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Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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siennes regagneraient le temps passé. Elle força l’allure, à en avoir le souffle cisaillé, furieuse contre sa nature humaine qui l’emportait parfois sur celle de la fée. Il fallait qu’elle la rattrape, qu’elle sache la vérité, à propos de cette femme empaquetée, à propos de Mounia. Savoir ce qui l’attendait à l’autre bout de cette coursive.
    Elle y parvint sans avoir obtenu de réponses. Chercha le mécanisme d’ouverture du passage, l’enfonça. Les battements du cœur désordonnés, elle se faufila sous la courtine. Enfin elle la vit qui pénétrait sous un portique illuminé.
    *
    Renonçant à l’interpeller, elle reprit sa course.
    Bien que la porte restée ouverte l’ait incitée à la méfiance, la Khanoum eut un discret mouvement de recul en apercevant cette silhouette à genoux près de l’Égyptienne, le front courbé au-dessus de ses mains jointes, des sanglots plein la gorge.
    Les vêtements qu’elle portait ne lui évoquèrent rien de familier.
    Un instant, sa douleur si poignante lui pénétra le cœur, mais la vision d’horreur qui l’avait saisie dans la taverne la ramena à sa propre sécurité. Cet inconnu avait tué et elle serait la prochaine à périr, si elle devait en croire la vision de la Bohémienne.
    Par chance, il ne l’avait pas remarquée.
    Son pied glissa en silence derrière ce dos voûté. Retenant sa respiration, elle leva le poignard emprunté à son eunuque.
    — Reste-moi, maman, s’il te plaît, reste-moi, entendit-elle gémir à l’instant de frapper.
    Sa main trembla, indécise.
    La fraction de seconde suivante, elle était désarmée. Par une boule de poils qui lui sauta sur les épaules, les gencives en avant. Autant que par le nom que, derrière elle, on venait de prononcer.
    Khalil se retourna à l’appel d’Elora et du cri de guerre de Bouba. Il ne se rendit pas compte à quoi il venait d’échapper. Il s’étonna seulement de voir une femme retenue par les épaules, le poignet en sang. Une femme qui le fixait avec de grands yeux hébétés.
    Là n’était pas sa priorité.
    Il se contenta de gémir.
    — Elle m’a reconnu. Moi. Elle m’a reconnu, Elora. S’il te plaît, sauve-la !
    La Khanoum porta la main à sa bouche pour étouffer un petit cri. Relâchant sa tenaille, Elora se pencha à son oreille.
    — Vous n’avez rien à craindre de nous, vous le comprenez, n’est-ce pas ?
    La Khanoum hocha la tête. Bouleversée par la ressemblance qui, de la mère au fils, venait d’emporter ses derniers doutes.
    — Vous pouvez rester si vous le souhaitez, lui accorda encore Elora avant de rejoindre la couche et d’examiner Mounia.
     
    Rassuré par sa présence, certain de ses miracles, Khalil récupéra Bouba à son cou pour lui arracher le poignard qu’il tenait en main.
    — Où as-tu pris ça ? le gronda-t-il en reniflant.
    Le petit singe tendit un doigt accusateur vers la Khanoum, les yeux humides d’une émotion qu’elle ne cherchait plus à refouler. Il mit quelques secondes à comprendre.
    — Vous vouliez me tuer ? Pourquoi ?
    Elle chercha à répondre mais aucun son ne franchit ses lèvres. Elle se racla la gorge, gargouilla :
    — Les janissaires… en bas…
    Khalil soutint l’accusation avec tristesse. Le front soucieux, Elora se redressa pour répondre à sa place :
    — Ce n’est pas lui, mais la créature que j’ai évoquée tantôt. Vous l’avez déjà vue ici, n’est-ce pas ?
    — Est-ce bien le moment ? s’inquiéta Khalil en entendant le souffle de Mounia s’accélérer.
    Elle se tourna vers lui.
    — Ma magie est sans effet, Khalil. Il faut que je sache ce que Marthe lui a fait, tu comprends ?
    Le sang quitta ses joues. Il baissa le nez sur son angoisse revenue.
    La Khanoum les fixa tous deux avec gravité. Beaucoup d’éléments lui échappaient, mais rien ne l’empêcherait ce jourd’hui de réparer le tort qu’elle avait causé en enfermant Mounia, en refusant son instinct de mère, en la laissant se consumer.
    — Elle s’est présentée au palais il y a quelques jours pour me remettre une fiole, semblable à celle que possédait Mounia, en me recommandant de lui en faire boire le contenu si son état venait à s’aggraver.
    Le visage d’Elora exprima tant de perplexité qu’elle crut bon d’ajouter, rattrapée par la culpabilité :
    — Je l’aurais fait si mon fils ne t’avait remarquée… Elle souffrait depuis si longtemps… et lui aussi de la voir

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