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Toulouse-Lautrec en rit encore

Toulouse-Lautrec en rit encore

Titel: Toulouse-Lautrec en rit encore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Alaux
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elle porte bien son nom. Elle accroche vite les wagons !
    — Vous pensez que ses fils ont tenté de rançonner Paulo ?
    — Il ne m’a jamais rien dit qui pourrait ressembler à ça. Je sais seulement qu’il ne pouvait pas voir la mère Labatut en peinture.
    — C’est assez navrant dans un musée ! plaisanta Théo.
    — C’est quand même pas la Vénus de Millau, la Micheline !
    — De Milo, rectifia l’assistant de Cantarel.
    — Peu importe d’où elle vienne !
    — Milo n’est pas en Aveyron, mais plutôt dans la mer Égée, professa Trélissac d’un air très sérieux.
    — En tout cas, j’espère que M. Dorléac ne va pas embaucher son adjudant de mes couilles comme concierge !
    — Vous le connaissez ?
    — C’est un ancien catcheur qui veut se reconvertir dans la boxe. Il s’entraîne régulièrement au Ring Parade , la salle où je vais tous les jeudis, sur la route de Castres.
    — Et alors ?
    — Il n’est pas clair, ce mec. C’est un vantard ! Il est fier d’avoir joué de la gégène sur ses prisonniers en Algérie. Vous voyez le genre ?
    — Je pense que Dorléac sera sensible à ce type d’argument.
    Le gardien de nuit se leva puis ouvrit son armoire. De la poche de son blouson en cuir, il extirpa un paquet de Lucky Strike et, spontanément, offrit une cigarette à Théo comme il avait fait, quelques minutes plus tôt, en lui tendant une bière.
    — Une question, Gérard ?
    — Quoi encore ?
    — Tout à l’heure, quand nous avons évoqué vos virées avec Paulo, vous avez parlé de Toulouse… Que faisiez-vous dans la Ville rose ?
    — Je ne suis allé qu’une fois ou deux à Toulouse avec Paulo. À chaque fois, on a passé la nuit dans une boîte à pédales.
    — Laquelle ?
    — Je crois me souvenir que cela s’appelait La Cochinchine , un nom comme ça, près de la place Saint-Georges.
    — Vous vous êtes bien amusés ?
    — Je me suis emmerdé. Je n’aime pas les tantes qui tortillent du cul !
    — Pourtant Paulo était du style à se travestir, non ?
    — Maquillé, pomponné, on pouvait le prendre pour une vraie gonzesse !
    Tour à tour, les deux garçons vidaient leur canette avec un plaisir évident. Dorval laissa même échapper un rot avant de s’excuser aussitôt.
    — Dites-moi, Théo, comment avez-vous pénétré dans le musée, les détecteurs à l’entrée n’ont pas sifflé ?
    — Disons que je me suis laissé enfermer dans le musée sans que personne n’y trouve à redire.
    — Où étiez-vous planqué, nom de Dieu ? Ne me dites rien : je parie que vous étiez dans la branloire !
    — La branloire ? s’offusqua Théo en écarquillant les yeux.
    — Oui, l’endroit où l’évêque se livrait, entre deux confitures, au plaisir solitaire.
    — Entre deux confiteor, rectifia Théo qui imaginait déjà la tête de son patron quand il lui relaterait les dialogues de sa nuit au musée.
    — Parce que tout évêque qu’il était, il n’en était pas moins homme ! ajouta le gardien en savourant une nouvelle gorgée de bière.
    Une fois la bouteille vidée, Gérard Dorval s’empara d’une batterie rechargée qu’il connecta aussitôt à sa lampe torche. Il fit un essai qui se révéla concluant et, d’un éclat lumineux, aveugla Théo comme pour sceller leur complicité naissante.
    La ronde de nuit pouvait se poursuivre. Même le fantôme de Lautrec ne saurait distraire Dorval de sa mission nocturne.

9
    Un milan noir tournoyait au-dessus des eaux du Tarn. Les quatre hommes avançaient en file indienne sur la berge de la rivière abandonnée aux branchages et aux sacs plastique, vestiges des dernières crues de printemps. Dorléac ouvrait la marche, suivait le commissaire Coustot. Un peu plus loin derrière, Trélissac et Cantarel se frayaient un chemin sur cette rive fréquentée exclusivement par des pêcheurs d’anguilles, les soirs d’orage, quand le Tarn coule à gros bouillons.
    Avec son costume trois pièces, ses Weston et son feutre sombre, Séraphin avait des airs de sous-préfet aux champs. Muni d’un bâton, Théo lui dégageait le passage afin qu’il ne revienne pas en loques au musée.
    L’expédition se révélait plus harassante et plus compliquée que prévu. L’accès à la Gravière avait été barré depuis longtemps ; il y avait belle lurette qu’on n’extrayait plus de gravier du lit du Tarn. Il ne restait donc plus de cette carrière désaffectée qu’un vieil abri

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