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Tsippora

Tsippora

Titel: Tsippora Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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passait la main sur le visage, nageait lentement
sur le dos, accomplissait au milieu des reflets scintillants un large cercle
pour regagner la plage.
    Ce qu’elle ne pouvait voir, ses yeux, sa
bouche, la coulée de l’eau contre ses tempes, Tsippora voulait les imaginer. Le
désir d’entrer dans la mer, de nager vers lui, de voir les plis de ses yeux,
d’effleurer ses épaules l’emplit avec brutalité. Son corps devint douloureux,
sa peau aussi sensible que si on l’eût abrasée avec des orties. Elle eut peur.
    Elle se détourna enfin, surmontant la
fascination.
    Quelques secondes elle demeura pliée en
deux comme si on l’avait fauchée d’un coup de bâton. La bouche grande ouverte,
les paupières serrées, elle reprit son souffle. Les battements de son cœur
faisaient un vacarme assourdissant.
    Elle se maudit, se traita de folle, se
redressa avec une sorte de rage.
    Attrapant le sac de nourriture des deux
mains, elle le tira autant qu’elle le porta jusqu’au seuil de la grotte. Il lui
suffisait de le déposer là, dans l’ombre, puis de s’enfuir, vite.
    La pensée de se trouver face à Moïse la
remplissait d’effroi. Il ne manquerait pas de voir la jarre, le double sac de
nourriture. Il devinerait. Il comprendrait. Il penserait : les filles du
puits. Ou peut-être penserait-il à elle, la Noire. Celle que les bergers
voulaient violer. Pour qui il s’était battu.
    Peut-être ne penserait-il rien de tout ça.
On verrait bien, plus tard.
    Elle ne devait pas être impatiente comme
Orma. Le prince d’Égypte se cacherait ici longtemps encore, elle n’en doutait
plus.
    Tsippora tira le sac sur le sol inégal
jusqu’à l’obscurité de la grotte. Elle s’arrêta, éblouie par l’ombre. La
fraîcheur glaçait la sueur sur son front et sa nuque. Son épaule heurta la
paroi, elle grogna de douleur, manqua tomber. Son talon buta contre une chose
dure qui se renversa. Il y eut un bruit mat contre la pierre.
    Elle s’accroupit, effleurant le sol autour
d’elle du bout des doigts. Son cœur battait vite à nouveau. Le mauvais goût de
la faute lui séchait déjà la gorge. Elle murmura :
    — Horeb ! Horeb ! Ne
m’abandonne pas !
    Elle palpa une forme anguleuse, reconnut le
touché du bois. Elle tira à elle un coffre, long et étroit. Dans la lumière
venue du seuil, elle devina la peinture bleu et ocre qui en recouvrait les
côtés. Sur le couvercle, des colonnes de figurines, des silhouettes d’oiseaux,
de plantes, de simples lignes ou des traits étaient dessinés avec minutie.
    L’écriture des Égyptiens !
    Jethro lui en avait tracé quelques
esquisses dans le sable et même, usant de l’encre de poulpe, sur une étoffe de
jonc broyé. Des dessins qu’elle avait trouvés bien maladroits. Ceux-ci étaient
légers, purs, d’une simplicité absolue.
    Elle se souvint du bruit qui avait résonné
après qu’elle eut renversé le coffre. Ce coffre n’était pas vide. La crainte du
retour de Moïse la reprit. Elle dressa l’oreille, sur le point de s’enfuir.
Elle n’entendit que le ressac contre la falaise. Elle avait encore le temps de
tout remettre en place.
    Fébrile, à quatre pattes, s’écorchant les
genoux aux arêtes de la roche, jetant les mains à gauche et à droite, elle
devina un reflet. Une forme longue et cylindrique ? Et une autre,
identique, à côté. C’était lourd. C’était… Tsippora eut un cri de surprise, se
redressa, avança jusqu’au seuil pour mieux voir, n’en croyant pas ses yeux.
    De l’or. Deux bracelets d’or.
    Deux parures de la taille, au moins, de ses
propres avant-bras ! Sur chacune, en relief, un serpent enlaçait l’épaisse
plaque d’or poli. Entre les anneaux du serpent, sculptés en creux, des signes,
d’étranges croix, de minuscules silhouettes, mi-hommes mi-bêtes.
    Une pierre roula et résonna contre la
falaise.
    Moïse remontait.
    Tsippora songea aux bras d’or de l’homme
qui l’avait enlacée au fond de la mer.
    Elle se précipita pour remettre les bijoux
à leur place, ressortit de la grotte l’esprit en feu.
    La plage et la mer étaient vides. Moïse
était là, à une quinzaine de pas. Sa pêche se balançait au jonc négligemment
posé sur son épaule. Il s’immobilisa avec un mouvement de surprise, peut-être
même de crainte.
    Elle hésita. Il était encore assez loin,
elle pouvait courir jusqu’en haut de la falaise. Elle se répéta qu’il verrait
la nourriture et comprendrait. Il leva sa main pour

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