Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
glorifier, et même de l’admirer.
    — Qu’est-ce que tu racontes ?
    Je n’avais jamais eu jusque-là l’occasion de m’entretenir
avec Théodoric au sujet de la religion en général et du christianisme en particulier,
et j’étais profondément stupéfait d’entendre le roi proférer un tel sacrilège.
    — Réfléchis, Thorn. On nous explique que pour racheter
nos péchés, à nous autres mortels, Jésus a vaillamment enduré sur sa croix
d’inexprimables souffrances. Mais Jésus savait déjà qu’au terme de cette mort,
il rejoindrait directement le paradis, et y partagerait le trône céleste,
jouissant de la vie éternelle et de la vénération de toute la Chrétienté. Tu ne
vois pas ? Il ne risquait absolument rien ! La plus misérable des
mères est plus méritante que lui. Rien que pour mettre au monde un enfant, elle
endure la même agonie. Mais en admettant qu’elle doive mourir de cette
souffrance, elle ne sait rien, elle, du sort qui l’attend, et n’a aucune
assurance que son sacrifice lui vaudra le paradis. Ne, ni allis. Elle
est bien plus courageuse que Jésus a pu l’être, bien plus altruiste aussi, et
mérite infiniment plus de respect, de considération et de louanges.
    — Je pense que tu pousses peut-être les choses un peu
loin, mon vieil ami, tempérai-je. Cependant, dans une certaine mesure, je
partage ton point de vue. Jamais je n’avais réfléchi à cette comparaison, je
l’avoue. D’ailleurs, je me demande si c’est déjà venu à l’idée d’un chrétien.
Cela dit, laisse-moi espérer, Théodoric, que tu ne fais pas profession de
répandre ces idées n’importe où, hors du cercle de tes amis…
    — Bien sûr que non, fit-il avec un rire triste. Je n’ai
aucune tendance suicidaire, crois-moi. En tant que roi d’une nation chrétienne,
je me dois de respecter les croyances de mon peuple, quelles que puissent être
par ailleurs mes opinions personnelles.
    Il exhala un soupir dévastateur.
    — Un roi doit toujours faire preuve de diplomatie. Je
dois même me retenir de botter les fesses du vieux Saio Soas quand il suggère
que la mort d’Aurora pourrait, en définitive, avoir été une bonne chose.
    — Une bonne chose ? m’exclamai-je. Comment ce
sans-cœur, cette vieille peau, cet insensible fagot sec, peut-il oser dire…
    — Une bonne chose pour les intérêts de mon peuple. Pour
la succession royale, si tu préfères. Soas laisse entendre qu’une nouvelle
compagne, ou mieux, une épouse royale légitime, pourrait m’apporter un héritier
mâle, et non plus seulement des filles.
    —  Ja, c’est une chose à prendre en compte,
concédai-je.
    — Dans le même temps, juste au cas où ma seconde fille
s’avérerait être mon dernier enfant, je lui ai choisi un nom en l’honneur de
notre nation. Elle s’appellera Thiudagotha, « Celle du Peuple Goth ».
    — Un nom royal, constatai-je. Je suis sûr qu’elle saura
le mériter.
    — Mais akh, cette chère Aurora va me manquer.
C’était une femme facile à vivre. Pacifique, tranquille. Elles ne sont pas
nombreuses dans ce cas. Je doute que Soas m’en trouve une pareille, bien qu’il
soit déjà occupé à dresser une liste des princesses disponibles. Il espère m’en
sélectionner une qui, me liant à quelque puissant monarque, apporterait dans sa
corbeille de mariée une alliance avantageuse pour les Ostrogoths. Cela dit,
pour qu’un tel marché soit équitable, il faudrait que je songe moi-même à être
un roi un peu plus puissant que je ne suis. Nous ne saurions nous contenter,
moi et mon peuple, d’être les obéissants chiens de garde de Zénon.
    Je m’éclaircis la gorge et commençai avec
circonspection :
    — En venant ici tout à l’heure, Théodoric, je
réfléchissais. Cela fait un moment que tu n’as pas fait – ni moi, du
reste – une conquête digne de ce nom. Tu me disais naguère, tu t’en
souviens : Huarbodáu mith blotha ! Force est de constater que
depuis…
    —  Ja, ja, marmonna-t-il. Je n’ai même pas poussé
mes hommes à écraser les trois ou quatre dernières bravades de cet insoumis de
Strabo. Je sais, je sais tout cela…
    — Pas plus que nous n’avons accompagné les hommes, lui
rappelai-je, lorsqu’ils sont allés soumettre les turbulents Suèves, que j’avais
repérés en maraude dans les plaines de l’Isère. Est-il possible, Théodoric, que
nous ayons tous deux été, comme tu le disais, « corrodés par la rouille de
la

Weitere Kostenlose Bücher