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Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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J’ai peine à croire avoir tenu dans si petit espace. Je suis si grand déjà… Nous avons sensiblement le même âge avec Petit Pierre et je le dépasse de deux têtes ! Mais vous l’avez remarqué, bien sûr… Je comprends qu’il vous soit difficile de me regarder autrement que comme un homme, ajouta-t-il pour lui pardonner.
    La finesse d’esprit de son fils n’avait d’égale que sa générosité. Elle s’en voulut soudain de sa maladresse passée. De sa réserve passée.
    — Algonde prétend que c’est à cause du pouvoir des Anciens, comme Elora et Khalil. J’ignore d’où tu le tiens, mais cela doit être vrai, dit-elle avant de tordre la bouche et d’ajouter : Pourtant, au moment de te mettre au monde, j’étais grosse de moitié !
    En trois semaines Hélène s’était empâtée d’une bonne dizaine de livres supplémentaires, ajoutant encore à sa difformité. Il ne releva pas. Au contraire, trouva la meilleure des excuses pour ne pas la froisser.
    — Gersende craint des jumeaux. Vous l’a-t-elle dit ?
    Hélène acquiesça, avant d’ajouter, soucieuse :
    — Elle a dû t’en prévenir aussi je suppose, ce n’est pas sans risque… Es-tu inquiet ?
    Il darda sur elle la franchise de ses yeux d’océan.
    — Non. Tout se passera bien, mère.
    Un instant de doute, puis elle lui donna une petite tape sur le bras.
    — Tu n’en sais rien, en vérité.
    Il laissa échapper un rire clair, dans lequel, une nouvelle fois, Hélène retrouva les accents de son père.
    — Je l’avoue. Mais j’ai confiance.
    — Mauvaise raison, lui objecta-t-elle.
    — La meilleure du monde, maman, dit-il en l’embrassant au front.
    Elle rosit. Il s’écarta pour la couvrir de tendresse.
    — Malgré les circonstances, je veux vous voir heureuse… Je veux vous laisser heureuse à l’heure de mon départ.
    Rattrapée par cette perspective, elle se mit à trembler et ramena par réflexe la couverture sur son ventre. Il y posa de nouveau les doigts.
    — Vous le craignez et moi aussi, en vérité. Mais il est incontournable. Je suis né pour cela. Vous m’avez mis au monde pour cela, protégé de Marthe pour cela.
    Hélène baissa la tête, de nouveau au bord des larmes.
    — Je sais, mon fils. Je sais. C’est une chance déjà pour moi de te connaître, de partager ces moments…
    Elle marqua un temps, porta le revers de sa main à ses lèvres pour les empêcher de trembler, puis la laissa retomber. L’heure n’était plus à la fierté.
    Elle s’obligea à le regarder en face.
    — Si ton père avait vécu, je ne serais pas revenue ici. Non que l’envie m’en ait manqué, mais Elora craignait que cela me soit trop douloureux. Elle avait raison. Si je suis restée en retrait de toi ces derniers jours quand te voir au mariage m’a comblée, c’est à cause de cela, Constantin. J’espérais… je ne sais pas… souffrir moins peut-être de ne pas trop nous lier. C’était absurde. J’en suis épouvantée…
    Il essuya une larme qui, toute de dignité, avait glissé sur sa joue.
    — Vous ne nous perdrez pas, mère. Nous serons toujours à vos côtés par la pensée. Et puis diable ! une fois tout danger écarté, vous pourriez nous rejoindre…
    Elle se troubla plus encore.
    — Je ne sais pas, Constantin. Je ne l’avais pas envisagé… Peut-être.
    Elle se sentit regagnée par une sensation de chaleur. L’idée d’un possible. Inespéré.
    — Oui… Peut-être.
    Il sourit.
    — Je ne remplacerai jamais mon père à vos côtés, malgré toute ma tendresse, mais je sais ce qu’il aurait souhaité. Qu’un autre vous chérisse. Un autre pour lequel vous éprouverez confiance et respect.
    Pour seule réponse à sa prévenance, Hélène grinça.
    — Luirieux en est tout l’opposé.
    L’œil de Constantin s’assombrit.
    — Rassurez-vous. Je serai de ceux qui l’empêcheront de vous tourmenter encore. Je vous aime, maman. N’en doutez jamais.
    — Toi non plus mon fils. Toi non plus. Jamais, répéta Hélène, bouleversée d’une joie simple.
    Inattendue.
    Ses bras s’ouvrirent et Constantin s’y blottit avec au cœur cette part d’enfance qu’il y avait soigneusement préservée.
    Sous leur fenêtre, au-delà du mur qui séparait les deux cours, agenouillée pour se ramener à sa hauteur, Algonde étreignait de même Petit Pierre, bouleversé.
    Elle l’avait trouvé en cherchant Constantin.
    Le fauconnier était absent lorsque les deux garçons avaient ramené

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