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Tragédies Impériales

Tragédies Impériales

Titel: Tragédies Impériales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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faisait appel à la solidarité de tous les peuples allemands pour l’aider à mener à bien la tâche écrasante qui lui incombait…
    Malheureusement, de ces trois rescrits, ledit Bismarck n’accepta et n’appliqua que le troisième, car à peine le mal eut-il imposé une rechute au malheureux Frédéric, laissant momentanément les mains libres au chancelier, qu’il réprimait durement les activités socialistes et faisait sentir le fouet à l’Alsace-Lorraine.
    Néanmoins, l’empereur luttait contre le cancer et la mort avec un courage qui forçait l’admiration. Le larynx détruit, il n’en recevait pas moins les rois qui étaient accourus de toutes les cours d’Europe pour les funérailles du vieux Guillaume et il avait fallu toute l’énergie de l’impératrice, jointe à celle de Sir Morell Mackenzie, pour l’empêcher d’assister à l’interminable service funèbre par une température sibérienne.
    Il exigea que sa vie fût réglée comme une horloge.
    Levé à huit heures, il descendait dans l’Orangerie avec Vicky à 9 heures 30, faisait une courte promenade en compagnie de sa femme et de ses médecins, puis travaillait jusqu’au déjeuner, qu’il prenait en famille. Ensuite, une sieste, avant de recevoir son chancelier et le prince héritier et de s’occuper des affaires de l’État jusqu’à huit heures du soir, heure du dîner. Il se couchait à dix heures.
    Malheureusement, autour de ce malade héroïque, les médecins menaient une épuisante lutte d’influence, les Allemands s’opposant naturellement à l’Anglais en une bataille proprement insensée. Mackenzie, opposé à l’ablation du larynx qui ne pouvait, selon lui, que hâter l’inéluctable fin, devait faire face à la coalition de ses confrères, qui employaient, pour l’abattre, tous les moyens possibles. On alla même jusqu’à prétendre qu’il ne s’appelait pas Mackenzie mais Marckovicz, et qu’il était « un juif polonais ». Affirmation fantaisiste et purement gratuite, mais dont le célèbre praticien et fidèle sujet de la reine Victoria pensa mourir de saisissement.
    L’aimable Willy, le prince héritier, appuyait d’ailleurs la cabale, et quand, excédée, l’impératrice congédia l’un des calomniateurs, le futur seigneur de la guerre accorda une longue audience à celui-ci, et l’assura gracieusement de toute sa considération personnelle.
    En même temps, son allié, Bismarck, osait battre carrément en brèche l’autorité du souverain, et cela pour des motifs un peu trop personnels. C’est ainsi que son beau-frère, le ministre de l’Intérieur von Puttkammer, ayant été renvoyé par l’empereur sur une grave accusation de corruption, le chancelier donna en l’honneur du disgracié un grand dîner qui fit un énorme tapage, dîner auquel assista Willy et fut la cause d’une amère explication entre Bismarck et l’impératrice. À son habitude, celui-ci fut cassant, à peine courtois, car il savait bien que ce qu’il considérait comme sa victoire personnelle était proche et il ne voyait pas pourquoi il lui fallait conserver envers Victoria les formes extérieures, tout de même obligatoires, du respect. Elle avait toujours été son ennemie et il éprouvait un malin plaisir à lui faire sentir que son pouvoir ne serait pas durable.
    Car hélas, la maladie, un instant arrêtée, recommençait ses ravages et faisait de rapides progrès. Le 12 avril Frédéric III eut des quintes de toux. Il fallut changer la canule qui s’enfonçait dans la gorge, et adapter un nouveau modèle permettant une meilleure respiration. Mais le malade s’affaiblissait de jour en jour.
    Il trouva tout de même la force, durant une brève accalmie, d’assister, le 24 mai, au mariage de son second fils, Henri, qui épousait à Berlin la princesse Irène, fille du grand-duc Louis de Hesse. Mais cet effort marqua le début de la fin et dès le lendemain, on crut l’empereur à l’agonie.
    L’agonie ? Pas encore ! Cinq jours plus tard, Frédéric se relevait, et dans sa voiture, habillé et casqué, il passait en revue les trois régiments de sa garde qui, électrisés par ce courage surhumain, l’acclamaient. Bien plus, deux jours après, il se rendait en personne sur la tombe de son père…
    Terrifiée par ce qu’elle considérait comme de folles imprudences, Vicky le supplia de quitter Berlin et de s’installer au moins au palais d’été de Potsdam. Frédéric y consentit, et il se fit

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