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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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J’étais jeune, alors.
    Swanilda, tout aussi songeuse que je l’étais, intervint à
son tour :
    — Vous et votre épouse Baúhts êtes donc mariés depuis
plus longtemps que cela encore…
    Il sourit et hocha la tête.
    — Et tout ce temps-là, nous l’avons vécu ici, ensemble.
Je suis heureux de pouvoir me souvenir de la période où j’étais soldat. Mais je
ne vous cache pas que je fus soulagé, aussi, d’être blessé sur le champ de
bataille, assez gravement pour être réformé… et venir retrouver ma chère
Baúhts. C’est donc ici que nous sommes installés depuis, sous ce même toit, sur
cette terre jadis mise en valeur par les pères des pères de nos pères.
    La vieille femme ajouta, avec un soupir de
contentement :
    — Quand on a fait tournoyer en cercle le marteau de
Thor autour d’un garçon et d’une fille, ils sont unis à jamais.
    Singulièrement irrité par cette nouvelle référence au nom de
Thor, je m’empressai de changer de sujet :
    — Revenons, si vous le voulez bien, aux temps qui
précédèrent les rois Wandalar et Widereikhs…
    — Non, pas ce soir, interrompit Fillein. Nous autres
vieilles gens avons l’habitude de nous coucher avec la nuit, qui est tombée
depuis longtemps déjà, et cette pièce est celle où nous dormons. Le jeune
Maghib est installé sur une meule de foin derrière la maison, et vous pourrez
disposer vos fourrures pour la nuit sous les combles, au-dessus de nos têtes.
    Une fois que Swanilda et moi fûmes allongés côte à côte dans
le sombre grenier, nous décidâmes de nous abstenir de toute occupation qui eût
pu déranger ou scandaliser les vieillards de la pièce du dessous, et nous
contentâmes de discuter ensemble un petit moment.
    — Ne trouves-tu pas cela touchant, Thorn ? Un
homme et une femme mariés depuis si longtemps…
    — Cela surpasse largement l’ordinaire, c’est certain.
Un homme de l’âge de Fillein aurait pu enterrer trois ou quatre épouses mortes
en couches.
    Swanilda approuva de la tête.
    — Pendant que nous préparions le dîner, Baúhts m’a
confié que Dieu – à moins qu’elle n’ait voulu faire allusion à ce Thor qui
les avait liés – ne leur avait pas fait la grâce d’enfanter.
    Entendre ce nom de Thor prononcé une nouvelle fois raviva ma
mauvaise humeur, et je répliquai d’un ton acerbe :
    — Et c’est pour compenser le fils qu’ils n’ont jamais
eu, sans doute, que le généreux dieu Thor leur a envoyé Lombric, en guise de
substitut…
    Swanilda ne releva pas et garda un temps le silence. Puis
elle reprit :
    — Thorn, as-tu remarqué les deux arbres plantés
derrière la maison ?
    — Pardon ?
    — Un chêne et un tilleul.
    Cela fit vibrer quelque chose de lointain dans ma mémoire,
mais j’étais déjà trop assoupi pour retrouver quoi. Swanilda m’épargna cette
peine.
    — C’est une des histoires de la Vieille Religion,
dit-elle. Un couple âgé s’aimait si fort et depuis si longtemps que les dieux
d’antan, admiratifs, leur offrirent d’exaucer le vœu de leur choix. Les deux
époux demandèrent alors simplement qu’à l’heure de leur mort…
    — Il leur soit accordé de mourir ensemble,
complétai-je. Je me souviens, à présent. J’ai déjà entendu ce récit.
    — Leur désir fut exaucé, acheva Swanilda. Les dieux les
changèrent en un chêne et un tilleul, afin qu’ils puissent s’épanouir l’un près
de l’autre.
    — Swanilda, la taquinai-je gentiment, tu es en train
d’invoquer une légende au sujet de deux vieux paysans tout à fait ordinaires…
    — N’as-tu pas dit toi-même tout à l’heure que ces
deux-là surpassaient largement l’ordinaire ? Réponds-moi franchement,
Thorn. Crois-tu que tu pourrais vivre heureux avec la même femme jusqu’à la fin
de tes jours ?
    —  Iésus, Swanilda ! Personne ne saurait affirmer
une telle chose, sauf, une fois vieux, à se retourner sur son passé. Jamais
Fillein et Baúhts n’auraient pu prévoir cette longue union qui a été la leur.
Ce n’est qu’à présent, l’âge venu, qu’ils peuvent regarder vers l’arrière, et
s’en souvenir.
    Swanilda s’empressa d’ajouter, contrite :
    —  Akh, Thorn, je ne réclamais aucun serment…
    — Mais tu me demandais une prédiction. Pour cela, je te
suggère de t’adresser à Meirus le Boueux. Il affirme posséder des dons comme
diseur de bonne aventure. Demande-lui donc de quoi nous aurons à nous souvenir,
toi et moi, quand

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