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Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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ensemble.
    — Pour plusieurs raisons. La première est qu’il est inutile de faire courir un danger quelconque à votre mère. Le passage de la frontière dans de telles conditions pourrait la mettre mal à l’aise…
    François fronça les sourcils.
    — Vous voulez dire qu’elle pourrait commettre une gaffe ? Ça, évidemment, avec Mère, c’est toujours possible mais en lui expliquant bien…
    — Ce n’est pas tout. Votre précepteur pourrait trouver fort mauvaise son aventure. Que fera-t-il après votre départ ? Il retournera à Madrid et, comme c’est un religieux, il est bien capable d’aller se plaindre à l’Inquisition… qui me recherche. Est-ce que vous imaginez le genre d’ennuis que pourrait avoir votre père, tout puissant qu’il soit auprès du Roi ?
    Il se tut un instant pour laisser à ses paroles le temps de faire leur chemin dans les esprits de ses petits amis. Puis comme, visiblement déconfits, ils baissaient la tête, il ajouta plus doucement :
    — Enfin, votre plan ne prévoit que moi et je ne veux pas partir sans mon serviteur indien. Le signalement de Pongo a été donné avec le mien et je ne vois pas quel rôle vous pourriez lui faire jouer à moins de mettre vos domestiques dans la confidence.
    — Ceux de la duchesse d’Albe y sont bien, j’imagine, dans votre affaire de duègne ? lança Thérésia avec rancune.
    — En effet. Mais elle n’a emmené que des gens à toute épreuve qui la connaissent depuis l’enfance et se feraient tuer pour elle. Pouvez-vous en dire autant des vôtres ?… Là, vous voyez bien ! Maintenant, après toutes ces raisons, je vais vous donner la meilleure : demain matin je serai en France et je vous attendrai sur la route de Bayonne. Pendant que les comédiens donneront leur représentation, je passerai le fleuve à la nage avec Pongo et nos chevaux. Ce n’est pas plus difficile que cela…
    — Mais c’est un fleuve très très large… vous allez vous noyer ? dit Dominique.
    — J’espère bien que non. Sauvez-vous maintenant ! Le souper est certainement près de finir, on va vous chercher. Mais j’inscris à votre compte ce que vous avez voulu faire pour moi. Un jour peut-être je pourrai vous le rendre. À demain… en France !
    Il serra la main des deux garçons, à la mode anglaise, embrassa Thérésia déjà à moitié consolée et mit tout le monde dehors.
    La nuit était tombée à présent et, sur la place, les tambours de basque des comédiens commençaient à ronfler, appelant les habitants de Fontarabie à leur spectacle. Des torches s’allumaient un peu partout et, sur les tréteaux, un homme en costume mi-partie rouge et bleu battait le briquet pour allumer les chandelles. Cette dernière nuit d’Espagne était peut-être la plus belle que le Français y eût connue. Jamais le ciel n’avait été d’un bleu si chaud et si profond, jamais les étoiles n’avaient brillé si clair et la silhouette imposante du vieux palais s’allégeait sous cette lumière irréelle jusqu’à se parer des brumes du rêve. Le crépuscule vert avait fait place à des ténèbres chatoyantes.
    L’orchestre de plein vent préludait en contrepoint des rires de la foule, qui s’assemblait. Les comédiens ambulants réveillaient pour un soir la vieille forteresse délaissée que le temps assoupissait au bord de l’océan, et l’Espagne, ce soir, avait pour celui qui allait la quitter les couleurs tendres d’un regret fugitif.
    Aussi lorsque Cayetana, dans le bruissement parfumé de ses robes de soie, poussa la porte de sa chambre, il la prit dans ses bras avec une tendresse qu’il n’avait encore jamais mise dans leurs étreintes car, à cet instant, le sentiment qu’elle lui inspirait ressemblait beaucoup à l’amour.
    — Il nous reste une heure, murmura-t-il contre son cou tiède. Cette heure-là personne ne nous la prendra…
     
    Quand il rejoignit Pongo qui l’attendait avec les chevaux dans l’ombre épaisse des vieilles murailles, il emportait avec lui l’image brillante d’une femme en robe de soie rouge, debout sur un balcon, un éventail aux doigts et regardant, avec des yeux brillants de larmes, danser quelques baladins.
    Aucun bruit ne se faisait entendre. Les patrouilles, s’il y en avait, devaient faire confiance à la mer pour effectuer leur travail.
    La marée était basse. L’estuaire, si large tout à l’heure, montrait des bancs de sable que la lune en se levant faisait ressortir, mats sur

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