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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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rentrer. Sur le versant
méridional des Alpes, dans une petite ville du nom de Tridentum [114] ,
ils avaient eu la surprise de croiser un convoi de sel tout à fait identique à
ceux qu’ils avaient vus si souvent traverser leur ligne de siège. Ce convoi de
mules se dirigeait au nord, mais les animaux étaient inexplicablement chargés
de leur cargaison intégrale.
    — Alors bien sûr, nous n’avons pas été bien longs à
reconnaître nos camarades déguisés, expliqua Gudahals, hilare. Et vous êtes
bien placé pour savoir, Saio Thorn, ce que les mules transportaient,
cette fois !
    Les soldats grimés en muletiers lui avaient expliqué
comment, chargés eux aussi de traquer les conspirateurs, ils avaient poussé
jusqu’à Tridentum pour y passer la nuit, et comment ils y avaient trouvé de
quoi éveiller leurs soupçons. Le marchand et sa femme s’étaient trahis tout
seuls, d’abord en reconnaissant trop ostensiblement les mules, puis en
interrogeant un peu trop vivement les conducteurs : d’où venait le convoi,
et pourquoi n’avait-il pas délivré ses marchandises ?
    — Vous pensez bien que ces soldats n’ont pas tardé à
leur mettre le grappin dessus, continua Gudahals avec enthousiasme. Ils
venaient de les arrêter quand nous sommes arrivés avec notre prisonnier Georgius.
    Le centurion poursuivit en expliquant que s’il avait fallu
des preuves supplémentaires de l’implication du couple de marchands dans le
trafic, ils en donnèrent de suffisantes. Car même s’ils ne parlèrent pas, les
regards qu’ils échangèrent avec Georgius étaient parfaitement éloquents. Alors,
juste pour s’amuser de leur déconvenue, les soldats leur avaient révélé le
véritable contenu des sacs de sel. Les trois coupables étaient devenus pâles
comme la mort et la jeune femme avait tenté de crier quelque chose à Georgius,
quand la main levée de son mari l’avait subitement réduite au silence.
    — Il avait à peine bougé que je l’ai embroché,
fanfaronna Gudahals. Et la jeune femme aussi, dans la foulée. Les deux
conspirateurs ont été exécutés sur-le-champ, Saio Thorn, comme vous
l’aviez ordonné.
    — Comme je l’avais ordonné…, répétai-je, le cœur serré.
    Car les mots du fils de Georgius m’étaient revenus. Sa sœur
avait épousé un marchand… et quitté la Vallée aux Échos…
    — Comme nous n’avions plus besoin des mules et de leur
chargement de viande avariée, ajouta Gudahals, nous avons tout laissé en plan
sur place, et sommes redescendus ensemble.
    — Ces conspirateurs, demandai-je, vous avez su leurs
noms ?
    — Le marchand s’appelait Alypius. C’était un homme
relativement aisé, possédant suffisamment de magasins, d’écuries et de forges
pour ravitailler les nombreux convois qui faisaient l’aller-retour à travers
les Alpes. Quant à sa femme, c’est le prisonnier Georgius qui a fini par nous
dire son nom. Elle se nommait Livia. Je suis sûr que Georgius pourrait vous en
dire beaucoup plus, Saio Thorn, mais nous ne lui avons pas posé de
questions sur le trajet du retour, vu que vous nous aviez recommandé de le
ménager au maximum.
    — Oui, en effet, marmonnai-je. Cette fois, vous avez
suivi mes ordres à la lettre, force est de le constater, Gudahals. Je dirai
tout le bien que je pense de vous à Théodoric.
    Je n’étais plus tout à fait aussi satisfait de moi-même.
Comme cela m’était déjà si souvent arrivé par le passé, j’étais directement
responsable de la mort d’un de mes anciens amis. Je me remémorai comment
j’avais gravé le nom de Livia et le mien dans la glace d’une rivière alpine et
comment j’avais souhaité le meilleur à cette jolie petite fille, pour sa vie
future. Même confronté à l’évidence qu’au cours de cette guerre fraîchement
achevée, Livia avait combattu dans le mauvais camp (continuant, une fois
devenue femme, à obéir aux stupides exigences de son misérable père), je
demeurai meurtri de ce qui lui était arrivé.
    J’étais si abattu et déprimé que je n’eus pas le cœur
d’aller rendre visite à Georgius dans sa geôle, ni pour me réjouir de la
déconfiture de ce vieux nauthing, ni pour enquêter sur la façon dont il
avait contraint sa famille à se mettre au service d’Odoacre, ce réprouvé. Je
n’assistai même pas à l’audience au cours de laquelle Théodoric condamna
Georgius à être turpiter decalvatus, « en guise de marque
perpétuelle d’infamie » et

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