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Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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rouge.
    — Alors tu n’as pas cherché à me retrouver puisque tu me croyais donnée à un autre ?
    — Je n’ai fait que te chercher et j’ai trouvé ta trace, gravée comme celle d’une biche effrayée, au bord d’un étang de la forêt de Paimpont. Malheureusement je l’ai reperdue aussitôt. Mais j’avais trouvé celle de tes frères. Tudal est mort de ma main…
    Elle tressaillit si violemment qu’il crut au début d’une crise nerveuse et la serra plus étroitement contre lui. Dans la nuit claire il vit étinceler son regard sombre.
    — Tu as… tué Tudal ? souffla-t-elle incrédule.
    — Je l’ai pendu à la maîtresse poutre de sa maison et c’était encore de la clémence car il méritait la roue !
    — Et Morvan ?
    Il eut un geste d’impuissance :
    — Disparu ! Il n’était pas au Frêne lorsque j’ai rejoint Tudal et j’ai su par la suite qu’il s’était enfui. Sinon il aurait subi le même sort. Mais je ne désespère pas : je sais que je le retrouverai un jour.
    Elle se mit à trembler comme une feuille d’automne et sa voix terrifiée ne fut plus qu’un souffle quand elle demanda :
    — Pour faire ainsi justice, as-tu donc appris ce qui s’était passé… tout ce qui s’était passé ?
    — Tout ! Ne dis plus rien !
    Et pour mieux juguler l’épouvante de l’atroce souvenir qu’il sentait revenir il ferma d’un baiser infiniment tendre les lèvres frémissantes de la jeune fille.
    — Tu n’as rien à m’apprendre, fit-il seulement quand il s’écarta, sinon ce que tu as fait après ta fuite.
    Avec une surprise vaguement irritée, il la sentit alors se raidir, s’écarter et il eut la sensation qu’elle se refermait d’un seul coup.
    — Il y a peu de choses à dire, dit-elle avec un petit rire sans joie. Ma vie à moi n’a rien eu d’héroïque. Je savais que ma mère avait une parente éloignée à Paris, une parente dont mes frères ne connaissaient pas l’existence, je crois bien. Je suis allée chez elle et je lui ai tout dit. Elle m’a prise alors sous sa protection et m’a cachée quelque temps, le temps de me trouver une position qui me mette à l’abri.
    — C’est elle qui t’a fait entrer comme lectrice de la comtesse de Provence ?
    — O… ui, mais…
    — Et c’est elle encore, naturellement, qui t’a fait connaître ce merveilleux médecin italien, cet excellent comte de Cagliostro !
    Du coup, Judith s’arracha de ses bras, sauta sur ses pieds et Gilles eut à nouveau devant lui la Judith d’autrefois, méfiante, combative et impatiente.
    — Comment sais-tu tout cela ?
    — Peu importe comment je le sais. Est-ce vrai ?
    — C’est vrai. Elle m’a procuré la sécurité d’une maison royale, la bonté de Madame qui m’aime bien et me protège.
    — Sous un faux nom !
    — Bien sûr sous un faux nom ! Devais-je risquer, en m’avouant Judith de Saint-Mélaine, de voir mes frères me retrouver, me reprendre ? Grâce à tante Félicité j’ai cessé d’avoir peur.
    — Et grâce à ce fameux Cagliostro, qu’as-tu obtenu ?
    — La fin de mes terreurs, la possibilité de vivre à nouveau normalement, la guérison ! Sais-tu ce qu’ont été mes nuits, durant des semaines, après… Trécesson. Je ne pouvais plus dormir, je ne voulais plus dormir par crainte de retrouver l’abominable cauchemar, toujours le même, que je refaisais sans cesse ! Je ne pouvais plus supporter l’obscurité ! J’étais malade, délirante, à moitié folle. Alors tante Félicité qui ne savait plus que faire a fait chercher le comte. Il l’avait guérie jadis d’une maladie de langueur et elle était demeurée en correspondance avec lui parce qu’elle éprouve, pour cet homme de bien, vénération et amitié. Il est venu, de fort loin d’ailleurs, et, sous ses mains, j’ai enfin retrouvé la paix, la santé, presque la joie. C’est un homme merveilleux… plus qu’un homme même !…
    — Eh bien ! Quelle apologie ! Disons un dieu et n’en parlons plus !
    — Et moi je veux en parler, s’écria Judith avec une brusque colère. Pourquoi serais-je ingrate, indifférente envers un homme qui m’a rendu la raison ?
    Une amère jalousie envahissait lentement l’âme de Gilles. Il avait tant souhaité, lorsqu’il retrouverait celle qu’il aimait, être pour elle le refuge, la barrière et le défenseur, le confident, l’ami et l’amant tout à la fois et voilà qu’un autre était déjà pour elle

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