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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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nous aurons atteint l’âge de Fillein et de Baúhts.
Maintenant, charmante enfant, si nous dormions ?
     
    *
     
    Le lendemain matin, Fillein, qui souhaitait découvrir les
prises qu’il avait faites dans les filets à oiseaux tendus parmi les joncs du
marais, m’invita à venir avec lui. Swanilda se proposa de tenir compagnie à
Baúhts près de la cheminée et de l’aider dans son ouvrage de couture : la
vieille femme admettait que sa vue n’était « plus aussi bonne
qu’autrefois ».
    — De même pour vous, vénérable Fillein. Votre force ne
doit plus être ce qu’elle était. Si vos filets sont loin, montrez-nous juste le
chemin. Nous irons les inspecter, Lombric et moi.
    —  Vái, j’ai beau être d’un grand âge, certains
ont été plus vieux encore. Le roi Ermanareikhs, par exemple, a atteint cent dix
ans. Et il aurait pu vieillir encore, s’il ne s’était suicidé.
    — Ermanareikhs ? De quel roi s’agissait-il
donc ?
    Comme on pouvait s’y attendre, la vieille Baúhts s’empressa
de fournir son surnom, et déclara d’un air concentré :
    — Ah, Ermanareikhs, maintenant. Ce roi-là, beaucoup
l’ont surnommé l’Alexandre le Grand des Goths.
    Mais elle n’avait aucun commentaire à faire à son sujet,
aussi attendis-je d’entendre conter par Fillein l’histoire de ce roi, tandis
que nous partions, lui et moi, découvrir ses filets. Nous descendîmes de la
butte et traversâmes plusieurs champs à l’herbe duveteuse d’un vert argenté. Au
départ, le sol était assez ferme sous nos pas, mais cela ne dura pas. Il ne tarda
pas à devenir bourbeux puis de plus en plus fluide, et bientôt nous dûmes lever
bien haut les pieds, chacun de nos pas s’arrachant à la vase collante dans un
bruyant chuintement mouillé. Nous étions à présent profondément enfoncés dans
des roseaux nous dépassant de plusieurs têtes, et tandis que nous les écartions
du bras en nous glissant entre eux, des grenouilles bondissaient sur notre
chemin, des serpents d’eau s’éloignaient en ondulant, des échassiers prenaient
leur envol d’un air furieux. Malgré son grand âge et son apparente fragilité,
Fillein avançait avec une énergique obstination, et c’est avec admiration que
j’écoutai la suite de son récit :
    — Vous m’avez interrogé au sujet d’Ermanareikhs,
Maréchal. Dans ma jeunesse, j’ai souvent entendu mes aïeux raconter ce
qu’eux-mêmes avaient appris des leurs, et j’ai appris à tout retenir. Voici
donc ce que j’ai mémorisé. Ermanareikhs était le roi qui conduisit les Goths du
Nord vers les Bouches du Danuvius, ici même. Cette terre s’appelait déjà la
Scythie, mais elle n’est plus habitée, de nos jours, par ces dégénérés de
Scythes. Pour faire de la place à son propre peuple, Ermanareikhs repoussa ces
derniers vers la Sarmatie, où leurs descendants vivent toujours de sordide
façon.
    —  Ja, j’ai entendu de curieuses histoires au
sujet de ce peuple, naguère puissant, que furent les Scythes.
    Fillein approuva de la tête et continua :
    — Cependant, avant que les Goths n’arrivent jusqu’ici,
ils avaient dû traverser les terres de plusieurs autres peuples. Ermanareikhs
en avait profité pour leur faire accepter les Ostrogoths, à la fois comme leurs
supérieurs et leurs protecteurs. De fait, il était devenu le roi d’autres
peuples que les Ostrogoths. D’où cette comparaison avec Alexandre le Grand.
Malheureusement, tous ses exploits furent réduits à néant par sa seule et
unique défaite. De leurs lointains repaires de l’Est, les Huns fondirent sur
eux et Ermanareikhs, âgé de cent dix ans, fut incapable d’organiser une défense
adéquate. Devant la victoire des Huns, il s’infligea lui-même la sentence que
méritait son échec et s’ôta la vie. Maintenant, Saio Thorn, faites
attention. Suivez bien mes traces. De chaque côté s’ouvrent de redoutables
sables mouvants.
    Sur son invitation, je lui emboîtai le pas. Mais au cours de
son récit, mon scepticisme n’avait fait que croître, aussi objectai-je :
    —  Gudisks Himins, vieil homme, mais ce roi
aurait dû vivre au moins deux cents ans pour connaître tous ces événements,
depuis l’arrivée des Goths sur ces terres jusqu’à leur défaite contre les
Huns !
    Fillein répliqua avec pétulance :
    — Si vous savez déjà tout ce qu’il faut savoir,
pourquoi sollicitez-vous le peu que je connais ?
    — Pardonnez-moi, vénérable Fillein. Il me

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