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Thorn le prédateur

Thorn le prédateur

Titel: Thorn le prédateur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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conversation. Mais… où voulez-vous en
venir ?
    — Une intelligente et jolie princesse comme elle n’est
plus de nos jours qu’un ornement, une babiole, vouée au mieux à devenir la
femme de quelque prince, douce et effacée comme elle se doit de l’être. Aussi
ne fait-elle jamais rien. Votre princesse Amalamena, à présent… si elle avait
devant elle une longue espérance de vie, qu’en ferait-elle ?
    Je ne voyais toujours pas où nous conduisaient ces
abstractions, mais je décidai que je pouvais moi aussi philosopher.
    — Une flamme ne fait rien d’autre qu’exister, elle
aussi, repartis-je. Elle brûle jusqu’à extinction. Peut-être souffre-t-elle
tout du long, mais elle aura en attendant prodigué lumière et chaleur à son
entourage.
    Il grogna avec amertume.
    — Pas de quoi meubler une vie de beaucoup de souvenirs,
en somme, lorsqu’elle disparaît dans un souffle d’air.
    — Excusez-moi, vénérable Alektor, fis-je au bout d’un
instant. Pourquoi parlons-nous par énigmes ?
    — J’ignore quelle mission vous a conduit en ces lieux,
jeune Akantha, mais la princesse ne semble avoir qu’une envie, c’est que vous la
réussissiez. Je suggère donc que vous l’invitiez à vous aider à l’accomplir.
C’est la seule prescription utile que je puisse vous faire. Contrairement à
presque toutes les femmes, elle aura ainsi l’occasion de réaliser quelque chose
durant sa brève existence, dont elle pourra se souvenir dans la vie éternelle.
Je n’ai rien d’autre à dire. Je vais prendre cette mandragore et l’emmener en
cuisine, pour donner les instructions qui s’imposent. Que Tykhe daigne vous
sourire, à vous et votre princesse.
    Je m’efforçai de rendre à mon visage une expression enjouée
et rejoignis Amalamena dans le triclinium. Elle se trouvait déjà
gracieusement étendue sur une couche et dévorait à belles dents –
peut-être juste pour m’en imposer –, tandis qu’un serviteur fort bien habillé
se tenait debout auprès d’elle, lui décrivant les plats inconnus qui se
trouvaient sur la table. Lorsque je m’installai sur ma couche, placée à angle
droit par rapport à la sienne, Amalamena me déclara, sur le ton d’une petite
fille tout heureuse de manger en dehors de chez elle pour la première
fois :
    — Tenez, Thorn. Essayez cela. Ça s’appelle du mouton
des marais… de la chair de brebis qui n’a jamais mangé que des algues. C’est
délicieux, une saveur unique. Avec une sauce d’algues bouillies. Akh, et
regardez ici. Toutes ces tranches de pain sont imprimées de l’initiale en
relief de Zénon.
    — Afin que nous ne puissions oublier à qui nous devons
ce repas ?
    — Le pain étant le mets le plus simple posé sur cette
table, je trouve cet embellissement plutôt élégant. J’ai demandé à Seuthes
(elle montra de la main le jeune homme debout derrière elle) de m’indiquer
comment c’était fait. Il m’a expliqué que le boulanger l’imprimait dans la pâte
en la pressant dans un moule de bois juste avant de la mettre au four. Akh, et
avez-vous vu les merveilleux dessins ornant les tentures de la maison ?
Selon Seuthes, on ne s’y prend pas autrement pour les fabriquer. Elles sont
pressées l’une après l’autre dans des blocs de bois délicatement sculptés,
enduits de teintures de couleurs variées…
    Je souris avec bienveillance tandis qu’elle poursuivait avec
excitation sa description, et quand elle finit par se trouver à court de
compliments à l’égard des plats qu’on lui avait servis et de l’endroit où nous
nous trouvions, je demandai négligemment à Seuthes :
    — Êtes-vous un esclave, ou un domestique ?
    — Ni l’un ni l’autre, Presbeutés, répondit-il
assez sèchement. J’ai ici un titre. Je suis le diermeneutés, l’interprète
du palais. Je parle toutes les langues de l’Europe, et quelques-unes de l’Asie.
C’est moi qui traduirai pour vous, Presbeutés, durant votre entrevue
avec Zénon.
    Je le remerciai :
    —  Eûkharistô [143] , Seuthes.
Mais ce ne sera pas nécessaire. Je vous dispense de cette tâche.
    Il sembla heurté comme d’un affront.
    — Mais je dois être présent. Vous êtes un bárbaros.
    —  Je sais. Mais en quoi votre présence me
rendrait-elle moins barbare ?
    — Eh bien… ma foi… un bárbaros, par définition,
est quelqu’un qui ne parle pas le grec.
    — Je le sais aussi. Mais dites-moi donc, interprète,
dans quelle langue sommes-nous en

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