-t-il que je suis un Bonneuil et que mon sang écrase le sien par sa valeur et sa noblesse ? Il ne serait qu’un risible paltoquet 21 si je ne sentais le vice couler dans ses veines. Je me suis rendu en ses terres, afin de le pousser dans ses retranchements.

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