Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
régneraient ensuite sur un même pied d’égalité.
Mais Jean proféra alors un mensonge délibéré, affirmant que Théodoric avait
également accepté cet accord. Puis la mort l’emporta, vraisemblablement en
enfer. Mais la forfaiture survécut et s’amplifia – l’Église sut y
veiller – et cette assertion finit par être largement partagée dans tout
le royaume : Théodoric avait renié son serment. Il s’était parjuré
doublement, à l’égard d’un saint homme et d’un roi légitime, pour faciliter son
entrée dans Ravenne où il avait traîtreusement assassiné un homme désarmé, un
vieillard sans défense qui avait eu le tort de croire à sa parole.
    Or personne ne pouvait réfuter l’accusation, en dehors de
Théodoric et de moi-même. Et notre parole n’eut que peu de poids, comparée à
celle d’un prêtre de haut rang sur le point d’être soumis au Jugement de
l’au-delà. Ils furent bien peu à accepter l’idée que Jean avait menti, se
vouant ainsi délibérément à la damnation. Je savais pourtant que tel était le
cas et qu’il s’était justement appuyé sur cette circonstance pour renforcer le
poids de son mensonge. Pour son Église, Jean avait certes commis un acte
hautement répréhensible, mais il s’était en quelque sorte sacrifié. Sans aucun
doute un ultime acte de bravoure. Il en récolta un enterrement avec tous les
honneurs et le respect de sa confrérie. J’espérai moi, que l’enfer le
traiterait avec un minimum de clémence.
    Certaines des actions les mieux intentionnées de Théodoric
donnèrent aux catholiques des occasions de l’accuser de faute, ou d’en rejeter
sur lui la responsabilité quand ils ne parvinrent pas à l’en rendre directement
responsable. Lorsqu’il envoya ses troupes à Vérone démolir la vieille chapelle
de Saint-Stéphane qui y menaçait ruine, une immense clameur s’éleva bien sûr du
chœur des ecclésiastiques. Ils ne furent nullement ébranlés par les patientes
explications qu’il leur fournit, selon lesquelles la démolition de cette
chapelle était nécessaire au renforcement du mur de défense de la cité. Des
protestations encore plus indignées jaillirent lorsque Théodoric se mit en tête
d’employer des Juifs à son service. Il recruta un certain nombre de marchands
et leur confia certaines missions comptables, pour la bonne raison que les
Juifs, quelle que fût leur habileté à manier les chiffres au bénéfice de leurs
affaires, n’en étaient pas moins fiables et scrupuleux dans la pratique du
calcul et des additions de chiffres. Leur efficacité dans ce domaine n’était
plus à démontrer.
    Cette décision amena Laurent, l’évêque catholique de
Mediolanum, à se rendre jusqu’à Ravenne pour hurler d’une voix de
tonnerre :
    — Des chrétiens auraient tout aussi bien pu s’en
charger ! De quel droit leur préférez-vous d’abominables Juifs ?
    Théodoric lui rétorqua placidement :
    — Les travailleurs chrétiens, évêque Laurent, se
préoccupent avant tout du droit qu’ils ont de ne pas travailler un jour sur
sept. Les Juifs, quant à eux, s’intéressent essentiellement aux six autres
jours, ceux où l’homme est censé travailler. Quant à vous, ne songez jamais
plus à élever la voix devant moi.
    Il va sans dire que les Juifs, tant dans les cités d’Italie
que partout ailleurs à travers le monde, ont toujours été réprouvés et injuriés
par leurs voisins chrétiens, pour une seule et unique raison : non parce
qu’ils sont d’une religion différente, ni même parce qu’ils portent le blâme
d’avoir fait exécuter Jésus. Ils sont tout simplement généralement devenus plus
prospères. Cela dit, à compter de cet instant, les Juifs d’Italie se mirent à
souffrir de maux bien pires que de simples insultes. Les catholiques, bien
qu’ils fussent autorisés à prêcher et à fulminer contre ces « hérétiques
d’ariens », ne pouvaient évidemment lever la main contre une force
d’occupation armée. Rien ne les empêchait en revanche de le faire contre les
Juifs, pacifiques, sans armes, par conséquent vulnérables. Et ils ne s’en
privèrent pas.
    Dans la propre capitale de Théodoric, Ravenne, une foule fut
poussée à l’émeute. Apparemment par un citoyen chrétien révolté par le taux
d’intérêt demandé par un Juif qui lui avait prêté de l’argent. Il advint qu’au
cours de l’échauffourée, la synagogue fut incendiée et gravement

Weitere Kostenlose Bücher