Thorn le prédateur
sentant aussi viril qu’eux,
et impliqué dans des démarches typiquement masculines, ma part féminine n’était
jamais complètement submergée.
Des autres femmes, tout ce que j’avais connu jusque-là se réduisait
à quelques paysannes dures à la tâche ou des nonnes effarouchées, à quelques
notables exceptions près : la dévoyée Sœur Deidamia, la courageuse Dame
Placidia et la pétillante petite Livia, ainsi que les deux malfaisantes viragos
qu’avaient été la Mère Aethera et la clarissima Robeya. J’avais à
présent affaire à des jeunes filles de haute naissance, jouissant d’une
certaine liberté et de loisirs, d’intelligence et d’éducation, et dont
certaines savaient même lire et écrire. J’étais donc en mesure d’observer la
façon d’être de femmes n’ayant pas eu l’esprit brisé par une vie de tâches
astreignantes ou la religiosité, et qu’une ambition démesurée n’avait point
rendues cruelles. Et je me rendis compte qu’elles pensaient et ressentaient les
choses exactement comme moi lorsque ma nature féminine se manifestait.
Même si les hommes, la tradition, les lois ou le dogme
religieux ont déclaré que la femme n’était qu’un réceptacle destiné à être
rempli, elle sait qu’elle est bien plus que cela. Elle n’envisage pas chaque
homme comme un simple fascinum capable de la pénétrer. Elle le perçoit
différemment selon la façon dont lui-même la considère. Lui n’estime dans un
premier temps chez une femme que son attractivité, son côté désirable. Elle
tente au contraire de discerner ce qui se cache sous la surface, derrière les
apparences. Je le sais, j’ai regardé Gudinand de cette manière.
Les femmes de Vindobona avaient peut-être été attirées par
le nouveau venu qu’était Thornareikhs simplement du fait qu’il était étranger,
et que son supposé savoir sur tant de sujets était aussi mystérieux
qu’intéressant. Mais elles s’enflammèrent et s’attachèrent ensuite à moi pour
une raison beaucoup plus simple : je ne les regardais pas, je ne les
traitais pas comme les hommes ordinaires. Je me conduisais envers elles comme
ma personnalité de femme aurait aimé être abordée et considérée. Tout tenait à
cela. Beaucoup de ces femmes et de ces filles devinrent des amies intimes, et
bon nombre d’entre elles ne firent pas mystère de leur désir d’aller un peu
plus loin, ce qui arriva souvent.
Je n’hésite pas à le dire, un homme ordinaire, placé en face
d’un aussi abondant jardin, y aurait cueilli les fleurs les plus belles et les
mieux faites. Mais j’avais exploré ce qui se cachait derrière, aussi fis-je le
choix de celles que j’en étais venu à aimer le mieux, sans me préoccuper de
leur âge ni de leur élégance. Certaines étaient belles, mais pas toutes. Il y
eut parmi elles des jeunes filles à peine nubiles, dont j’étais le premier
amant ; elles avaient besoin d’être initiées avec tendresse :
j’espère que je le fis. D’autres étaient des mères de famille ayant passé la
prime jeunesse, mais nulle femme n’est jamais trop vieille pour se délecter des
plaisirs de la chair, et certaines eurent des choses à m’apprendre.
*
La première invitation amoureuse sans équivoque que je reçus
et que j’acceptai me vint d’une femme de haute naissance, que j’appellerai ici
Dona. Je dirai juste qu’elle était sans conteste une belle femme, qu’elle avait
les yeux violets, mais je ne donnerai pas d’elle une description détaillée
susceptible de révéler sa véritable identité.
Je la rejoignais avec transport dans ses appartements chaque
nuit, mais non sans une certaine appréhension, toutefois. Le simple fait de me
dévêtir en sa présence me causait une réelle anxiété. Non pas au sujet de mon
organe mâle, déjà érigé en ardent fascinum, ni en ce qui concernait mes
seins de jeune fille, que je parvenais assez bien, en les bandant tels des
pectoraux, à rendre quasiment indiscernables. Ce qui me préoccupait, c’était
mon absence de poils sur tout le corps. J’avais certes le pubis et les
aisselles garnis d’une raisonnable toison, mais je craignais que Dona ne
trouvât curieuse l’absence de tout système pileux sur ma poitrine, mes jambes
ou mes avant-bras, sans compter que nulle ombre de barbe ne couvrait mon
visage.
Je me faisais du souci pour rien. Dona se déshabilla sans
hésitation, ne conservant sur elle, comme le voulait la modestie
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