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Un long chemin vers la liberte

Un long chemin vers la liberte

Titel: Un long chemin vers la liberte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nelson Mandela
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prêt à 5 h 30 du matin. Je dis au général que si j ’ étais heureux de cette rencontre, je pensais qu ’ il serait bien que j ’ aie un costume et une cravate pour voir Mr. Botha. (Le costume de la visite du groupe de personnalités éminentes avait disparu depuis longtemps.) Le général accepta et, un peu plus tard, un tailleur apparut pour prendre mes mesures. L ’ après-midi, on me livra un nouveau costume, une chemise, une cravate et des chaussures. Avant de partir, le général me demanda mon groupe sanguin, au cas où quelque chose de malencontreux se passerait le lendemain.
    Je me préparai du mieux que je le pus pour cette rencontre. Je relus mon mémorandum et mes notes. Je consultai tous les journaux et les publications que j’avais, afin d’être au fait. A la suite de la démission du président Botha, le Parti national avait élu F.W. De Klerk pour le remplacer et l’on disait qu’une lutte sournoise opposait les deux hommes. Certains interprétaient la volonté de Botha de me rencontrer comme le désir de couper l’herbe sous le pied à son rival, mais cela ne me concernait pas. Je répétai les arguments que m’avancerait le président et ceux que je lui retournerais. Dans chaque rencontre avec un adversaire, on doit s’assurer qu’on donne exactement l’impression qu’on a l’intention de donner.
    J ’ étais un peu tendu à la perspective de rencontrer Mr. Botha. On l ’ appelait die Groot Krokodil –   le Grand Crocodile  – et on m ’ avait beaucoup parlé de son caractère féroce. J ’ avais l ’ impression que c ’ était le modèle même de l ’ Afrikaner d ’ autrefois, intraitable et obstiné, qui ne discutait pas avec les responsables noirs mais leur dictait sa volonté. Sa récente attaque cérébrale n ’ avait fait qu ’ exacerber cette tendance. Je décidai que s ’ il se comportait avec moi de façon paternaliste, je l ’ informerais que je trouvais cela inacceptable et me lèverais pour mettre fin à la rencontre.
    A 5 h 30 précises, le général Marais, le commandant de Victor Verster, se présenta chez moi. Il entra dans le salon et je me tins devant lui dans mon costume neuf pour une inspection. Il tourna autour de moi puis secoua la tête et me dit   : « Non, Mandela, votre cravate. » On ne met pas souvent de cravate en prison et, ce matin, en mettant la mienne, je m’étais rendu compte que je ne savais plus faire un nœud. Je m’en étais tiré tant bien que mal en espérant que personne ne le remarquerait. Le général Marais déboutonna mon col, m’enleva ma cravate et, debout derrière moi, il me fit un double nœud Windsor. Puis il admira son œuvre. « C’est beaucoup mieux   », conclut-il.
    Nous allâmes en voiture de Victor Verster à Pollsmoor, la résidence du général Willemse, où la femme du général nous servit un petit déjeuner. Ensuite nous nous dirigeâmes en petit convoi vers Tuynhuys, la résidence officielle du président, où la voiture descendit dans un garage souterrain. Tuynhuys est un bâtiment élégant de style hollandais du Cap qui date du XIX E siècle, mais ce jour-là je ne le vis pas bien. En fait, on me fit passer en fraude dans l ’ appartement présidentiel.
    Nous prîmes un ascenseur qui nous laissa au rez-de- chaussée dans une immense entrée, devant le bureau du président. Kobie Coetsee et Niel Barnard nous attendaient, entourés d’une suite de hauts fonctionnaires du service des prisons. J’avais beaucoup parlé de cette rencontre avec Coetsee et Barnard et ils m’avaient toujours conseillé d’éviter les questions sujettes à controverse avec le président. Pendant que nous attendions, le Dr. Barnard baissa les yeux et s’aperçut que mes lacets n’étaient pas correctement noués. Il s’agenouilla aussitôt pour y remédier. Je me rendis compte de leur nervosité et cela ne m’aidait pas à me calmer. La porte s’ouvrit. J’entrai en m’attendant au pire.
    Le président Botha contourna son bureau et s’avança vers moi. Il avait parfaitement calculé les distances, car nous nous retrouvâmes exactement au centre. Il tendait la main et arborait un large sourire et, en fait, à partir du premier instant, il m’a complètement désarmé. Il se montra extrêmement poli, déférent et amical.
    Nous posâmes pour un photographe, en train de nous serrer la main, puis Kobie Coetsee, le général Willemse et le Dr. Barnard nous rejoignirent autour d’une grande table. On

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