Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
Vom Netzwerk:
pierres
encombrant les pâturages, il avait l’intime conviction d’accomplir son destin.
    Il allait même jusqu’à caresser Skip.
    Vers la fin de la journée, Gwenda était plus amoureuse de
lui que jamais. Hélas, par-delà sa franche camaraderie, elle ne décelait chez
Wulfric aucun signe de passion, rien qui suscite en elle la moindre angoisse,
et elle en venait presque à regretter que Wulfric ne laisse pas transparaître
un peu plus la bête en lui, comme Alwyn le hors-la-loi. La journée durant, elle
s’efforça d’éveiller son intérêt par mille petits riens, se débrouillant pour
lui faire voir par hasard ses jambes, qui étaient fermes et bien faites, ou
encore, dans les montées, pour dégrafer son corsage, sous prétexte d’être
essoufflée. Toute occasion lui était bonne pour effleurer le jeune homme,
toucher son bras ou poser la main sur son épaule. Hélas, Wulfric ne réagissait
pas. Elle n’était pas jolie et le savait. Mais elle savait aussi qu’elle avait
quelque chose qui incitait souvent les hommes à la fixer en respirant
bruyamment par la bouche. Un quelque chose auquel, malheureusement, Wulfric
demeurait insensible.
    Sur les coups de midi, ils s’arrêtèrent pour prendre un peu
de repos et manger le pain et le fromage qu’ils avaient emportés. Comme ils
s’abreuvèrent à l’eau claire d’un ruisseau, elle n’eut pas le moyen de lui
faire boire son philtre.
    Néanmoins, elle était heureuse. Elle avait l’homme qu’elle
aimait pour elle toute seule, et cela pour la journée entière. Elle pouvait le
regarder autant qu’elle le désirait, lui parler, le faire rire, sympathiser
avec lui et le toucher de temps en temps. Elle feignit même de croire qu’elle
aurait pu l’embrasser si elle l’avait voulu mais qu’en ce moment, elle n’en
avait pas envie. C’était presque comme d’être mariée avec lui, sauf que ce
bonheur ne durerait pas.
    Ils atteignirent Wigleigh en début de soirée. Perché sur une
hauteur et battu par les vents, le village dominait des champs à perte de vue.
Après ces deux semaines passées dans une ville trépidante d’activité, ce petit
rassemblement d’habitations éparpillées le long de la route entre le manoir et
l’église paraissait mort et étriqué. C’était pour la plupart de simples
masures, composées d’une étable accolée à une unique grande pièce servant tout
à la fois de cuisine, de pièce à vivre et de chambre à coucher. On distinguait
cependant quelques maisons cossues. Le manoir, par exemple, ressemblait à la
demeure d’un marchand de Kingsbridge de par sa taille et la disposition de ses
pièces, car les chambres à coucher se trouvaient à l’étage. Le presbytère aussi
méritait une remarque. Mais de tous ces bâtiments, seule l’église était
entièrement construite en pierre.
    La première de ces maisons cossues appartenait aux parents
de Wulfric. Avec ses portes closes et ses volets fermés, elle avait un air
désolé. Wulfric ne s’y arrêta pas. Il se rendit directement à la seconde,
qu’occupait la famille d’Annet. Sur un vague adieu à sa compagne de voyage, il
y pénétra, le sourire aux lèvres. Gwenda en éprouva brusquement un violent
sentiment d’abandon, comme lorsque l’on s’éveille d’un rêve délicieux. Ravalant
sa grogne, elle partit à travers les champs.
    La pluie du début de juin avait été propice aux cultures. Le
blé et l’orge étaient bien montés en graine. Il ne manquait plus qu’un brin de
soleil pour faire mûrir les épis. Les femmes du village étaient encore aux
champs. Elles avançaient d’un même mouvement le long des sillons, penchées pour
arracher les mauvaises herbes. Certaines lui firent bonjour de la main.
    Un sentiment de plus en plus fort de crainte et de colère
mêlées envahissait Gwenda à mesure que ses pas la rapprochaient de sa
destination. Elle n’avait pas revu ses parents depuis le jour où son père
l’avait échangée contre une vache. En la voyant, Pa allait avoir un choc. Il
devait la croire avec le colporteur. Comment allait-il réagir ? Et
elle-même ? Que dirait-elle à ce père qui avait trahi sa confiance ?
    Sa mère ne savait probablement rien de la transaction. À
coup sûr, Pa lui avait raconté une histoire – qu’elle s’était enfuie avec un
garçon, peut-être. Ma allait entrer dans une fureur effrayante.
    Quoi qu’il en soit, Gwenda se réjouissait de retrouver ses
petits frères et sœurs. Elle comprenait

Weitere Kostenlose Bücher