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Un espion à la chancellerie

Un espion à la chancellerie

Titel: Un espion à la chancellerie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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regard méprisant.
    — Bien sûr ! Y aurait-il autre chose à ajouter ?
    — Autre chose ?
    Corbett réfléchit, sans prêter attention aux coups d’oeil intrigués de Lancastre et à ceux, hostiles, de de Craon. Des années auparavant, en Écosse, il avait lancé un leurre aux Français et il recommençait à présent 1 . Il était sûr que cela fonctionnerait. Il serra les poings sous l’excitation et ne prit pas la peine d’écouter la discussion qui portait maintenant sur des questions mineures plus ennuyeuses.
    Ce ne fut qu’en fin d’après-midi que s’acheva la rencontre, au cours de laquelle, comme le fit sarcastiquement remarquer Lancastre, on avait beaucoup parlé pour ne rien dire. Les Français pensaient qu’il existait un moyen de régler cette querelle et déploraient l’absence du roi d’Angleterre, mais – et là, de Craon avait jeté un regard significatif à Corbett – le roi Philippe exposerait personnellement à l’ambassade anglaise les solutions qu’il envisageait. Les Français, ensuite, avaient offert des sauf-conduits aux envoyés anglais qui les accompagneraient en France. Lorsque Lancastre avait annoncé que Corbett serait l’un d’eux, de Craon avait eu un petit sourire ironique tandis qu’Évreux avait pris l’air offusqué comme s’il s’était attendu à quelqu’un de plus haut rang. La rencontre terminée, Corbett avait écouté patiemment les récriminations de Lancastre avant de partir voir Waterton à la Tour.
    À présent un passeur l’emmenait sur sa fragile barque au milieu du trafic intense de la Tamise. Ils descendirent le fleuve en longeant les docks, les chantiers, les galères et les navires qui enrichissaient Londres et remplissaient les coffres de ses négociants ; ils croisèrent les frêles embarcations des pêcheurs et des petits marchands ; puis ils passèrent non loin du gibet qui portait les corps des pirates, dont l’âme s’était envolée par les yeux éteints et la bouche béante ; ce sinistre rappel de la Mort n’empêchait pas les vivants de s’affairer à la poursuite de la fortune. Un bateau à fière allure les frôla, sa belle coque noire ornée de dorures et décorée de draps coûteux, d’étendards et de bannières qui proclamaient son importance avec plus d’ostentation qu’une fanfare de trompettes.
    Le passeur guida son embarcation sous les arches imposantes du pont de Londres. L’eau rugissait, écumante, comme dans un chaudron géant. Corbett eut peur, mais la barque passa sans encombre, rapide et droite comme une flèche bien tirée. Les tours de la forteresse se profilaient, sinistres, au-dessus des arbres ; le grand donjon bâti par Guillaume de Normandie était à présent entouré et protégé par un ensemble de murailles, de tours, de fossés et de douves. C’était une place forte pour défendre Londres, abriter le Trésor royal et les archives, mais c’était également un lieu de ténèbres, de terreur et de mort silencieuse. Dans ses cachots, bourreaux et tortionnaires cherchaient à extirper la vérité ou à la déformer pour en faire « leur » vérité.
    Corbett frissonna en gravissant les marches du quai de la Tour. La douceur et le calme doré de cette soirée étaient gâchés par la mission dont il était chargé. Il franchit le pont-levis et toute une série de portes et de passages obscurs, destinés à surprendre et à tuer tout attaquant. Il fut arrêté à chaque coin par de jeunes soldats bien armés qui, le regard dur, le fouillèrent et examinèrent scrupuleusement son ordre de mission et ses lettres de créance. L’un d’eux le guida. Vague silhouette revêtue d’un haubert de mailles et d’un casque conique en acier qui lui cachait le visage et la tête, il précédait Corbett d’un pas martial, la main à l’épée, sa grande cape militaire flottant comme les ailes d’une gigantesque chauve-souris. Ils quittèrent l’abri des murs, dont beaucoup étaient encore encombrés par des cordes d’échafaudage, car le roi Édouard voulait renforcer la défense de la Tour, et ils arrivèrent à la vaste étendue herbeuse qui ceignait le grand donjon normand.
    C’est dans cette cour intérieure de la Tour que vivaient les hommes de la garnison et leurs familles ; les maisons en bois à un étage des officiers importants, tels que le connétable et l’intendant, s’élevaient à côté des forges, des communs, des cuisines en pierre et des cabanes des ouvriers. Des gamins

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